Le chef de la diplomatie tunisienne Othman Jerandi, qui a récemment exprimé son «refus de toute ingérence sous quelque forme que ce soit» dans les affaires de son pays, multiplie les couacs et les impairs. La proximité de la Tunisie avec l'Algérie de Tebboune alimente une controverse depuis plusieurs mois. Après la décision tunisienne de ne pas voter le prolongement du mandat de la Minurso en octobre 2021, signe d'un grand imbroglio au plus haut sommet de l'Etat, le chef de la diplomatie tunisienne Othman Jerandi multiplie depuis quelques temps les démarches controversées. Un compte satirique sur Twitter au nom de Brahim Ghali a trompé le diplomate pourtant chevronné. Ce dernier l'a «remercié», après avoir encensé «son bon travail». M. Jerandi, se rendant compte de sa méprise, a fini par supprimer son tweet. Et ce n'est pas tout. Hani Abdelwahab, défenseur des droits humains, a mis en relief une secrète visite du chef de la diplomatie tunisienne, sans aucune compagnie, à Alger à bord d'un avion officiel algérien. «Un acte qui écorne la souveraineté nationale tunisienne et nuit à la neutralité positive du pays dans un contexte régional tendu», a-t-il affirmé, dénonçant «des manquements éthiques» remettant en cause «la diplomatie extérieure tunisienne». Cela survient au moment où la Tunisie, qui a annoncé en décembre 2021 avoir obtenu un prêt de 300 millions de dollars de l'Algérie, à la veille d'une visite du président algérien Abdelmadjid Tebboune à Tunis, n'auraient pas obtenu les fonds algériens promis, selon plusieurs sources dignes de foi, encore que le président Kais Saied ait ratifié par décret un protocole financier, conclu le 9 décembre, relatif à l'octroi par l'Algérie à la Tunisie d'un prêt d'un montant de 300 millions de dollars, soit 266,2 millions d'euros. Signe de la préoccupation d'Alger des évolutions à la scène régionale, le ministre algérien des affaires étrangères, Ramtane Lamamra, a effectué trois visites à Tunis en l'espace d'un mois, c'était en août 2021. Ramtane Lamamra, le patron de la diplomatie algérienne qui a réitéré, lors de sa visite à Tunis, le 24 août 2021, son «rejet» de «toute ingérence étrangère» chez son voisin oriental, est le premier qui pousse le système tunisien à brader sa souveraineté et l'indépendance de ses orientations politiques. La Tunisie, également, est confrontée à une grave crise économique, avec une instabilité chronique freinant l'enthousiasme des investisseurs et des bailleurs de fonds. Sa politique intérieure et extérieure est également critiquée. Le pays a connu une grave crise politique cet été quand le président Saied s'est arrogé les pleins pouvoirs avec le limogeage du gouvernement et la suspension du Parlement dominé par le parti d'inspiration islamiste Ennahdha, avant de le dissoudre récemment. L'abstention controversée de la Tunisie lors du vote, le 29 octobre 2021, de la résolution 2602 du Conseil de sécurité de l'ONU prolongeant le mandat de la Mission des Nations unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (Minurso) n'a pas fini d'interpeller les observateurs. Membre non-permanent du Conseil, la Tunisie a en effet été l'un des deux pays (avec la Russie), sur quinze votants, à prendre ses distances à l'égard de ce texte.