«L'Algérie a pris acte de la position américaine considérant le plan d'autonomie dans le cadre de la souveraineté marocaine comme l'unique solution au différend du Sahara occidental.» : par un communiqué diffusé le 9 avril, le ministère algérien des affaires étrangères exprime un trouble manifeste face à l'ancrage diplomatique grandissant du plan marocain d'autonomie, soutenu par une constellation d'Etats influents, dont les Etats-Unis, la France, l'Allemagne, l'Espagne, etc. En recourant à une rhétorique empreinte d'un légalisme sélectif, Alger condamne ce qu'elle qualifie de dévoiement du droit international alors même que ce dernier consacre la recherche de solutions réalistes, pragmatiques et acceptables par les parties, selon les termes mêmes du Conseil de sécurité (CSNU). Mais cette posture se heurte à une incohérence fondamentale : l'Algérie multiplie les déclarations, reçoit les envoyés de l'ONU, convoque la légalité internationale — tout en continuant à nier catégoriquement être impliquée dans un conflit auquel elle consacre pourtant l'essentiel de son effort diplomatique. Quelques jours avant ce communiqué, Alger a accueilli l'émissaire des Nations unies pour le Sahara, Staffan de Mistura. Le chef de la diplomatie algérienne, Ahmed Attaf, a plaidé pour «des négociations directes entre le Maroc et le Front Polisario» — propos pour le moins surprenants de la part d'un pays qui proclame ne pas être partie au différend. Cette mise en scène diplomatique s'est accompagnée d'une nouvelle charge contre le format des «tables rondes» institué par la résolution 2440 (2018) du CSNU, auquel l'Algérie refuse de se soumettre, tout en revendiquant paradoxalement un droit de regard sur le processus de règlement. En vérité, l'Algérie commente avec véhémence une affaire dont elle refuse obstinément d'assumer la centralité de son rôle. Elle réclame à la fois une place d'observateur et une voix décisive, conjuguant l'ingérence officieuse au déni officiel. Pendant ce temps, le Maroc maintient sa proposition d'autonomie — déposée en 2007 auprès du secrétaire général de l'ONU — que nombre d'acteurs de premier plan considèrent comme sérieuse, crédible et porteuse d'un compromis durable. De Washington à Madrid, en passant par Berlin et Paris, les soutiens explicites au plan marocain redessinent une géographie diplomatique à laquelle Alger oppose une doctrine figée dans le siècle dernier. L'invocation par l'Algérie de la résolution 1514 (XV) de 1960, relative à la décolonisation, paraît aujourd'hui déconnectée des réalités juridiques et politiques du Sahara, territoire que les cartes officielles des institutions internationales représentent désormais dans sa continuité géographique avec le royaume chérifien. À mesure que le consensus international s'oriente vers une solution fondée sur l'autonomie, Alger s'enferme dans une rhétorique confuse où l'on commente avec véhémence ce que l'on prétend ne pas concerner. Une posture qui s'apparente de plus en plus à un exercice d'équilibrisme diplomatique voué à l'épuisement. Dans cette affaire, l'Algérie ne se contente pas de prendre la parole : elle la revendique hautement, tout en récusant toute responsabilité. Une équation impossible, révélatrice d'un profond désarroi doctrinaire.