Le président de la Cour des comptes, Driss Jettou, a présenté son rapport au titre de l'année 2011 au Souverain. Le document marque un net accroissement des infractions aux dispositions légales en matière de gestion des deniers et des affaires publiques. PAR ABDELALI DARIF ALAOUI Le rapport de la Cour des comptes (CDC) au titre de l'année 2011 vient d'être rendu public. Disponible sur le site institutionnel de la Cour, le présent rapport contraste avec le précédent. En effet, les deux rapports ne se basent pas sur la même démarche. Est-ce dû au changement du président de la Cour des comptes, avec l'arrivée de l'ex-Premier ministre Driss Jettou à la tête de cette juridiction financière? Tout laisse croire que le nouveau président n'entend pas adopter la même approche que celle de son prédécesseur, du moins sur le plan de la méthodologie de rédaction du rapport. Dans un prélude au premier tome du présent rapport, ce dernier revient sur les conclusions de celui de 2009 et sur le suivi de ses recommandations. Il indique à cet égard que 572 recommandations ont été transmises à 29 organismes contrôlés, dont « 276 sont suivies d'effets, 222 sont toujours encours de réalisation et 74 recommandations n'ont pas été mises en oeuvre par les organismes concernés », souligne le rapport 2011. Grosso modo, le rapport 2011 de la Cour des comptes est scindé en deux parties. La première est dédiée aux activités de la Cour des comptes se rapportant au contrôle de la gestion et de l'emploi des fonds publics et celles relatives aux attributions juridictionnelles. Outre le suivi des recommandations de l'avant dernier rapport, la Cour présente dans cette partie un résumé du rapport de la Cour sur l'exécution de la loi de Finances pour l'année 2009 et expose l'activité de la Cour au niveau de la coopération internationale. La seconde partie est, quant à elle, consacrée à la présentation des activités de contrôle des Cours régionales des comptes (CRC) aussi bien relatives aux collectivités territoriales qu'aux groupements qui y sont liés. Statu quo ante Au terme de la mission de contrôle au titre de l'année 2011, la Cour a dégagé un ensemble d'enseignements qui sont autant d'insuffisances et de dysfonctionnements de la gestion des deniers publics. Ces derniers sont récurrents comme la faiblesse des systèmes de contrôle interne et leur capacité de garantir une gestion optimale des ressources et des emplois et la protection du patrimoine des entités publiques, le manque de régularité et de sincérité des « opérations réalisées qui sont parfois bafouées, notamment, dans le cas des commandes publiques » et la fiabilité sujette à caution des projets et des investissements publics, qui est due en partie à l'incapacité de certaines entités publiques de les mettre efficacement en oeuvre. Au terme de la mission de contrôle de la CDC en 2011, « le ministère public près des juridictions financières a décidé de poursuivre 36 personnes, devant la Cour des comptes, en matière de discipline budgétaire et financière; et a enclenché la même procédure à l'encontre de 74 personnes devant les différentes Cours régionales des comptes ». 27 personnes poursuivies pénalement En matière pénale, le parquet a, conformément à l'article 111 du Code des Juridictions Financières, saisi le ministre de la Justice de huit affaires mettant en cause 27 personnes. En matière de gestion de fait, les CRC ont été saisies par le procureur du Roi de deux cas, tandis que les juridictions financières se sont auto-saisies de quatre cas qui concernent la Régie autonome d'eau et d'électricité de Larache, de la Commune urbaine de Casablanca et d'Ouled Taima et de la Commune rurale Tamri. En matière de contrôle, les CRC ont été saisies de 22 affaires dont 6 ont été classées et 16 poursuivies mettant en cause 74 personnes. Par ailleurs, et au terme de 2011, 1.345 jugements ventilés en 1.172 jugements définitifs et 173 jugements provisoires ont été rendus par les CRC. « Ainsi, 65 jugements définitifs ont mis en jeu la responsabilité des comptables publics, et ont prononcé des débits d'un montant total de 5.108.905,66 dirhams dont 3.626.245,90 dirhams concernent les communes urbaines. Ce montant reste très élevé par rapport à l'année 2010 (1.995.872,30 DH) », indique le rapport. Globalement, le nombre des comptes vérifiés par la CDC au cours de 2011 s'élève à 2.674 dossiers dont 1.309 concernent les comptes des perceptions, recettes municipales et trésoreries communales. La CDC a rendu 2.768 arrêts définitifs, soit une augmentation de 404% par rapport à l'année précédente. En tout, et hormis les trois affaires bouclées en 2011, le nombre global des affaires en cours initiées par la CDC est de 75 affaires où sont poursuivies 320 personnes. Il ressort de ce qui précède, que la Cour, au terme de sa mission de contrôle s'est retrouvée face à des nuances près aux mêmes dysfonctionnements qu'avant. C'est dire qu'il s'agit plus d'instaurer une nouvelle culture de management des affaires publiques que de respect des termes de la loi.