Le mastodonte français Castel qui est revenu sur le marché des eaux minérales au Maroc en lançant depuis le 1er juillet 2010 l'eau de source « Aïn Ifrane», est en train de se délester de cette activité dans le Royaume. Face à un marché devenu de plus en plus concurrentiel Castel veut se concentrer sur ses activités de boissons alcoolisées et se lancer dans la production de boissons gazeuses sous marque locale. En attendant, les acheteurs se bousculent pour le rachat d'Aïn Ifrane. Fin juin 2022, le mastodonte français Castel et le géant américain Coca-Cola, annoncent que les contrats qui les lient dans une dizaine de pays africains et selon lesquels Castel embouteille et commercialise les boissons de l'Américain ne seront pas reconduits. Du coup, dans ces pays où le groupe français est implanté, ses filiales arrêtent d'embouteiller des produits Coca. La Solibra (Côte d'Ivoire), la Sobebra (Bénin) et Brakina (Burkina Faso) cèdent place respectivement à Carré d'Or, Dongaco SA et Coca-Cola Burkina Bottling Company, tandis que SOBOA (Sénégal) et SABC (Cameroun) sont en train de suivre. Idem pour l'Angola et l'Egypte. Mais cette fin du partenariat du brasseur français avec The Coca-Cola Company semble pousser le groupe Castel à revoir son positionnement global sur le continent africain. En effet, parallèlement à son divorce à l'amiable avec le géant américain, le mastodonte français va céder ses marques d'eau minérales et gazeuses. Ainsi, ce sont pas moins de 17 marques d'eaux qui sont concernés, dont Aïn Ifrane au Maroc, Awa, Cristalline, Aquabelle, Marwa, Vitale, EauVive, Safia, Possotomè, Melliti. « Nous avons jugé que l'eau n'est pas stratégique dans nos activités. Et puis, ce marché est devenu de plus en plus concurrentiel », justifie Charles de Beistegui, Directeur Associé de No Com en charge de la communication du Pôle « Eaux » du groupe Castel, contacté par Challenge, qui souligne que les ventes vont se faire progressivement et marché par marché. Lire aussi | Fausse commande de 4000 tonnes de sucre sur l'axe Dakar-Casablanca, une mafia pompe 14 millions de DH à une banque Des fonds d'investissement et le Groupe Bernard Hayot dans la bataille du rachat d'Ain Ifrane Ainsi, si le géant français a enclenché le processus de cession de ses marques d'eaux en Afrique qui pèse 10 % du volume de son chiffre d'affaires, pour l'instant seules ses deux filiales marocaine et ivoiriennes sont sur le point d'être cédées, notamment la Société Euro-Africaine des Eaux (également filiale de la Société des Brasseries du Maroc) qui exploite la source d'eau de Ben Smim « Aïn Ifrane» et Solibra qui commercialise Awa et Cristalline. « Pour l'activité d'eau minérale Aïn Ifrane, Castel est en pourparlers avec deux investisseurs potentiels », indique Charles de Beistegui qui tient à garder confidentiel l'identité de ses deux acheteurs qui se sont déjà manifestés. Mais selon nos sources, la marque Ain Ifrane, confrontée à un peu moins d'une dizaine de concurrents locaux, a enregistré plusieurs manifestations d'intérêt dont celles du gestionnaire de fonds IDI Emerging Markets, du fonds Adenia basé à Maurice, d'un autre grand fonds d'investissement de la place ainsi que la Société antillaise Groupe Bernard Hayot (GBH) qui exploite les hypermarchés Carrefour en Martinique. Pour rappel, c'est le 1er juillet 2010 que la Société des Brasseries du Maroc (SBM) a lancé officiellement la commercialisation d'Aïn Ifrane sur le marché national. C'est à Ben Smim, une région montagneuse située à quelques km d'Ifrane, qu'est née cette eau de source. Cette activité de SBM, créée en 1919, ne date pas d'aujourd'hui. En effet, le développement du pôle Eau, Sidi Harazem en l'occurrence, remonte à 1966 avec la prise de participation de SBM dans le capital de la Sotherma. En 2000, un partenariat avec Danone pour le lancement de l'eau minérale Ain Saïss avait vu le jour avant que la filiale brasserie du groupe Castel ne revienne sur le marché des eaux minérales en lançant Ain Ifrane à travers sa filiale : la Société Euro-Africaine des Eaux (EAE) qui produit depuis la bouteille Aïn Ifrane dans une usine d'une superficie de 4 400 m2 située également à Ben Smim. Rappelons également qu'en 2008 déjà, le retrait de Castel du marché français des eaux minérales en France avait généré 750 millions d'euros pour la vente de ses 60 % de part dans la holding Alma. Lire aussi | Ryanair annule des vols en Belgique, en France et en Espagne suite à une grève d'hôtesses et stewards Verrerie, marque locale de soda, les nouvelles ambitions de Castel Aujourd'hui, en se séparant de son activité d'eau minérale sur le continent, le groupe Castel veut se concentrer sur ses activités de boissons alcoolisées et de soda dans le sillage de la rupture de son partenariat avec le géant Coca. Quid du Maroc ? « En abandonnant son activité son eau minérale, Castel, qui choisit ses combats, a ainsi la volonté de favoriser les bouteilles en verre. Au Maroc, le groupe va continuer d'investir dans la brasserie et probablement lancer une unité de verrerie qui viserait l'exportation. Idem pour les boissons gazeuses pour lesquelles il compte lancer une marque locale comme prévu également dans d'autres pays africains. En fait, Castel va se focaliser sur des boissons avec un conditionnement en verre plutôt qu'en PET, pour ainsi valoriser ses verreries », explique Charles de Beistegui.