Le 18 avril 2024, les Etats-Unis dont opposé leur veto à l'admission de la Palestine en tant qu'Etat membre de l'ONU, malgré le vote positif de la majorité des membres du Conseil de sécurité. C'est cette même ONU qui, le 29 novembre 1947, a approuvé la résolution 181 qui a mis fin au mandat britannique sur la Palestine et partagé le territoire en deux Etats, l'un arabe et l'autre juif, la ville de Jérusalem étant placée sous un régime international. Une partie minoritaire de la commission ad hoc avait soutenu un plan qui n'a pas été retenu. Il proposait «une structure fédérée indépendante comprenant un Etat arabe et un Etat juif, avec Jérusalem comme capitale de la fédération». Les Palestiniens ont refusé le partage de leur terre, réclamant la création d'une Palestine indépendante à l'ouest du Jourdain. En réalité, la formule des deux Etats, juif et arabe, a été proposée en 1937 par la Commission Peel, mais si elle a acceptée par les Juifs, les Palestiniens l'ont rejetée. Dans le contexte de l'époque, la conviction de défendre une cause légitime a poussé une grande partie de la population à refuser toute présence juive en Palestine. Une mauvaise évaluation des rapports de force et des contraintes régionales ont conduit à des slogans jusqu'au-boutistes. Alors qu'Israël a été admis à l'ONU dès 1949, 75 ans plus tard, il n'y a toujours pas d'Etat palestinien souverain et indépendant reconnu par l'ensemble de la communauté internationale. Dans le rapport du Conseil de sécurité, Israël a été présenté comme «un Etat épris de paix ... capable et désireux de s'acquitter des obligations contenues dans la Charte». Israël, en effet, a souscrit une déclaration selon laquelle il «accepte sans réserve les obligations de la charte des Nations unies» et s'est engagé à respecter les résolutions 181 du 29 novembre 1947 et 194 du 11 décembre 1948. Cette dernière concernait le retour des réfugiés ou leur indemnisation, la démilitarisation et l'internationalisation de Jérusalem ainsi que la protection et le libre accès aux lieux saints de Palestine. L'ONU a approuvé, notamment au niveau de l'assemble générale, un grand nombre de résolutions réaffirmant les droits inaliénables du peuple palestinien à l'indépendance, appelant à un retrait des territoires occupés et à un règlement juste du problème des réfugiés. En 1974, la résolution 194 a préconisé la solution à «deux Etats, Israël et la Palestine...côte à côte à l'intérieur de frontières sûres et reconnues.» En 1982, la douzième Conférence au sommet de la Ligue des Etats arabes à Fès a adopté une déclaration appelant réaffirmant le droit du peuple palestinien à l'autodétermination et à l'établissement d'un Etat palestinien indépendant après une période de transition sous le contrôle des Nations unies. En septembre 1983, la Conférence internationale sur la question de Palestine a affirmé le droit à l'existence de tous les Etats de la région, à l'intérieur de frontières sûres et internationalement reconnues et la réalisation des droits légitimes inaliénables du peuple palestinien. En 1988, le Conseil national palestinien a proclamé la création de l'Etat de Palestine. Cette déclaration a été interprétée comme une reconnaissance indirecte de l'Etat d'Israël et une acceptation de la solution des deux Etats. La même année, l'assemblée générale des Nations unies, dans sa résolution 43/177, a pris acte de la déclaration d'indépendance et reconnu au peuple palestinien son droit à exercer la souveraineté sur son territoire. Après la conférence de Madrid (1991), les accords d'Oslo (1993) entre l'OLP et Israël ont divisé la Palestine en trois territoires administratifs. Ils ont conduit notamment à l'élection d'un président de l'Autorité palestinienne et à la mise en place d'une administration dans les zones palestiniennes. En 2002, la Ligue des Etats arabes a adopté l'Initiative de paix arabe, approuvée par la majorité des membres, y compris l'Autorité palestinienne. Cette proposition globale prévoyait notamment la création d'un Etat palestinien indépendant et souverain sur les territoires palestiniens occupés depuis le 4 juin 1967. Elle a été rejetée par le