Les importateurs de véhicules d'origine asiatique montent au créneau. Un peu tardivement… Ils se rendent compte, chiffres à l'appui, que le démantèlement tarifaire en vigueur leur porte préjudice. La tendance baissière des prix risque donc d'être compromise. Voilà en gros le message que l'on peut capter de la part des concessionnaires de véhicules d'origine non européenne regroupés dans le Givet, le Groupement des importateurs des véhicules pour l'équité tarifaire. Ces membres mènent campagne pour faire entendre leur voix. Ils reprochent au gouvernement de protéger plus qu'il ne le faut le marché des voitures importées du Vieux Continent (les Peugeot, Citroën, BMW et autres) alors que les Européens eux-mêmes n'en font pas autant concernant les véhicules qui s'introduisent sur leur territoire. Ce qui dérange, c'est que les voitures européennes ont un avantage sur les asiatiques qui les rend dominantes sur le marché marocain. Cet avantage provient notamment du démantèlement douanier convenu avec l'Union Européenne et qui est entré en vigueur depuis 2002. Il prévoit d'atteindre des droits d'importation nuls en 2012, au moment où, à la même échéance, les taux appliqués aux voitures importées d'Asie seront de 17,5%. C'est ce qu'a introduit la loi de Finances 2009. Les droits douaniers devront d'abord passer de 31,5% en 2008 à 27,5% en 2009 jusqu'à atteindre ces 17,5%. « Aux Etats-Unis par exemple ou dans l'Union européenne, ces taux s'élèvent respectivement à 2,5% et 10%. Pourquoi le Maroc devrait-il faire l'exception et imposer davantage? », s'interroge Adil Bennani, directeur général de Toyota Maroc et président du Givet. Pour essayer donc de convaincre les pouvoirs publics de l'utilité de réviser ces niveaux de taxation, sans pour autant trop toucher aux recettes de l'Etat, le Givet propose que le différentiel (l'écart entre les droits d'importation payés sur les voitures d'origine européenne et asiatiques) soit à un maximum de 10% pendant les quatre années à venir (scénario « Max-10 »). En d'autres termes, d'ici à 2012, le groupement souhaite que les droits d'importation passent de 17,5% à 10% ou moins. Le Givet n'en demande pas plus. Il n'est pas question pour lui de demander aux pouvoirs publics l'équité tarifaire totale, c'est-à-dire un taux nul. « Nous nous inscrivons dans une démarche responsable qui prend en considération l'importance des accords signés entre le Maroc et l'Union Européenne. Notre démarche est raisonnable. Il est normal que les voitures européennes bénéficient de l'avantage de l'accord conclu entre les deux parties mais il ne doit cependant pas être disproportionné », tient à préciser Bennani. Lobbying auprès des ministères Le Givet va donc commencer à faire du lobbying auprès des ministères, d'abord pour présenter l'étude détaillée que le cabinet Mazard a réalisée pour son compte. Elle comprend l'analyse économique et réglementaire du secteur, la modélisation de l'impact du démantèlement sur les concessionnaires et identifie le scénario optimal et le plus consensuel, le max-10. Le différentiel devrait être réduit à un maximum de 10 points entre les tarifs des véhicules importés d'Europe et d'Asie maintenant et jusqu'en 2012. Selon l'analyse comparative, Nabyl Bayahia, directeur associé à Mazars, conclut qu'en adoptant une pareille mesure, la part de marché des voitures importées d'Europe devrait s'établir à 50%. Idem pour celle des voitures importées d'Asie. Le démantèlement en vigueur conduirait, lui, à des parts respectives de 57% pour les européennes et 43% pour les asiatiques pour un marché estimé à 247.500 ventes. Le Givet entend donc frapper à toutes les portes pour convaincre de l'utilité de réduire les droits de douane à l'égard de ses membres. Parmi les arguments développés aussi, celui du quasi maintien des recettes fiscales. Selon l'étude de Mazars, l'Etat ne devrait pas trop y perdre. En 2012, les importateurs de véhicules d'origine européenne paieraient 3,5 milliards de dirhams d'impôts et taxes contre 3,9 milliards si le démantèlement douanier n'est pas modifié. Les importateurs de voitures asiatiques paieront 3,8 milliards de dirhams, que ce soit dans le scénario du démantèlement actuel ou celui prévoyant une réduction d'écart à 10%. Les pouvoirs publics sont maintenant avisés. Le Givet leur sert sur un plateau une étude qu'ils auraient dû réaliser eux-mêmes. Du temps est gagné. Reste à savoir si les lobbyistes auront les moyens qu'il faut pour faire pression sur les prises de décision. Le statut quo, lui, pourrait créer un obstacle à la baisse des prix des véhicules et entraver la concurrence et la compétitivité du secteur. Parole de concessionnaires.