Le chef de l'Etat français a annoncé que la France allait cesser d'accueillir des «imams détachés» envoyés par d'autres pays. Lutter contre le «séparatisme islamiste» mais sans pour autant stigmatiser les musulmans de France, voilà deux ambitions qu'Emmanuel Macron a portées lors de sa visite à Mulhouse mardi 18 février. «Le séparatisme islamiste est incompatible avec la liberté et l'égalité, incompatible avec l'indivisibilité de la République et la nécessaire unité de la nation », a affirmé le chef de L'Etat dans un discours devant des responsables locaux et des habitants du quartier sensible de Bourtzwiller. Avant de préciser qu'il ne comptait pas «faire un plan contre l'islam» car cela «serait une faute profonde». «Il ne s'agit pas de stigmatiser quelque religion», a-t-il ajouté après avoir échangé avec des forces de l'ordre, des élus et des responsables d'associations du quartier. Pour satisfaire aux besoins en imams des mosquées, la France accueille des «imams détachés» provenant d'autres pays et financés par eux, dans le cadre d'accords bilatéraux. On en compte ainsi environ 300 permanents, dont 150 proviennent de la Turquie, 120 de l'Algérie et une trentaine du Maroc, les principaux pays d'origine des 4 à 5 millions de musulmans en France. Ces religieux forment une petite partie du nombre d'imams en France — souvent bénévoles, voire itinérants — officiant dans les 2 500 lieux de culte musulmans. Ce nombre n'est pas précisément connu mais est estimé à environ 1 800 imams. Il a souligné qu'un accord avait été trouvé avec l'Algérie, la Croatie, l'Espagne, l'Italie, le Maroc, le Portugal, la Serbie, la Tunisie, mais pas avec la Turquie. Cela concernerait « 80 000 élèves » par an. « Je pense que la Turquie a aujourd'hui le choix de suivre ce chemin avec nous », a-t-il ajouté. « Mais je ne laisserai aucun pays étranger nourrir, sur le sol de la République, un séparatisme, qu'il soit religieux, politique ou identitaire. » « La République doit tenir ses promesses », avait déclaré plus tôt dans la journée le président aux habitants qui l'ont accueilli à la mi-journée à Bourtzwiller, un quartier sensible de la grande ville du Haut-Rhin. « On doit lutter contre le séparatisme parce que quand la République ne tient pas ses promesses d'autres essaient de la remplacer ». Peuplé de plus de 15 000 habitants, Bourtzwiller a été choisi pour cette visite parce qu'il a «de vraies difficultés», a expliqué Emmanuel Macron, citant la présence d'«associations qui prônaient de sortir de la République», « la déscolarisation, des influences extérieures »… Il est l'un des 47 quartiers de reconquête républicaine (QRR) de France, un dispositif créé en 2018 pour lutter contre la délinquance et les trafics — le nombre de policiers a été renforcé, passant de 7 à 22. Bourtzwiller est aussi l'un des 17 territoires de lutte contre la radicalisation, définis depuis quelques mois, où sont mises en place des cellules contre l'islamisme et le repli communautaire (CLIR) dont le chef de l'Etat souhaite renforcer l'action. Depuis le début du quinquennat, les oppositions de droite pressent Emmanuel Macron d'affirmer sa politique sur ce sujet, le taxant de laxisme. Le débat s'est encore durci ces derniers mois, alimenté par de vives polémiques sur la présence de listes communautaristes aux municipales ou sur le port du voile par une mère accompagnant une sortie scolaire.