Le trajet de l'énergie algérienne vers les marchés européens se complique. Doutes, échanges de propos aigres entre les dirigeants, assurances insuffisantes : jamais les relations n'ont été aussi tendues entre l'Algérie et l'Europe. Le régime algérien, qui a conduit son pays à l'âge de la pierre politique et économique ainsi qu'à l'isolement international, commence à faire chanter l'Union européenne et à faire pression sur l'Espagne. Après la fermeture du gazoduc Maghreb-Europe, la junte militaire en Algérie veulent désormais s'immiscer dans les décisions souveraines de l'Espagne et de l'UE. Selon des sources espagnoles, le pouvoir algérien cherche à décider et à déterminer avec qui les Européens doivent collaborer. «Alger interdit à l'Espagne de revendre son gaz à Rabat et impose des conditions pour étendre le seul gazoduc qu'elle entretient actuellement» avec Almeria, en référence à Medgaz. Si ces informations publiées par El Mundo s'avèrent vraies, ce serait un scandale et un autre signe de la faiblesse de la politique étrangère du gouvernement Sánchez. «Le gouvernement espagnol s'engage dans un nouveau front en accentuant sa dépendance vis-à-vis du pouvoir algérien», précise la même source. Elle ajoute que «la crise entre l'Algérie et le Maroc s'aggrave et la forte dépendance de l'Espagne au gaz dans cette phase de la transition énergétique a ouvert un nouveau front au gouvernement de coalition déjà très affaibli de Pedro Sánchez.» L'Algérie envisage d'augmenter la capacité gazière du gazoduc Medgaz, inauguré il y a 10 ans, qui alimente déjà l'Espagne avec 8 000 millions de mètres cubes et relie directement l'Algérie à Almeria. Les autorités algériennes ont engagé des travaux pour porter sa capacité à 10 milliards de mètres cubes. Mais, à supposer que les travaux se terminent avant l'arrivée de l'hiver, il y aurait encore 4 000 millions de mètres cubes de gaz pour atteindre l'Espagne. 48 méthaniers sont nécessaires pour transporter cette quantité sous forme de gaz naturel liquéfié (GNL). Le prix de ces frets est soumis aux fluctuations d'un marché devenu très compétitif depuis l'année dernière en raison de la forte demande en provenance d'Asie. L'Algérie couvrait 51 % des besoins en gaz de l'Espagne en 2018 ; le chiffre est tombé à 33% en 2019 et 29 % en 2020. Mais jusqu'à présent en 2021, les importations de gaz en provenance d'Algérie sont passées à 47 %, selon la société espagnole Enagás. Ces 47 % représentaient un total de 15 000 millions de mètres cubes de gaz. Parmi ceux-ci, 6 000 millions sont passés par le gazoduc qui traverse le Maroc ; 8.000 millions ont été transportés par le gazoduc Medgaz, qui va directement à Almería. Et les 1 000 millions de mètres cubes restants ont été transportés dans des navires, sous forme de gaz naturel liquéfié. La troisième vice-présidente et ministre de la Transition écologique, Teresa Ribera, s'est rendue récemment à Alger pour rencontrer différentes autorités algériennes. Mais l'Algérie n'a pas changé de position. Le gouvernement algérien a garanti l'approvisionnement espagnol de la même quantité de gaz qui a atteint l'Espagne via le GME. Mais ce n'est que lorsque l'hiver sera passé qu'il sera possible de savoir si l'Algérie est en mesure de réaliser avec solvabilité ce qu'elle a promis de faire. Une source espagnole qui a suivi de près les négociations tripartites sur le gazoduc avait déclaré : «Nous ferions une erreur si nous pensons que la fermeture du gazoduc est quelque chose que l'Algérie ne commet qu'à l'encontre du Maroc, qui ne concerne que ces deux pays. Car c'est aussi un message pour l'Espagne. Cette mesure nous rend plus vulnérables par rapport à l'Algérie».