La thèse, plusieurs fois assénée, est encore une fois démontrée. Les camps des séparatistes menacent de devenir un nouveau sanctuaire du terrorisme mondial, et un nouveau siège potentiel de l'extrémisme armé. Les camps des séparatistes en Algérie sont considérés comme des foyers potentiels du terrorisme radical ainsi qu'une des zones de repli pour certains groupes terroristes, notamment algériens. Une vidéo, diffusée sur les réseaux sociaux, a relancé la question de la sécurité dans le sud de l'Algérie et, en particulier, dans les camps de réfugiés sahraouis de Tindouf. «La vidéo exhorte les gens à se faire exploser et à cibler des objectifs au Maroc. Une incitation à la violence dans le plus pur style djihadiste qui n'est pas passée inaperçue, mettant la sécurité d'une région non loin de la Méditerranée en jeu» a écrit le journaliste Mauro Indelicato. «Les images de la vidéo exhortant les sympathisants à se faire exploser et qui ont fait sensation ont été tournées à Tindouf. Elles montrent un homme avec des lunettes et un turban vert sur la tête, acclamé par la foule, en l'occurrence Khatri Alouh, l'un des dirigeants politiques les plus en vue du polisario. Ses phrases prononcées au micro ne sont certainement pas celles d'un rassemblement politique normal. L'orateur [séparatiste] a bien l'intention de convaincre les nombreuses personnes qui le suivent à commettre des actes de violence: "Les militaires doivent prendre les armes, et les civils doivent larguer des bombes", crie Khatri Alouh à la foule. L'objectif de la lutte armée invoqué par le représentant du polisario est très précis: viser le Maroc.» détaille la même source. Outre les propos belliqueux de Khatri Alouh, le plus frappant est la similitude troublante avec la rhétorique et les manières typiques de la guérilla djihadiste: «les civils doivent se faire exploser au milieu de l'ennemi pour faire le plus de victimes», a-t-il crié dans le micro. Des phrases identiques de celles prononcées par les éléments du groupe État islamique et des groupes terroristes actifs dans la région. Ce n'est certainement pas la première fois que des images de ce genre arrivent des camps soumis à un régime implacable. Le 12 novembre, «les médias marocains ont rapporté une autre vidéo, cette fois mettant en scène un enfant armé et en tenue de camouflage, positionné devant un drapeau du front polisario et faisant l'éloge de la guerre et de la lutte. Un modus-operandi, selon les experts marocains de la lutte contre le terrorisme, semblable à celle d'Abu al-Hassan al-Shami, le plus jeune kamikaze (14 ans) affilié à l'E.I qui s'est fait exploser, en 2015, dans la province irakienne de Salaheddine», indique la même source. «Des appels à la violence qui confirment une situation très grave à Tindouf. Le terrorisme parvient de plus en plus à s'y enraciner. Après tout, la variante la plus dangereuse du terrorisme africain s'est développée au fil des années entre l'Algérie et le Sahel. Le prosélytisme dans les tentes des camps de réfugiés est alors encore plus simple. L'avancée des djihadistes est également démontrée par le fait qu'Adnan Abu Walid al-Sahraoui est originaire de Tindouf. Ce dernier est tenu pour responsable de la mort de quatre soldats américains attaqués dans la ville nigériane de Tongo Tongo, ce qui a mené le département d'État américain à offrir 5 millions de dollars pour sa capture. De plus, il est considéré comme le leader de l'Etat islamique au Grand Sahara, une formation liée à Isis, dont l'activisme est en forte hausse au Sahel. Sahraoui est un membre actif de la faction paramilitaire du polisario depuis des années. Encore un signe d'une proximité toujours plus grande entre cette organisation et le terrorisme de matrice islamiste » détaille Mauro Indelicato. En 2019, un groupe de membres du Congrès américain a décrit le Polisario comme une organisation terroriste à la lumière de sa connivence avec plusieurs groupes armés. L'interconnexion entre le Polisario et les réseaux terroristes au Sahel n'était pas un secret. Le groupe séparatiste avait des liens avec le MUJAO (Mouvement pour l'Unité et le Jihad en Afrique de l'Ouest) et Ansar Dine (une création des services de renseignement algériens/DRS) basés dans la ville de Gao, au nord du Mali. Tirant parti des frontières poreuses et de l'échec de l'Algérie à éliminer le terrorisme dans son sud, de nombreux groupes terroristes ont incité les jeunes du Polisario à rejoindre leurs rangs, notamment après le chaos laissé par la chute du colonel Kadhafi en Libye. En Libye en particulier, où les soldats du Polisario ont combattu aux côtés de Kadhafi après la révolution de 2011, les séparatistes sahraouis pourraient détourner de grandes quantités d'armes et les revendre, via la Mauritanie, à des groupes terroristes qui pullulent dans la région du Sahel-Sahara, avait indiqué un rapport financé par l'UE par Projet Safte. «La disponibilité et la circulation des armes sur le marché noir de la région ont considérablement proliféré après la chute du régime de Kadhafi et les conflits qui ont suivi dans ce pays», a noté le Projet Safte. L'Association des îles Canaries pour les victimes du terrorisme (Acavite) poursuit le Polisario pour crimes contre l'humanité. Elle estime que 300 personnes, pour la plupart des pêcheurs, ont été tuées par la milice séparatiste et 50 autres ont été blessées, torturées ou kidnappées entre 1970 et 1980. En 2015, le ministère espagnol de l'Intérieur a reconnu les victimes des îles Canaries du terrorisme du Polisario, lors d'une cérémonie organisée à la Délégation gouvernementale des îles Canaries. Quarante-neuf victimes ont été décorées, dans un acte de «mémoire, de dignité, de justice et de vérité».