La Société générale des travaux du Maroc (SGTM) continue d'enchaîner les projets stratégiques dans le royaume à l'image de la construction du Grand Stade Hassan II de Casablanca dont elle vient de donner le premier coup de pioche ou encore le projet pharaonique du viaduc de Sakia El Hamra, le futur plus grand pont du Royaume, qu'elle a démarré récemment. Engagé dans une série de projets d'infrastructures à travers le pays, le succès du groupe Kabbaj est aussi un exemple de transmission familiale réussie. La construction du Grand Stade Hassan II de Casablanca a officiellement débuté avec la SGTM en charge des terrassements, un marché remporté à la mi-août dernier pour un montant de 356 millions de DH. Ce stade accueillera les rencontres de la Coupe du Monde 2030, organisée conjointement par le Maroc, l'Espagne et le Portugal. Le groupe Kabbaj, fondé en 1971, a déjà été impliqué dans des projets majeurs comme l'aéroport Mohammed V ou la ligne à grande vitesse (LGV) Tanger-Casablanca, ainsi que dans la construction d'une usine de fabrication de vaccins pour assurer la souveraineté vaccinale du pays. L'empreinte du groupe sur les grands chantiers nationaux SGTM a laissé son empreinte sur plusieurs chantiers nationaux de grande envergure, tels que Dar As-Sikkah, où est frappée la monnaie nationale, le campus de l'Université Mohammed VI Polytechnique (UM6P) à Rabat, et la construction du port Nador West Med. « La SGTM a acquis une expertise qui n'a rien à envier à certains mastodontes étrangers du BTP », commente un fin connaisseur du secteur. Cela a permis au groupe de décrocher en 2021, avec SOMAGEC de la famille Sahyoun, un marché stratégique pour la construction du port Dakhla Atlantique, un projet de 10 milliards de DH destiné à dynamiser le développement des provinces du sud. En août 2023, SGTM, en consortium avec les groupes SOMAGEC, STAM et SNCE, a lancé la construction d'un ouvrage d'envergure baptisé «Autoroute de l'eau» dès son ouverture par les réseaux sociaux grâce à son importance vitale pour l'axe Rabat-Casablanca. Ce projet permet de transférer les volumes d'eau perdus du bassin de Sebou vers les bassins de Bouregreg, Oum Er Rbia et Tensift. Avec un coût de 6 milliards de DH, cet ouvrage crucial pour la gestion de l'eau potable et les besoins agricoles a été réalisé dans un délai record pour répondre au stress hydrique récurrent. Lire aussi | SGTM décroche le méga marché du barrage Ait Ziat En juillet dernier, la SGTM a lancé la construction du viaduc de Sakia El Hamra, le futur plus grand pont du Royaume, pour un montant de 1,38 milliard de DH. Avec ses 1848 mètres de long et 21,4 mètres de large, cet ouvrage s'inscrit dans le cadre du projet de la voie express Tiznit-Dakhla et du développement des provinces du Sud. Ce viaduc sera le quatrième signé par la famille Kabbaj, après ceux d'El Hachef, connu pour ses 3,5 km de longueur. Une réussite dans le secteur privé et public Depuis les années 1980, le géant du BTP a réalisé de nombreux chantiers prestigieux, tant publics que privés. Parmi lesquels figurent le Morocco Mall, le siège du ministère des Affaires étrangères, le port de Safi, le Grand Stade de Marrakech, la Bibliothèque nationale, l'hôpital Cheikh Zayed de Rabat, la station de transfert d'énergie par pompage (STEP) Afourer avec Alstom pour un investissement de 1,6 milliard de DH, le terminal polyvalent de grande capacité commerciale à Jorf Lasfar et le doublement de la voie Kénitra/Meknès pour un montant de 2,16 milliards de DH, le pont Moulay El Hassan (Bouregreg) dont le coût avoisine 1,1 milliard de DH ainsi qu'une multitude d'hôtels tels que la Mamounia, le Hyatt Regency et le Sofitel de Casablanca. Lire aussi | Le fonds ARIF apporte 200 MDH à la cimenterie du groupe SGTM La SGTM a également montré une maîtrise dans la construction d'ouvrages hydroélectriques avec des projets comme le barrage El Hachef et le complexe hydraulique Dchar El Oued-Aït Messaoud. D'autres barrages dont notamment ceux de Boukerkour (Tamesna), Igouzoulen (Essaouira), Oued