Dans l'élaboration des contrats d'adhésion qu'ils imposent aux clients, les professionnels doivent éviter d'y insérer des clauses abusives qui sont interdites par la loi. Une clause abusive n'engage en rien le consommateur signataire du contrat. par CHENTOUF ABDELHAFID Il est bien connu que le fournisseur et le consommateur ne sont pas sur un pied d'égalité. Pour s'en rendre compte, il suffit de se référer aux contrats des grandes entreprises; les conditions contractuelles de vente sont arrêtées et rédigées d'une manière unilatérale sans l'intervention du consommateur. La marge de négociation de ce dernier est souvent absente. Les cas les plus cités sont : les contrats d'assurance, les contrats de fourniture d'eau et d'électricité, les contrats de services téléphoniques, les contrats de transport et les contrats bancaires. Pour pallier les risques qui pourraient être générés par ce déséquilibre entre les parties contractuelles, la loi sur la protection du consommateur prévoit tout un dispositif contre les clauses abusives. En quoi consiste-t-il? Selon la loi édictant des mesures de protection du consommateur, « est considérée comme abusive toute clause qui a pour objet ou pour effet de créer, au détriment du consommateur, un déséquilibre significatif entre les droits et les obligations des parties au contrat ». Comment le caractère abusif d'une clause contractuelle est-il apprécié ? L'appréciation se fait en tenant compte des circonstances qui entourent la conclusion du contrat, et aussi de l'ensemble de ses clauses et de celles de tout autre contrat dont il dépend. Reste qu'il faut signaler que les dispositions de la loi contre les clauses abusives visent à instaurer une égalité juridique entre les parties contractantes et non pas une « égalité économique ». C'est la raison pour laquelle, l'appréciation du caractère abusif d'une clause ne porte pas sur l'adéquation du prix au bien vendu ou au service offert. En d'autres termes, une clause qui stipule un prix élevé ne peut pas être qualifiée d'abusive au sens de la loi sur la protection du consommateur. Le consommateur ne peut pas renoncer à ses droits. Même écrites et contresignées, les clauses abusives ne lui sont pas opposables. En suivant la pratique européenne, la loi marocaine dresse une liste de clauses qui sont présumées abusives. Parmi ces clauses qui sont au nombre de dix-sept, on peut citer celles qui ont pour objet : de permettre au fournisseur de modifier unilatéralement les caractéristiques du produit ou du service, d'imposer au consommateur qui n'exécute pas ses obligations une indemnité d'un montant disproportionnellement élevé ou de prévoir que le prix est déterminé au moment de la livraison du produit ou au début de l'exécution du service. Quelles sont les conséquences des clauses abusives sur le contrat? Aux termes de la loi sur la protection du consommateur, les clauses abusives sont «nulles et de nul effet». Cependant, le contrat reste applicable entre les parties dans toutes ses autres clauses sauf s'il ne peut pas subsister sans les clauses abusives. En cas de litige, il revient au fournisseur d'apporter la preuve du caractère non abusif de la clause contestée par l'acheteur. Il est à signaler que les dispositions de la loi sur les clauses abusives sont d'ordre public. Le consommateur ne peut pas renoncer à ses droits. Même écrites et contresignées, les clauses abusives ne lui sont pas opposables et ne peuvent produire à son égard aucun effet. C'est dire que compte tenu de sa spécificité, le droit de la consommation ne reconnaît pas le principe selon lequel «le contrat est la loi des parties ». Le droit marocain de la consommation est très jeune, car il vient d'être mis en place. Son efficacité dépendra de plusieurs intervenants, notamment le corps des enquêteurs relevant du ministère du Commerce et de l'industrie, des juges qui seront saisis de litiges sur la consommation et des associations de protection des consommateurs qui ont un grand rôle à jouer.