Si l'écosystème des startups évolue c'est en partie grâce au soutient que lui portent les incubateurs, fonds d'investissement, associations, grands groupes. Dans cette interview, Kenza Lahlou, Managing Partner de Outlierz Ventures, fonds d'investissement panafricain spécialisé dans les startups, porte un éclairage sur cet écosystème en ébullition. Challenge : Quels sont les secteurs les plus attractifs aujourd'hui pour les investisseurs qui s'intéressent aux startups dans le Royaume ? Il s'agit des secteurs dans lesquels il y a de véritable problèmes à résoudre. La fintech (bien que le marché reste fermé et dominé par les grands groupes), la logistique, la santé, l'agritech, l'industrie 4.0… De manière globale, les modèles B2B qui agrègent un marché fragmenté en utilisant la technologie pour construire un modèle innovant. Challenge : StartupyourLife et maintenant Outlierz Ventures ont-ils été des facteurs déterminants dans l'émergence des startups marocaines. Au démarrage de l'écosystème startup marocain, StartupYourLife a été un des pionniers dans l'émergence de la scène startup locale. Elle a joué un rôle incontestable dans la création de la première communauté d'entrepreneurs innovants qui a favorisé un partage d'expérience et de synergie entre les premiers entrepreneurs du digital, dans l'ouverture à l'international et la connexion à d'autres écosystèmes régionaux et internationaux, ainsi que dans l'établissement de ponts entre les investisseurs et les organismes régionaux et internationaux de renom pour positionner le Maroc sur la carte. La création du fonds Outlierz Ventures en 2017 était le prolongement naturel et une réponse à un besoin pressant d'accès au « smart capital » pour la croissance de startups à fort potentiel, au delà des frontières marocaines. En effet, au delà de l'accès au capital, qui reste encore difficile au Maroc en amorçage, les entrepreneurs ont surtout besoin de conseils avisés, de réseau et d'accès au marché. Le fonds, soutenu par des bailleurs de fonds et investisseurs de renom de la Silicon Valley et de la diaspora Africaine, a pour objectif d'investir dans les pépites africaines qui utilisent la technologie pour transformer les économies traditionnelles et ce, au Maroc et dans les écosystèmes les plus dynamiques, du continent, à savoir l'Egypte, le Nigeria, le Kenya et l'Afrique du Sud. Nous avons annoncé nos 5 premiers investissements, dont un au Maroc pour le moment : WaystoCap. Challenge : Pourquoi les fonds d'investissement spécialisés s'intéressent plus à l'Afrique subsaharienne qu'au Maghreb et plus particulièrement le Maroc? Tout est une question de taille du marché (c'est à dire de quantité et qualité de startups). Aujourd'hui, nous sommes dans un monde globalisé où la technologie et le digital n'ont pas de frontières géographiques. La profondeur de marché actuelle au Maroc en termes de startups matures ne permet pas de mettre en place une stratégie d'investissement diversifiée et rentable qui se concentre uniquement sur les startups technologiques à fort potentiel de croissance. C'est un arbitrage à faire : soit on veut faire du VC pur avec retour sur investissement et dans ce cas, on va chercher les pépites là où elles sont, soit on diversifie en ne faisant pas que de la tech et en allant chercher des opportunités d'investissement un peu plus matures. « Il y a malheureusement aujourd'hui beaucoup plus d'opportunités pour un fonds VC en Afrique subsaharienne qu'au Maroc« Nous avons choisi la première option, car notre objectif est de soutenir les entrepreneurs africains les plus prometteurs qui utilisent la technologie pour disrupter les secteurs traditionnels avec pour objectifs de créer des success stories africaines, et donc de créer de la valeur économique et sociale et de nouveaux modèles de réussite. Nous donnons la priorité à 5 marchés clefs : le Maroc, l'Egypte, le Nigeria, le Kenya et l'Afrique du Sud, et nous développons notre positionnement en Afrique Francophone. Il y a malheureusement aujourd'hui beaucoup plus d'opportunités pour un fonds VC en Afrique subsaharienne qu'au Maroc. Parmi les pays du Maghreb, l'Egypte est celui qui tire le mieux sont épingle du jeu avec un vivier d'entrepreneurs de qualité, de plus en plus de fonds disponibles et de levées de fonds réussies et de plus en plus importantes, ainsi qu'une taille de marché conséquente. Mais, c'est un cas particulier, car l'Egypte est historiquement et culturellement très liée à l'écosystème de la région MENA/CCG, tandis que le Maroc en est assez éloigné.