Rmel (Tanger-Med), les travaux de génie civil du barrage Aït Hammou, qui a nécessité un investissement de 560 millions de DH et la surélévation du barrage Sidi Mohamed Ben Abdellah. La naissance d'une légende La SGTM a été fondée en 1971 par deux frères, Ahmed et M'hamed Kabbaj. Leur vision audacieuse intervient à un moment crucial : le Maroc entame une révolution infrastructurelle. Ahmed, ingénieur diplômé de l'Ecole des Ponts et Chaussées de Paris, et M'hamed, également ingénieur des Travaux publics, s'unissent pour transformer le paysage du pays. Lire aussi | Ahmed Kabbaj, le PDG de SGTM, n'est plus ! La SGTM démarre son ascension avec des réalisations marquantes. Parmi les premières œuvres notables, on trouve la surélévation du canal de Safi, le barrage Lalla Takerkoust et le marché de gros de Rabat. Leur expertise et leur maîtrise deviennent vite légendaires, établissant SGTM comme un leader incontournable dans le secteur. « A deux, ils ont mis leur connaissance, plutôt leur théorie en concordance avec les besoins du Royaume. Les chantiers et les commandes se succédant, la société familiale SGTM s'est au fur et à mesure transformée sous leur poigne ; elle a prospéré pour devenir leader du secteur », ajoute notre fin connaisseur du secteur. Des projets emblématiques La décennie suivante voit le groupe Kabbaj à l'œuvre sur des projets phares : l'aéroport Mohammed V de Casablanca, les sièges sociaux de Royal Air Maroc et de la Banque Populaire, et le Grand Stade de Marrakech, entre autres. La période 1991-2000 a été marquée par une amplification du succès du groupe SGTM. De nouveaux sièges sociaux, des équipements publics comme l'Université Al Akhawayn à Ifrane, et des projets internationaux, tels que l'aéroport Al Ain aux Emirats Arabes Unis, ont été réalisés. Le groupe a également pris part à des projets d'envergure, comme le Technopark et les tours du Twin Center, à Casablanca. Lire aussi | La BAD apporte finalement son financement à la future cimenterie de Tekcim De 2001 à 2011, le début du 21ème siècle est marqué par l'avènement d'une nouvelle ère et un formidable élan économique pour le pays, notamment grâce à la politique des grandes infrastructures. Le groupe SGTM joue un rôle clé en contribuant à la réalisation de nombreux projets importants : le grand port Tanger Med, le barrage de protection du port, le Grand Stade de Marrakech, le pont Moulay El Hassan, Morocco Mall, la Casa Marina, ainsi que divers projets touristiques et la tour Maroc Telecom. Il est frappant de constater que presque tous les grands chantiers d'infrastructure portent la marque de SGTM. Pour notre expert du secteur, la clé de ce succès réside dans la compétitivité du groupe Kabbaj face à ses concurrents lors des appels d'offres. Ils réussissent à proposer des offres parfois jusqu'à 10% plus avantageuses que celles de leurs rivaux, comme ce fut le cas pour le projet de Nador West Med. « Ils mettent un accent particulier sur l'aspect technique, ce qui leur permet de réduire certains coûts. Cet aspect est essentiel dans notre secteur. En résumé, la réussite de leurs offres résulte d'une combinaison d'innovations techniques et d'une gestion efficace », explique-t-il. Le 4 janvier 2019, le capitaine d'industrie, Ahmed Kabbaj, 76 ans, va laisser derrière lui le fleuron du secteur du BTP du royaume, transmettant à son partenaire de toujours, son frère M'hammed (78 ans aujourd'hui), et aussi aux enfants un héritage de discipline, d'exigence et de sens de la responsabilité. Il est devenu un modèle pour les entrepreneurs et les bâtisseurs du Maroc. Un tournant stratégique : une cimenterie à El Jadida Cinq mois après la disparition d'Ahmed Kabbaj, le leader du secteur BTP au Maroc fait une annonce majeure : le groupe SGTM va se doter d'une cimenterie à El Jadida. Cet investissement marque un tournant significatif dans l'histoire du groupe familial, affirmant sa volonté de devenir un acteur intégré. Il convient de noter que cette unité industrielle était attendue depuis plusieurs années ; les études de faisabilité techniques et environnementales avaient été réalisées depuis longtemps, le projet étant en préparation depuis 2012. Pour financer son projet de 2,6 milliards de DH via sa filiale Tekcim, les Kabbaj ont réussi à mobiliser un consortium bancaire composé de la Banque africaine de développement (BAD), qui a fourni 450 millions de DH à elle seule, ainsi que Bank of Africa (BOA), Banque centrale populaire (BCP) et Société générale Maroc. Pour cette opération, ils sont accompagnés par la banque d'affaires Ascent Capital Partners et le cabinet d'avocats Gide Loyrette Nouel, respectivement en tant que conseiller financier exclusif et conseil juridique. Lire aussi | Production d'électricité verte : SGTM a-t-il jeté l'éponge ? La cimenterie baptisée Novacim, qui sera construite en collaboration avec le partenaire danois FLS Midth, aura une capacité nominale de 3 600 tonnes/jour de clinker, équivalente à 1,4 million de tonnes de ciment par an. Depuis novembre dernier, l'usine, située à la commune rurale d'Oulad Ghanem, dans la province d'El Jadida, est désormais opérationnelle. Ce site est idéalement positionné pour desservir le marché local et les marchés régionaux de l'Afrique de l'Ouest. Après Anas Sefrioui avec Ciments de l'Atlas, SGTM fait son entrée remarquée dans le secteur très fermé des industriels du ciment, jusqu'alors dominé par les multinationales, grâce à sa stratégie d'intégration verticale et à son expérience dans des projets de grande envergure. Aujourd'hui, avec les nombreux grands projets en cours dans le royaume, qui se prépare à accueillir deux événements sportifs majeurs, la CAN 2025 et le Mondial 2030, le secteur cimentier est en pleine expansion. Selon le ministère de l'Aménagement du Territoire, de l'Urbanisme et de l'Habitat, la consommation de ciment avait atteint 8,73 millions de tonnes à la fin du mois d'août, en hausse de 7,2 % par rapport à la même période l'année précédente. Rien qu'en août, la consommation a progressé de 9,89 %, atteignant 1,28 million de tonnes par rapport à août 2023. Transmission et innovation Mais, au-delà de cette diversification, Hamza et Mohammed, les fils d'Ahmed, et Jihane et Ali, les enfants de M'Hammed, devront assurer la relève. Comme leurs pères, ils sont passés par de grandes écoles à Paris, Londres ou Montréal. Depuis quelques mois, le groupe bénéficie de l'expertise du cabinet canadien CCSG, dont la mission est d'accompagner la SGTM dans la transition d'un modèle de gouvernance familiale vers un modèle de gouvernance corporative. Cette transformation vise à permettre au groupe marocain de gérer pleinement sa croissance et son développement. Lire aussi | SGTM renforce sa filiale ivoirienne En plus de Novacim, le groupe possède trois autres filiales : SGTM Immobilier, créée en 2006, qui gère un important patrimoine foncier dans plusieurs villes du Royaume ; SGTM Energy, dédiée au développement des énergies renouvelables au Maroc et à la promotion des initiatives privées dans ce domaine et Inframet, une société de charpente et de construction métallique, lancée en 2022. Comme d'autres champions nationaux, la SGTM s'est engagée, depuis 2011, sur un nouveau front en Afrique où elle est devenue un acteur reconnu. Avec des implantations en Côte d'Ivoire, au Burkina Faso et au Cameroun, le groupe a mené des projets majeurs tels que des barrages et le récent aménagement de la Baie de Cocody à Abidjan, d'un coût global de 425 millions d'euros. Hamza Kabbaj, très actif sur le continent, a intensifié les prospections et anticipe les projets futurs. Le groupe vise à réaliser au moins 35% de son chiffre d'affaires en dehors du Maroc, d'ici 2028. Avec un chiffre d'affaires de plus de 7 milliards de DH et plus de 10 000 collaborateurs, le groupe familial, dirigé par le cofondateur M'hammed Kabbaj, poursuit son expansion sous la conduite de Hamza Kabbaj. Âgé de 43 ans, Hamza Kabbaj a étudié le génie civil à l'University College de Londres (UCL) et détient un MBA des Ponts et Chaussées en France.