La France semble avoir perdu son image de premier partenaire historique de l'Afrique au profit de l'Allemagne. Dans un contexte de polémique créée par les déclarations du vice-président du Conseil italien Luigi Di Maio accusant l'Hexagone d'appauvrir l'Afrique, le baromètre du Conseil français des investisseurs en Afrique (CIAN) vient confirmer la donne. Le CIAN se base sur le sondage effectué auprès de jeunes leaders d'opinion de huit pays d'Afrique francophone qui donnent l'Allemagne, en tête du classement, bien avant la France. Réalisée par l'institut français IMMAR Research & Consultancy, spécialiste des études médias et marketing en Afrique subsaharienne et Afrique du Nord, l'enquête a été menée entre juin et septembre 2018 auprès d'un panel de 1.244 « leaders d'opinion » concentrés dans les grandes villes de huit pays africains francophones: Algérie, Tunisie (Maghreb); Sénégal, Côte d'Ivoire, Burkina Faso (Afrique de l'Ouest); Cameroun, République démocratique du Congo (Afrique centrale). La majorité des leaders d'opinion sondés « avouent voir dans la première économie européenne l'un des « partenaires les plus bénéfiques pour le continent ». Ils la placent juste après la Chine et le Japon et sont 70 % à la citer, quand 53 % évoquent la France », rapporte la version électronique du journal français Le Monde. Les résultats ont été présentés en avant-première à la presse le 7 février, à la veille du Forum Afrique 2019 MOCI – CIAN organisé ce 8 février à la Chambre de commerce et d'industrie de Paris Ile-de-France où ils ont été rendus publics. Et ils ne sont pas très bons pour la France. D'après les résultats de l'enquête, la France est reléguée en septième position loin derrière l'Allemagne qui occupe la troisième marche du poduim, au sein d'une liste fermée de dix pays « utiles ». Ainsi, Paris est devancé par Berlin aussi bien au Maghreb (70 % contre 82 %) qu'en Afrique centrale (44 % contre 75 %) et en Afrique de l'ouest (44 % contre 52 %), les trois zones sur lesquelles porte l'enquête. Dans son édito de la Lettre du CIAN, Etienne Giros, le président délégué de l'organisation française, soutient que « L'Afrique bénéficie d'une attention internationale accrue, comme en témoignent l'initiative « Compact With Africa » du G20 portée par Angela Merkel, la « Nouvelle alliance entre l'Europe et l'Afrique » annoncée par Jean-Claude Juncker, le « Plan d'investissement externe » de la Commission européenne ou le déblocage de 7,5 milliards d'euros par l'Alliance Sahel. La France a aussi décidé de porter la part de son PIB dédiée à l'aide au développement à 0,55 % d'ici à 2022 et d'augmenter de 50 % les ressources de l'AFD, soit une rallonge de 4 milliards d'euros. Des financements considérables sont donc promis au continent». Le président délégué du CIAN impute ainsi ce positionnement favorable de l'Allemagne vis-à-vis de l'Afrique à « la politique d'Angela Merkel depuis deux ans avec son initiative "Compact with Africa", et de l'image de qualité de ses produits ». A ce volontarisme s'ajouteraient, selon lui, les retombées d'une approche globale. « Comme la Chine et le Japon, l'Allemagne arrive avec des offres intégrées incluant des prestations de services, des infrastructures et un financement », note-t-il, déplorant le fait que la France « valorise moins [ses] réalisations » et qu'elle ne soit « pas assez [offensive] en matière de communication ». Et pourtant, les marques françaises gardent la cote Et de préciser que « le dernier rapport de la COFACE le montre : les parts de marché françaises en Afrique ont été divisées par deux depuis 2000, et en 2017, pour la première fois, l'Allemagne a ravi à la France la place de premier fournisseur européen du conti- nent. Certes, ce phénomène est largement com- pensé par la puissance des implantations locales et des IDE des entreprises françaises. Mais c'est un symbole fort de l'offensive économique allemande vis-à-vis de l'Afrique. Les entreprises d'outre-Rhin ont d'ailleurs engrangé de nombreux contrats lors du dernier sommet G20/Afrique de Berlin ». Néanmoins, le baromètre du CIAN atteste que les marques tricolores conservent une place de choix dans les esprits. Certes, Toyota est en tête de celles que citent spontanément les jeunes leaders d'opinion, mais, parmi les dix marques les plus appréciées, ils évoquent spontanément quatre françaises (Orange, Total, Renault et Sogea Satom). Dans le classement par secteur, Orange rafle même la mise pour les télécommunications, et Air France pour l'aérien. Au niveau du secteur bancaire, la Société générale est troisième, et la BNP, cinquième. Pour ce qui est de l'automobile, Peugeot prend la cinquième place.