En quête de l'application des textes de loi sur l'environnement, les professionnels réclament des « écotaxes ». D'un autre côté, ils s'apprêtent à signer une convention avec le gouvernement pour la baisse des prix au profit du logement à 140.000 DH. Les détails avec Ahmed Bouhaouli. Challenge Hebdo : 10 à 15% du montant de tous les nouveaux investissements consentis par les cimentiers sont affectés à la protection de l'environnement. En contrepartie, les professionnels réclament le renforcement de l'arsenal juridique (textes d'application) et fiscal (écotaxes). Quelles sont vos attentes ? Ahmed Bouhaouli Ben Rahal : depuis 1997, date de la signature de la 1ère convention du genre entre un secteur industriel et le ministère de l'Environnement, les cimentiers ont réalisé, dans le cadre d'engagements pris de manière volontaire, la mise à niveau environnementale de l'ensemble des usines existantes aujourd'hui toutes certifiées ISO 14001 pour un montant de 1 milliard de DH, l'implantation d'équipements de protection de l'environnement (filtres à manches, opacimétries, analyseurs de gaz, pré-calcination…) dans les nouvelles usines (500 millions de DH), la mise en place de plateformes de traitement et de conditionnement de déchets industriels pour être substitués aux combustibles fossiles (500 millions DH), et enfin, l'implantation de parcs pour la production d'électricité éolienne pour un montant de 500 MDH. Si aujourd'hui, les cimentiers insistent pour que des dispositions réglementaires et institutionnelles soient prises, c'est pour que les cinq lois fondamentales sur l'environnement, celle de 1995 sur l'eau, celle de 2003 sur la protection et la mise en valeur de l'environnement, les études d'impacts et la pollution atmosphérique, ainsi que celle de 2006 sur les déchets, trouvent une application sur le terrain. En particulier, il est essentiel que le principe du pollueur-payeur soit adopté et que le coût de destruction (écologique) d'un déchet soit pris en compte, en amont, en responsabilisant le fabricant pour le cycle de vie de son produit. En découleront des filières organisées spécifiques à différents déchets (ménagers, pneus, plastiques, etc…). C.H. : quel est le manque à gagner que les cimentiers assument en l'absence de ce dispositif? A.B. : le manque à gagner dont il faut se préoccuper est plutôt celui subi par l'économie nationale au niveau des coûts engendrés par les nuisances et les dommages causés à l'environnement. Il représente actuellement 3,7% du PIB. C'est dire qu'avec un peu plus d'attention et d'actions de protection et d'amélioration de l'environnement, on peut espérer gagner quelques points pour notre PIB, surtout par les temps (de crise) qui courent. C.H. : les cimentiers continuent de figurer dans la liste des principaux pollueurs. Cette fibre écolo que vous scandez n'est-elle pas tout compte fait qu'un simple coup médiatique? A.B. : si la protection de l'environnement n'était qu'un sujet de mode, si ce n'était qu'un coup médiatique, les cimentiers n'en feraient pas une préoccupation majeure, permanente et ne s'engageraient pas aussi fort et de manière volontaire vis-à-vis des pouvoirs publics. Et puis, les investissements dans le domaine de l'environnement n'ont pas été vains. Tout en contribuant à améliorer l'environnement global (réduction de 40 à 65% des émissions de gaz et de poussières), ils ont permis aux cimentiers d'améliorer leurs performances économiques et techniques en réduisant leurs consommations d'eau (de 300 à 120 l/T de ciment), d'énergie thermique (de 1500 à 800 Kcal/Kg de clinker) et d'électricité (de 120 à 80 KWh/T de ciment). C.H. : y a-t-il d'autres projets dans le pipe en matière de respect de l'environnement? A.B. : en passant de 1,41% de dommages à l'environnement attribués en 1997 au secteur cimentier à 0,38% actuellement, les cimentiers ont de manière concomittante accru leur part dans la valeur ajoutée au PIB, la faisant passer de 0,67% à 1,84%. Il est même apparu, à travers une récente étude méso-économique réalisée par des experts suisses, qu'en 2008, le secteur cimentier a commencé à fournir un service au profit et pour le bénéfice de la communauté, en éliminant et en valorisant les déchets générés par d'autres activités économiques. Cette contribution des cimentiers ira en augmentant à travers les filières de valorisation des déchets industriels et ménagers en four de cimenterie à mettre en place conjointement avec les pouvoirs publics. Ce sont là – avec la promotion de l'énergie éolienne – les challenges de demain. C.H. : la signature avec le gouvernement concernant la baisse des prix du ciment au profit du logement à 140.000 DH tarde à voir le jour. Pourquoi ce retard ? A.B. : la convention consacrant la réduction consentie pour le logement social à 140.000 DH est fin prête. Pour sa signature, il s'agit simplement d'une question d'agenda et de date à trouver convenant à toutes les parties concernées.