gouvernement israélien. Par sa résolution 1515 (19 novembre 2003), le Conseil de sécurité s'est déclaré: «attaché à la vision d'une région dans laquelle deux Etats, Israël et la Palestine, vivent côte à côte, à l'intérieur de frontières sûres et reconnues.» Un Etat ou deux Etats ? Les Palestiniens mènent de front plusieurs combats, en particulier celui de la récupération des territoires dont ils ont été spoliés par Israël et celui du droit au retour. Après avoir refusé le partage de leur terre et réclamé le départ des Juifs, les Palestiniens ont renoncé à cette exigence pour, dans un premier temps, demander la création d'un Etat «binational» dans lequel Palestiniens et Juifs vivraient ensemble et jouiraient des mêmes droits. Ce projet a toujours été combattu par Israël qui défend le projet sioniste d'un Etat juif. Cependant, depuis la proclamation de l'Etat de Palestine en 1988 et, en outre, depuis les accords d'Oslo de 1993, la solution des deux Etats est revenue en force. Devant la dégradation de leur situation et l'absence totale de perspectives d'une restauration de la Palestine historique, les Palestiniens ont fini par se rallier, avec réticences pour certains, à cette formule, qui représente en réalité un retour à la partition tant combattue. Certains continuent de rejeter ce compromis, pourtant dicté par le pragmatisme. Pour nombre de Palestiniens, et pas seulement parmi les partisans de Hamas, l'acceptation de la partition de leur pays équivaut à une capitulation et un retour à la case départ après 77 ans de lutte. La solution des deux Etats est-elle «la seule à même de répondre aux besoins de sécurité d'Israël et aux aspirations légitimes des Palestiniens à un Etat» ? Le serait-elle que sa mise en œuvre semble aujourd'hui sérieusement compromise par la politique de colonisation systématique des terres palestiniennes. Celles-ci se sont réduites comme une peau de chagrin au fil des conquêtes et des annexions israéliennes qui en ont brisé l'homogénéité, rendant impossible la création d'un Etat palestinien. À bien y réfléchir, les gouvernements israéliens, notamment de droite, en voulant étendre à tout prix le territoire de l'Etat hébreu, se sont piégés eux-mêmes en éliminant la solution des deux Etats côte à côte. Cette formule est devenue infaisable quoi qu'on en dise et inenvisageable dans l'état actuel des choses faute de territoires arabes contigus et suffisants, à moins d'un transfert des colons israéliens, mesure qui semble devoir être écartée. Sauf à envisager un scénario catastrophe, la formule d'un Etat binational, de prime abord irréaliste et irréalisable, pourrait à terme devenir une hypothèse de travail acceptable, au fur et à mesure qu'Israël sera isolé et que les alliés traditionnels de l'Etat hébreu prendront leurs distances de sa politique sans issue. Les dirigeants israéliens n'auront d'autre choix que d'accepter une cohabitation avec le peuple palestinien. Le Moyen-Orient a déjà connu des bouleversements, des redécoupages et des transferts de territoires. Les alliances qui se dessinent dans la région pourraient augurer d'une redistribution des cartes. La résilience du peuple palestinien, qui s'accroche malgré toutes les difficultés à son rêve éternel, a fini par payer. les massacres et les destructions auxquels Israël s'est livré dans la bande de Gaza ont soulevé une vague mondiale d'indignation et le drame palestinien est revenu en première ligne. Les prises de position officielles de plusieurs gouvernements occidentaux ainsi que les débats et les manifestations dont ont été le théâtre plusieurs universités américaines et françaises, inimaginables il y a peu, reflètent une prise de conscience et une évolution dans la perception du problème palestinien. Les protestations contre la participation d'un chanteur israélien à l'Eurovision sont aussi un signal qu'un mouvement profond de contestation est né qu'il sera difficile d'ignorer. Un débat a été lancé sur l'injustice qui a été faite au peuple palestinien, ce qui en soi est une victoire quand on se rappelle que ce peuple a été longtemps invisibilisé, certains refusant de reconnaitre jusqu'à son existence.