La justice espagnole a récemment refusé, selon des médias espagnols, l'extradition d'Issam Azmani, réclamé par les autorités marocaines. Accusé d'appartenir à une organisation criminelle spécialisée dans le transport clandestin de migrants depuis le royaume, M. Azmani a été arrêté en juin dans une petite localité de la province d'Alicante (sud-est) après plus d'un an de fuite. Selon les autorités marocaines, cet individu «aurait joué un rôle clé dans un réseau actif depuis 2020 qui aurait profité des perturbations liées à la pandémie de la Covid-19 pour organiser des départs illégaux depuis la lagune de Marchica (nord-est, près de Nador) et la côte de Boukana. En échange de sommes considérables, les migrants étaient acheminés à bord d'embarcations pneumatiques, leur destination finale restant incertaine.» L'Audience nationale espagnole a refusé, fin octobre, de donner une suite favorable à la demande d'extradition formulée par le Maroc. Selon la décision des juges, «les faits reprochés à M. Azmani, bien qu'ils puissent constituer des infractions graves selon la législation marocaine, ne sont pas considérés comme tels par le droit pénal espagnol.» Ce principe, appelé «double incrimination», énonce que les faits doivent être punissables dans les deux juridictions pour qu'une extradition puisse être envisagée. Notice rouge d'Interpol émise Selon les mêmes sources, le Maroc n'a pas ménagé ses efforts afin d'obtenir l'extradition du trentenaire. Une note verbale signée par le procureur général du roi, a été adressée au ministère espagnol des Affaires étrangères dès le mois de juin soulignant la gravité des infractions reprochées à M. Azmani. Malgré le soutien du ministère public espagnol, favorable à l'extradition, la décision de l'Audience nationale s'y est opposé. Elle a même ordonné sa libération immédiate out en exigeant qu'il fournisse une adresse de résidence en Espagne. Ce refus d'extradition, a-t-on ajouté, «met en lumière des divergences profondes entre les systèmes judiciaires des deux pays mais aussi les limites des mécanismes de coopération internationale en matière de lutte contre le trafic de migrants.» En dépit de l'émission d'une notice rouge par Interpol à l'encontre de M. Azmani, l'affaire souligne les obstacles juridiques qui persistent dans la coordination entre deux Etats aux cadres législatifs distincts. Le principe de la double incrimination Au cœur de cette affaire se trouve l'application stricte du principe de double incrimination, un pilier du droit de l'extradition, est polémique. Selon ce principe, les faits reprochés doivent constituer une infraction pénale dans les deux Etats concernés. Or, dans son arrêt, l'Audience nationale a estimé que les actes décrits par les autorités marocaines, bien qu'ils puissent relever de la criminalité selon le droit marocain, ne satisfont pas aux critères définis par le code pénal espagnol. Bien que le Maroc ait activé plusieurs canaux pour obtenir l'extradition, la réponse espagnole est restée ancrée dans le cadre procédural strict. La défense du prévenu, quant à elle, a argué «de l'absence de correspondance légale entre les faits reprochés et le droit espagnol.» Le ministère public, favorable à l'extradition, a vu ses arguments balayés par la rigueur technique des juges de l'Audience nationale. Cette décision pourrait être interprétée «comme un manque de soutien envers un partenaire clé dans la lutte contre les migrations clandestines» et «une remise en question de l'efficacité des mécanismes actuels de coopération» sur l'échelle bilatérale.