Le Maroc a annulé ses contacts avec le gouvernement fédéral le 1er mars. Les ministères et autres agences gouvernementales ont été invités par lettre à suspendre immédiatement la coopération avec l'ambassade d'Allemagne au Maroc, rapportent les médias marocains. Alors que la France, l'Espagne et les Etats-Unis sont, à des degrés divers, favorables au principe d'autonomie avancé par le Maroc, Berlin multiplie les gestes d'inimitié à l'égard de Rabat. Le Maroc pèse de tout son poids sur l'UE pour qu'elle affiche ses couleurs sur la question du Sahara, décrit le média néerlandais de Volkskrant, le troisième quotidien le plus diffusé des Pays-Bas. «L'UE dépend du Maroc pour le commerce, la lutte contre les migrations, la lutte contre le terrorisme et le maintien de la stabilité dans la région», note l'expert Paolo De Mas interrogé par de Volkskrant. Le Sahara est revenu à l'ordre du jour diplomatique à la fin de l'année 2020 lorsque le président américain Trump a décidé de reconnaître la souveraineté du Maroc sur ce territoire. Le président actuel Joe Biden, s'accordent à dire les experts, ne pense guère à reconsidérer cette décision à l'heure actuelle. Le ministère des Affaires étrangères allemand dit avoir «pris note des du mémo de Bourita», mais qualifie les relations avec le Maroc de «traditionnellement proches, amicales et sans tensions». Mardi, le Maroc aurait déclaré qu'il s'agissait d'une lettre interne qui n'aurait pas dû être publiée, selon l'agence de presse AP. Le dossier du Sahara est indissociable du soutien reçu par le Maroc de la part de la France et des Etats-Unis, tous deux membres du Conseil de Sécurité de l'ONU, chargé de la résolution du conflit. Si Washington a reconnu officiellement la souveraineté du Maroc sur le territoire, lui permettant de conforter sa position, l'UE, elle, tarde à reconsidérer ses vues pour basculer en faveur de Rabat, alors que des questions géostratégiques et de lutte antiterroriste appellent une position plus transparente de Bruxelles. Divergences ? Le chef de la diplomatie marocaine Nasser Bourita a évoqué un «profond désaccord» relatif à la position de l'Allemagne sur le Sahara. Après la reconnaissance américaine l'année dernière, l'Allemagne aurait soulevé la question au sein du Conseil de sécurité de l'ONU en comité fermé. De plus, le Maroc est agacé que, en tant qu'acteur géopolitique important au Maghreb, il n'ait pas été invité par l'Allemagne début 2020 à discuter de la situation chaotique en Libye. Bien que l'Allemagne n'ait pris aucune autre mesure concrète pour contester la souveraineté du Maroc sur le Sahara, le Maroc «saisit maintenant le moment pour souligner son importance géostratégique pour l'UE», selon Eric de Brabandere, professeur de droit cité par la même source. Conséquences régionales Après que le président algérien Abdelaziz Bouteflika a dû quitter le pouvoir en 2019 après 20 ans à la tête du pays, «on ne sait plus les motivations du polisario», note la même source qui met en avant la réticence de l'UE à se positionner sur le dossier du Sahara. «La crainte est bien fondée que, en raison de la direction actuelle de l'armée algérienne, jugée peu claire, le polisario devienne le jouet de toutes sortes de groupes armés qui rendent la région du grand Sahara dangereuse; des bandits aux trafiquants d'armes, en passant par les trafiquants de drogue et les djihadistes», a déclaré De Mas.