Le parti Ennahdha a annoncé samedi qu'il se retirait du gouvernement, alors que des ministères, comme la santé et le transport, devaient revenir à ses membres. Propulsé sur le devant de la scène politique tunisienne en janvier, le premier ministre Elyes Fakhfakh se retrouve face à de nouvelles difficultés. Il a présenté, samedi 15 février au soir, la composition de son futur gouvernement. Mais le retrait de l'un de ses principaux partenaires, le parti d'inspiration islamiste Ennahdha, rend son sort incertain. Parmi la liste de ministres annoncée, plusieurs sont issus d'Ennahdha. «La décision d'Ennahdha met le pays dans une situation difficile qui nous oblige à étudier les possibilités juridiques et constitutionnelles», a déclaré le premier ministre désigné. «Nous avons décidé avec le président de la République de profiter de ce qui reste de durée constitutionnelle» pour chercher une issue, a-t-il ajouté, laissant entendre que la liste pourrait notamment être modifiée. M. Fakhfakh, ancien ministre des finances, a été nommé le 20 janvier par le président Kais Saied, après l'échec d'un premier cabinet formé sous la houlette d'Ennahdha après les législatives du 6 octobre, et largement rejeté par le Parlement. Il avait un délai d'un mois pour former un cabinet susceptible de convaincre la majorité des députés. La liste, présentée samedi, compte une moitié de personnalités présentées comme indépendantes, notamment chargée des ministères régaliens. Parmi les ministères qui devaient revenir à des membres d'Ennahdha figurent la santé, le transport ou encore l'enseignement supérieur. Ennahdha réclame la formation d'un gouvernement d'unité nationale incluant le deuxième parti au Parlement, Qalb Tounès, formation libérale dirigée par le magnat des médias Nabil Karoui, poursuivi pour fraude fiscale, mais celui-ci avait été écarté des négociations. « Ennahdha a décidé de ne pas participer ni de voter la confiance à un gouvernement qui aurait été trop faible » (sans la participation de Qalb Tounès), a déclaré Abdelkarim Harouni, président du conseil de la choura d'Ennahdha, organe consultatif du parti. «M. Fakfakh peut encore négocier, mais il ne lui reste plus beaucoup de jours», a souligné M. Harouni, évoquant la possibilité, si M. Fakhfakh renonce à présenter un cabinet, que le président Saied désigne un nouveau chef de gouvernement. A défaut de gouvernement d'ici le 15 mars, M. Saied aura la possibilité de dissoudre le Parlement et de déclencher des élections anticipées, organisées dans un délai de trois mois. Tant qu'un nouveau cabinet n'obtient pas la confiance du Parlement, le gouvernement sortant continue à gérer les affaires courantes. «Nous souhaitons éviter de nouvelles élections, mais nous n'avons pas peur d'y aller, surtout avec une loi électorale améliorée», a assuré M. Harouni. Un projet de loi contesté visant à faire passer le seuil électoral à 5 % a été adopté vendredi en commission, ouvrant la voie à un vote sur ce texte qui renforcerait l'emprise des gros partis, alors que le Parlement actuel est morcelé en une vingtaine de formations.