Les délégués du personnel ont pour mission de présenter au chef d'entreprise toutes les réclamations individuelles ou collectives qui n'auraient pas été directement satisfaites et qui sont relatives aux conditions de travail. au cas où le désaccord subsiste, ils pourront saisir l'inspection du travail Challenge Hebdo : En quoi consiste la mission des délégués et à quel moment ces derniers peuvent-ils intervenir ? M'hamed El Fekak : Les attributions des délégués sont clairement définies par le code du travail qui parle de réclamations qui n'auraient pas été satisfaites, ce qui laisse entendre que l'intervention des délégués ne serait ni concevable ni recevable que si, au préalable, le salarié avait présenté lui-même ses réclamations directement auprès de son employeur. La formule utilisée par le texte montre clairement la volonté du législateur d'offrir à chaque salarié la possibilité de régler son problème directement auprès de son employeur. Elle montre également que les salariés conservent le droit de présenter eux-mêmes leurs revendications à l'employeur, et qu'ils ne sont pas obligés de s'en remettre aux délégués. Il en résulte que la possibilité de saisir un délégué du personnel n'est offerte qu'au salarié ayant déjà présenté, sans succès, sa réclamation directement auprès de l'employeur. Celui-ci est autorisé à opposer une fin de non recevoir à toutes réclamations présentées pour la première fois par un délégué du personnel. Le salarié a le libre choix de désigner le délégué qu'il chargera de présenter ses réclamations auprès de l'employeur. Le délégué ainsi désigné doit obligatoirement transmettre la réclamation, il n'a pas le pouvoir d'en apprécier le bien fondé. C.H. : L'objet des réclamations est-il défini par le code du travail ? M.E. : Les réclamations individuelles ou collectives sont relatives aux conditions de travail découlant du contrat de travail, du règlement intérieur, de la convention collective et de la législation du travail. Cette liste n'est pas limitative en ce sens que des formules aussi larges que «conditions de travail» permettent aux délégués d'intervenir pour toutes réclamations individuelles ou collectives concernant le travail. Le mandat du délégué ne lui permet pas de négocier en désavantageant certains salariés, ou de transformer des entretiens avec le personnel en manifestations revendicatives ou d'haranguer les salariés dans les ateliers pour les engager à prendre part à une manifestation syndicale. C.H. : A quel moment l'inspecteur du travail intervient-il et en quoi consiste son intervention ? M.E. : La saisine de l'inspecteur du travail par le délégué du personnel n'est possible qu'en troisième lieu, c'est-à-dire lorsque la réclamation faite directement par le salarié, puis par le délégué, n'aura pas été satisfaite et que le désaccord subsiste. Les compétences de l'inspecteur du travail sont particulièrement vastes, et les délégués du personnel sont investis, en fait, d'un droit de surveillance sur l'ensemble des normes applicables dans l'entreprise, droit qui fait d'eux, dans une certaine mesure, des auxiliaires de l'administration. L'inspecteur du travail ne peut, théoriquement, intervenir ni agir en ce qui concerne des réclamations précises que lorsque le désaccord subsiste, mais il peut, dans la pratique, intervenir et agir dans le cadre des compétences qui lui sont conférées par la loi, ce qui ne l'empêche pas d'aborder avec l'employeur les réclamations pour lesquelles il a été directement saisi. C.H. : Certaines décisions du chef d'entreprise doivent, pour être appliquées, recevoir au préalable l'accord des délégués du personnel. Lesquelles ? M.E. : Il n'y en a pas. Le chef de l'entreprise est seul responsable dans son entreprise, il est libre de prendre toutes les décisions qui lui paraissent nécessaires pour le bon fonctionnement de son entreprise. Pour certaines décisions il doit, tout simplement, les communiquer aux délégués, pour d'autres, il doit les communiquer pour consultation. Citons dans le cadre de la communication le cas de l'employeur qui envisage le licenciement de tout ou partie de ses salariés pour motifs technologiques, structurels ou économiques, il doit porter sa décision à la connaissance des délégués des salariés, au moins un mois avant de procéder au licenciement. C'est le cas de l'employeur qui est tenu d'établir après l'avoir communiqué aux délégués des salariés, un règlement intérieur, et de le soumettre à l'approbation de l'autorité gouvernementale chargée du travail. Et enfin le cas de l'employeur qui envisage de réduire la durée normale de travail et qui doit en aviser les délégués des salariés, une semaine ou moins, avant de procéder à la réduction, et leur communiquer, en même temps, tous les renseignements sur les mesures qu'il envisage de prendre et les effets qui peuvent en résulter. Dans le cadre de la communication pour consultation, citons le cas de l'employeur qui, pour se protéger des crises périodiques passagères, peut répartir la durée annuelle globale de travail sur l'année, à condition que la durée normale du travail n'excède pas dix heures par jour et ce après consultation des délégués du personnel. C'est le cas de l'interruption collective du travail dans un établissement ou partie d'établissement résultant de causes accidentelles ou de force majeure, où la durée journalière de travail peut être prolongée à titre de récupération des heures de travail perdues, après consultation des délégués des salariés. Citons enfin le cas des dates du congé annuel qui sont fixées par l'employeur, après consultation des délégués des salariés. C.H. : Les délégués ont-ils d'autres rôles ? M.E. : Oui, ils font partie du comité de sécurité et d'hygiène constitué dans le cadre de la médecine du travail, ils font partie également du comité d'entreprise institué dans le cadre des entreprises employant un effectif supérieur à 50 salariés. Enfin, il y a lieu de noter que, conformément aux dispositions de l'article 62 du code du travail, le délégué des salariés peut, à la demande du salarié convoqué par l'employeur avant son licenciement, assister à l'entretien prévu par le code. N.B. : dans notre prochaine édition, nous reviendrons avec Me M'hamed El Fekak sur : La mise en place de l'institution.