La décision de Bank Al Maghrib (BAM) de baisser le taux de réserve obligataire devrait soulager les trésoreries des banques marocaines. Toutefois, pas question de toucher aux taux directeurs car la première mission de BAM, c'est la stabilité monétaire à moyen terme. Abdelatif Jouahri se distingue encore par une orthodoxie qui s'est avérée payante jusqu'ici. La décision de Bank Al Maghrib (BAM) était attendue, et le pétillant wali n'a pas failli, deux points de moins sur le taux de réserve monétaire. Le milieu bancaire s'en trouve donc logiquement soulagé. En effet, selon les dires du wali, cela libérera un peu plus de 8 milliards de DH chez les banques. A contrario, le taux directeur reste inchangé à 3,25%. «Le resserrement structurel de la liquidité bancaire devient important», explique Abdelatif Jouahri. Il devenait donc urgent de parer à l'asphyxie monétaire et la décélération de l'octroi de crédits en prenant des mesures concrètes qui puissent soulager des banques devenues par trop dépendantes des injections de liquidités de BAM, avec une injection record de 15 milliards de DH le 9 juin dernier. Il faut rappeler qu'une mesure comparable avait été prise en début d'année, avec une baisse de trois points sur le taux de réserve monétaire libérant à l'occasion près de 11 milliards de DH. Cependant, il fallait aller encore plus loin et c'est chose faite. Le circuit de contagion de la conjoncture défavorable s'est révélé inversé au Maroc. Car, si au niveau international, la crise s'est diffusée de la sphère financière vers l'économie réelle, dans notre pays, on assiste au cheminement inverse. L'impact de la crise se confirme donc et «la contagion se fait à travers les canaux de l'économie réelle», souligne le rapport de la banque centrale. Aussi, la demande, aussi bien extérieure qu'intérieure, s'en trouve touchée et cela impacte par ricochet l'activité des banques. Ces dernières se plaignent de problèmes de trésorerie, mais cela est surtout dû à la dégradation de leurs avoirs extérieurs. Lâcher du leste était donc une nécessité. Toutefois, Abdelatif Jouahri se défend d'être un Greenspan marocain qui va à la rencontre du marché pour recevoir les doléances et répondre favorablement à ses demandes. Le wali rappelle sa principale mission: «la stabilité monétaire à moyen terme». Sur ce registre, la mission est accomplie, car l'inflation est plus que maîtrisée, puisque la prévision centrale fait état d'un taux d'inflation en dessous des 3% et d'une inflation sous-jacente autour des 2%. Une seule mission Cette dernière a même connu pour la première fois un glissement négatif au mois d'avril avec -0,1%. Toutefois, il n'est pas question de baisser les taux directeurs pour relancer l'activité. «Je ne suis pas un politique et je n'ai pas pour mission de soutenir la croissance», argue le wali avant d'étayer: «si l'on devait avoir une deuxième mission en charge, on devrait faire des arbitrages avec la première mission». Ce qui serait nocif aux deux missions in fine. Une orthodoxie avouée et argumentée, car si les banques centrales occidentales ont baissé de manière exacerbée leurs taux, ce n'était que des mesures exceptionnelles car il ne restait aucun autre moyen d'endiguer la crise financière et économique. Il faudra attendre l'après-crise pour juger de l'effet à long terme de ces mesures exceptionnelles. D'autre part, le maintien des taux directeurs à leur niveau actuel est aussi motivé par la volonté des investisseurs étrangers d'augmenter la part du financement intérieur de leurs projets. Or, c'est justement un réel danger pour notre système monétaire. La wali a mis en exergue le travail du ministère des Finances qui a signé une série de programmes de financement avec des institutions comme la banque islamique de développement, ou ses homologues arabe et africaine. L'objectif de ces protocoles d'accord est de trouver à l'extérieur le financement de la part en devise des programmes d'investissement de l'état. «Au niveau de la politique de change, la configuration actuelle est une assurance», estime le gouverneur de BAM. Il n'est donc pas question de la modifier, en tout cas tant que la conjoncture n'aura pas connu un retournement notable. Le wali estime qu'une inflexion a été constatée ces derniers temps, toutefois, il faut attendre que les plans de relance des différents pays portent leurs fruits pour pouvoir changer de perspective. L'heure est donc à la prudence, et il faut se garder de toute précipitation dans la prise de décision. En attendant, le prochain rendez-vous, le 24 septembre, qui donnera peut-être une autre lecture aux décisions de Bank Al Maghrib.