Kraft Food Maroc dealera-t-elle avec l'ONA pour reprendre ses parts dans Bimo ? Bams passera-t-elle sous le giron d'un opérateur égyptien ? Les informations quant à de futures opérations de rapprochements dans le secteur de la biscuiterie foisonnent, alors même que les discussions avec les pouvoirs publics vont bon train pour les convaincre d'une baisse des droits de douane sur les intrants. Le constat a été révélé par une étude sur le secteur, réalisée il y a deux ans pour le compte du Programme d'appui aux entreprises, financé par l'Union européenne. On peut y lire textuellement qu'à l'exception d'une biscuiterie (ndlr Bimo) relevant d'un holding financier national (l'ONA) et d'un grand groupe mondial (Kraft Food Maroc), toutes les biscuiteries marocaines sont la propriété de familles ou de groupes familiaux. Aujourd'hui, plusieurs signes laissent présager un changement de situation. Dans les coulisses, on parle de futurs rapprochements dans le secteur aussi bien du côté des petits opérateurs que parmi les grands. Dans la foulée, des rumeurs persistantes citent explicitement la première biscuiterie de la place. En effet, Bimo, détenue égalitairement par l'ONA et Kraft Food Maroc, ferait l'objet d'un changement de son actionnariat à travers la reprise par Kraft des parts de son partenaire dans le tour de table. «Notre entité est en dehors de la mêlée relative au mouvement de concentration qui pourrait avoir lieu entre petits intervenants», lance d'emblée Mostafa Hammoud, DG de Bimo. Silence radio… Et il nuance : «de toutes les façons, le management est le même. Il travaillera pour l'entité quel que soit son actionnariat. Nous n'avons pas à statuer sur les questions de rapprochement». Du côté de Kraft Food, silence radio. Impossible de joindre les responsables pour recueillir leur propos sur la question. «S'il y a de l'actualité, l'entreprise communiquera sous forme de communiqué», se contente de lancer une source interne sous couvert d'anonymat. Black out total de la part d'une entreprise à qui on attribue l'ambition de se rapprocher d'autres nouveaux opérateurs. Les entreprises qui seraient intéressées par un tel deal ne manqueront pas. Car il faut dire que la multinationale dégage une grande capacité à tirer son partenaire vers le haut. Il n'est pas faux que depuis que Kraft Food a intégré le tour de table de la marque à l'épi de blé, ce dernier arrive sans peine à sortir son épingle du jeu. La traversée du désert fait partie de son passé, puisqu'il est aujourd'hui non seulement premier de la classe, mais qu'«il dispose de 7 fois plus de parts de marché que son challenger», à en croire les dires de M. Hammoud, qui revendique 50% des parts de marché. Cela se passe dans une filière fortement concentrée autour de 6 entreprises (sur un total composé d'une soixantaine), qui réalise 82,6% du CA, concentre 91,9% des effectifs et est à l'origine de quelque 80 % des tonnages, selon des statistiques récentes. Une configuration qui va changer de fond en comble si les éventuels mouvements de concentration en vue se concrétisent. En effet, dans ce même microcosme, un autre deal serait conclu. Il concerne la biscuiterie Bams, fondée en 2004 par les familles Meskini et Ebbou ; ceux-là même qui étaient à l'origine de la création en 1981 de Bimo. Cette dernière serait reprise partiellement par un investisseur égyptien. Contacté à ce sujet, le management de Bam's n'a ni infirmé ni confirmé l'information. Un trend haussier Aussi, d'autres biscuiteries de taille petite et moyenne feraient, elles aussi, l'objet de fusion pour mieux attaquer un marché aujourd'hui en croissance. En effet, en dépit de toutes les difficultés, le secteur s'est inscrit sur un trend haussier depuis 2007, réalisant une croissance à deux chiffres. Les changements opérés dans les habitudes de consommation des Marocains expliquent en partie l'engouement pour des produits industrialisés prêts à la consommation. Mais il faut aussi savoir que depuis l'ouverture des frontières et la multiplicité des accords de libre-échange, beaucoup d'importateurs ont investi le secteur. Une donnée qui a eu des conséquences contradictoires. En effet, d'un côté, les importations ont introduit un nouveau souffle dans le secteur, obligeant les producteurs nationaux à faire un effort pour suivre la tendance enregistrée en termes de diversification de l'offre, auparavant très limitée. Mais d'un autre côté, le marché était devenu tel que les conditions de concurrence n'étaient pas les mêmes pour tous. Et pour cause, les importateurs pouvaient profiter d'exonération des droits de douane alors que les intrants sont toujours assujettis à ces droits. Un débat vieux de plusieurs années, mais qui continue à alimenter les négociations entre l'Association des biscuitiers, chocolatiers et confiseurs. Aujourd'hui, les discussions sont menées de front avec les ministères de l'Industrie, des Finances et de l'Agriculture. Les attentes des opérateurs économiques vont bien évidemment dans le sens d'une baisse de la pression douanière sur les matières premières. «Le commerce extérieur n'a pas encore fait sa mue. La politique mise en place ne permet pas d'avoir la visibilité nécessaire pour investir en force et tenir tête aux importations via des bases de concurrence similaire pour tous», dixit Hakim Marrakchi, président de la Fédération nationale de l'agroalimentaire.