Comme dans la plupart des pays à travers le monde, la pandémie a et aura des conséquences marquées sur les finances publiques. Au Maroc, le déficit budgétaire enregistré en 2020 reste "maitrisé" par rapport à la plupart des pays de son voisinage, ce qui témoigne de la prudence fiscale déployée pour faire face à la crise, affirme le directeur du département Maghreb et Malte à la Banque mondiale (BM), Jesko S. Hentschel. Grâce à la solidité des politiques macroéconomiques au Maroc ainsi qu'à son étroite relation avec les institutions multilatérales, M. Hentschel a indiqué que le Royaume a pu accéder à un financement externe privé et public conséquent au cours de l'année écoulée, ce qui a certainement contribué à atténuer l'impact de la crise. "Malgré l'augmentation de son poids pendant la pandémie, la dette publique marocaine reste soutenable", a-t-il ajouté, soulignant que la structure de la dette du Royaume a certaines caractéristiques qui limitent sa vulnérabilité, comme par exemple le faible poids de la dette à court terme, et la proportion relativement basse de la dette extérieure et en devises. Cependant, pour maintenir ce niveau de viabilité, il sera nécessaire pour le Royaume de poursuivre son objectif de réduire graduellement son déficit budgétaire dans les années à venir. Cela devrait impliquer aussi un effort soutenu pour renforcer l'efficience des dépenses, élargir l'assiette fiscale et rendre la collecte des impôts plus efficace et équitable, a estimé M. Hentschel. Il a également noté que le Maroc est appelé à axer sa stratégie sur les opportunités qui émergeront après la crise. "Repenser la stratégie du Maroc passe par une politique axée sur les opportunités qui émergeront après la crise Covid, en misant sur une relance verte, numérique et innovante, incluant une décarbonation plus rapide de l'économie", a dit M. Jesko S.Hentschel. Cette politique, a expliqué le représentant de la BM au Maroc, devrait également être tournée vers les nombreux pays d'Europe qui souhaiteront probablement dans l'avenir établir des liaisons commerciales "plus étroites" avec les pays du voisinage sud, dont le Maroc et les pays d'Afrique du Nord. Selon le responsable, le Plan de relance, qui va mobiliser près de 11% du PIB sous forme de mesures de stimulus fiscal, de garanties de financements et d'injections de capital dans les entreprises, est comparativement bien "plus ambitieux" que la réponse observée dans les économies émergentes et en développement, qui ne dépasse pas une moyenne de 6% du PIB. Dans la mise en œuvre de ce Plan de relance, M. Hentschel a considéré qu'il est important de prendre en compte plusieurs critères pour une politique de "sauvetage économique" réussie, et ce afin de pouvoir établir des choix et des arbitrages économiques. A ce titre, en ce qui concerne le sauvetage des entreprises, il serait important de distinguer les entreprises qui, en raison de la crise, ont été confrontées à des problèmes de liquidité mais qui restent solvables, de celles dont la survie dépendra de changements fondamentaux pour en améliorer la compétitivité après la crise. Concernant le volet relatif aux réformes, le Maroc prend un train d'avance par rapport à beaucoup d'autres pays qui se trouvent encore en phase d'atténuation des impacts à court terme de la Covid-19. Les autorités, a-t-il dit, ont appréhendé cette crise comme une opportunité pour initier des réformes importantes pour remettre l'économie sur les rails, rationaliser le fonctionnement de l ́État et renforcer la résilience des plus vulnérables. La création du Fonds Mohammed VI en particulier, a indiqué le Directeur, pourrait devenir "un pilier fondamental" pour permettre aux entreprises prometteuses de se capitaliser, de croître et de créer des emplois. La contribution de ce Fonds à la relance sera tributaire de plusieurs facteurs liés notamment à sa gouvernance. Sur le plan agricole, M. Hentschel a relevé que le gouvernement ambitionne de pérenniser les impacts positifs du Plan Maroc Vert à travers la Stratégie Génération Green (SGG), notant que le lancement de la SGG arrive à un moment crucial compte tenu de la double crise de la pandémie de la Covid-19 et de la sécheresse qu'a connue le pays.