L'ONG dénonce de lourdes peines, une restriction des libertés et un contexte de répression croissant après plusieurs condamnations à de la prison ferme. Amnesty International a appelé, jeudi 24 juin, les autorités algériennes à cesser «immédiatement» leur «répression politique judiciaire systématique» envers les militants du Hirak populaire, en réaction à de récentes peines de prison ferme prononcées à leur encontre. L'ONG a appelé à «au respect du droit, des libertés et des engagements internationaux du pays» selon un communiqué publié. Selon l'ONG, «les autorités algériennes se sont livrées à une répression qui s'est traduite par l'arrestation de dizaines de personnes ayant pacifiquement exercé leurs droits à la liberté d'expression et de réunion dans les mois qui ont précédé les élections législatives qui ont eu lieu le 12 juin». L'organisation affirme «avoir rassemblé des informations sur 37 cas de militants qui ont été arrêtés de façon inique pour avoir participé à des manifestations ou exprimé des opinions dissidentes entre le 26 mars et le 26 mai. À la date du 23 juin, au moins 273 militants étaient détenus de façon inique, selon des organisations locales et des militants des droits humains.» «Les autorités algériennes ont utilisé tous les moyens à leur disposition pour écraser la dissidence et réduire au silence les protestataires du mouvement du Hirak, arrêtant et poursuivant en justice des dizaines de militants sur la base d'accusations forgées de toutes pièces, uniquement parce que ces personnes ont participé à des manifestations ou exprimé des opinions politiques dissidentes», a déclaré Amna Guellali, directrice régionale adjointe pour l'Afrique du Nord et le Moyen-Orient à Amnesty International dans un communiqué. «Les autorités algériennes doivent de toute urgence mettre fin à cette répression et veiller à ce que soient respectés les droits des manifestants pacifiques, des journalistes et des militants des droits humains à la liberté d'expression, à la liberté d'association et à la liberté de réunion. Toutes les personnes arrêtées et poursuivies en justice de façon inique parce qu'elles ont exercé leurs droits doivent être relâchées, et les charges retenues contre elles doivent être abandonnées» a rapporté l'ONG londonienne. «Depuis avril 2021, les autorités algériennes recourent de façon croissante à des accusations de terrorisme ou de complot contre l'Etat pour poursuivre en justice des défenseurs des droits humains et des militants du Hirak. Elles ont qualifié d'organisations terroristes deux organisations qui expriment des opinions dissidentes : le mouvement d'opposition Rachad et le Mouvement pour l'autodétermination de la Kabylie (MAK)» dénoncé l'ONG. Selon les recherches menées par Amnesty International, «les autorités judiciaires ont depuis le mois de mars inculpé au moins 17 militants d'infractions liées au terrorisme. Parmi eux figure l'avocat Abderraouf Arslane, ainsi que les défenseurs des droits humains Kaddour Chouicha, Jamila Loukil et Saïd Boudour, qui avec 12 militants du Hirak ont été inculpés, le 28 avril, d'appartenance à un groupe terroriste et de complot contre l'Etat». Le 8 juin, «les autorités ont adopté des modifications du Code pénal élargissant la définition du terrorisme pour y inclure le fait d'œuvrer ou d'inciter à accéder au pouvoir ou à changer le système de gouvernance par les moyens non constitutionnels. Cette définition trop large risque d'entraîner la criminalisation des appels pacifiques à un changement de gouvernement et la mise hors la loi du mouvement de protestation du Hirak, qui demande un changement politique radical en Algérie» s'alarme Amnesty. «Les mesures prises par les autorités algériennes pour qualifier de terroristes des militants pacifiques, et leur empressement à inclure une nouvelle définition très large du terrorisme dans leur législation, indiquent qu'elles sont déterminées à intimider les opposants pacifiques pour les réduire au silence, et à décimer l'opposition politique», a déclaré Amna Guellali. «Le ministère algérien de l'Intérieur a également pris des mesures pour dissoudre des organisations de la société civile et des partis politiques. En avril et en mai, il a cherché à suspendre ou dissoudre deux partis politiques, l'Union pour le changement et le progrès (UCP) et le Parti socialiste des travailleurs (PST), et à dissoudre l'organisation de la société civile Rassemblement actions jeunesse (RAJ)» précise Amnesty. «Le 30 mai, le Conseil supérieur de la magistrature, un organe administratif qui manque d'indépendance puisqu'il est présidé par le président algérien, a radié du corps des magistrats le juge Sadedin Merzoug pour avoir exprimé des opinions en faveur de la démocratie et du mouvement du Hirak en Algérie. Au regard du droit international, il est illégal de sanctionner des juges parce qu'ils ont exprimé leurs opinions publiquement» conteste l'ONG.