Tout laisse entendre que certaines entreprises figurant sur la liste des privatisables de 2009 et 2010 seront recalées. La déclaration de Karim Ghallab devant un parterre de députés, annonçant que le transfert de la RAM n'est pas à l'ordre du jour, n'est pas fortuite. D'autres structures de l'Etat pourraient lui emboîter le pas. L'information est tombée comme un couperet. Une sorte de pavé dans la mare qui a ranimé le débat sur la fameuse liste des privatisables courant 2009 et 2010. En effet, plusieurs mois après l'annonce officielle des noms des entreprises qui seront transférées vers le privé, aucune autre annonce sur le niveau d'avancement du processus n'a été faite. C'était le silence radio, jusqu'à ce que Karim Ghallab, ministre du Transport et de l'Equipement, réponde à une question orale au Parlement et déclare à la surprise générale que « le gouvernement ne dispose d'aucun programme effectif visant la cession de la compagnie Royal Air Maroc à court terme et qu'aucune négociation officielle n'est engagée actuellement avec une partie marocaine ou étrangère sur la cession de la RAM». Et d'ajouter, que «la conjoncture économique actuelle à l'échelle internationale n'est pas propice à la cession d'une entreprise publique, quelle qu'elle soit, a fortiori une compagnie de transport aérien ». Le discours du ministre de tutelle de la RAM était sans équivoque. Cependant, en réponse à une question de Challenge hebdo sur les tenants et les aboutissants d'une telle décision, une source proche du ministre a donné une réponse pour le moins surprenante. « Il n'en a jamais été question à part dans la presse. Il n'est pas du tout opportun pour nous d'en parler. C'est avec le département des Finances qu'il faudra voir », a déclaré cette source sur un ton laconique. Même son de cloche auprès de la RAM : «nous n'intervenons qu'une fois le terrain balisé, soit au moment où l'opération de l'audit est commanditée. Pour le moment, il n'en est rien. C'est le ministère des Finances qui peut vous fournir des éléments de réponse sur la date prévue pour lancer la machine». Direction donc le département de tutelle, puisque c'est lui qui est seul habilité à mener ce genre de dossier. « Tout transfert d'entreprise publique au secteur privé relève du domaine de la loi, et la programmation des transferts ainsi que la fixation du calendrier de réalisation relèvent des attributions du ministre de l'Economie et des Finances », précise d'emblée une source du même ministère. C'est donc Salaheddine Mezouar qui a toute latitude d'avancer ou de reporter la date de la passation de ces entreprises du public au privé. Plus encore. « Il y a lieu de signaler que même inscrite sur la liste, la compagnie (NDLR : la RAM) ne fera pas l'effet d'un transfert immédiat. Une opération de privatisation nécessite une préparation minutieuse et les modalités de sa mise en œuvre sont rigoureusement encadrées par la loi 39-89 régissant les privatisations », ajoute la même source. Dans la pratique, c'est toute une gymnastique qui est de mise avant toute opération de transfert. Une procédure administrative qui s'opère sur plusieurs phases et qui nécessite au minimum un délai de douze mois avant de prétendre au placement de l'entreprise selon le schéma décidé (soit par appel public à l'épargne ou dans le cadre d'un appel d'offres) par la commission de transfert qui assiste le ministre des Finances et dont les cinq membres sont de hauts fonctionnaires de l'Etat. Conclusion : tant qu'aucune mission d'audit n'a encore été commanditée, cela signifie que le processus n'est même pas encore enclenché. Contrairement à ce qui se dit, précisons que Supratours, Soread, LPEE et la Société Nationale des Transports et de la Logistique (SNTL) ne figurent pas sur la liste dressée en marge de la loi de finances 2009. Une information que tient à relayer le ministère des Finances. Qu'adviendra-t-il de la liste des privatisables ? Reste donc les deux filiales de la RAM, Atlas Hospitality Morocco et Atlas Blue, ainsi que le bureau d'études Conseil Ingénierie et Développement (CID) qui, eux, sont bel et bien sur ladite liste. Mais là non plus, les choses ne sont pas automatiques. «Tant qu'elles ne sont pas inscrites par voie légale sur la liste des entreprises privatisables, leur transfert au secteur privé ne peut être programmé, car cela relève des attributions des organes de la privatisation», note une source proche de Mezouar. Autrement dit, cela suppose d'amender la loi sur les privatisations et de la faire approuvée par les deux chambres. A la date d'aujourd'hui, cela n'a pas été fait ; le débat n'est même pas encore ouvert. On imagine alors qu'il est très peu probable qu'une opération de privatisation ait lieu au courant de cette année, étant donné notamment le délai de douze mois qui est de rigueur dans le cadre d'actions similaires. En tout cas, à ce jour, aucune valorisation de ces entreprises n'a été effectuée.