L'ex-patron de Renault-Nissan, poursuivi au Japon pour des malversations, a nié jeudi toute implication de sa famille dans sa fuite au Liban. Carlos Ghosn, l'ex-patron de Renault-Nissan, s'est exprimé pour la première fois, jeudi 2 janvier, sur sa fuite du Japon, où il était assigné à résidence, poursuivi pour des malversations financières. L'homme d'affaires a affirmé avoir organisé «seul» son départ vers le Liban, niant toute implication de sa famille. «Les allégations dans les médias selon lesquelles mon épouse, Carole, et d'autres membres de ma famille auraient joué un rôle dans mon départ du Japon sont fausses et mensongères. C'est moi seul qui ai organisé mon départ. Ma famille n'a joué aucun rôle», explique M. Ghosn, dans un court communiqué. L'ancien patron dénonce également le système judiciaire japonais, «où prévaut la présomption de culpabilité, où la discrimination est généralisée et où les droits de l'homme sont bafoués, cela au mépris absolu des lois et traités internationaux que le Japon a ratifiés et qu'il est tenu de respecter.» Et d'ajouter : «Je n'ai pas fui la justice, je me suis libéré de l'injustice et de la persécution politique.» Il ne serait pas extradé s'il venait en France, a affirmé, jeudi 2 janvier, la secrétaire d'Etat auprès du ministre de l'économie et des finances, Agnès Pannier-Runacher, sur la chaîne BFM-TV : « Si M. Ghosn venait en France, nous n'extraderons pas M. Ghosn, parce que la France n'[extrade] jamais ses nationaux ; donc nous appliquons à M. Ghosn comme à M. Tout-le-Monde les mêmes règles du jeu, mais cela ne nous empêche pas de penser que M. Ghosn n'a pas à se soustraire à la justice japonaise. » Sous le coup de quatre inculpations, sorti de détention provisoire sous caution en avril 2019, M. Ghosn vivait relativement libre de ses mouvements à l'intérieur du Japon, sous diverses conditions. L'ancien président-directeur général de Renault-Nissan, qui préparait son procès qui devait se tenir en 2020 au Japon, a confirmé mardi se trouver au Liban d'où il promet de parler « librement » aux médias le 8 janvier. Jeudi, le ministre de la justice libanais, Albert Sarhane, a déclaré avoir reçu une « no tice rouge » d'Interpol pour Carlos Ghosn, c'est-à-dire une demande d'arrestation de la part de l'organisation internationale. Les conditions de sa fuite restent encore floues. Les autorités japonaises ne disposent en effet d'aucune donnée informatique signalant que Carlos Ghosn se serait présenté sous sa réelle identité aux contrôles aux frontières du Japon, dans aucun des aéroports du pays. Des sources libanaises affirment en revanche que M. Ghosn a franchi les contrôles à Beyrouth avec un passeport français. Il disposait de trois passeports (un français, un libanais et un brésilien), conservés par ses avocats. Mais une autorisation exceptionnelle du tribunal lui permettait de garder un second passeport français sur lui, dans un étui fermé par un code secret, a affirmé jeudi une source proche du dossier, confirmant des informations de la chaîne publique japonaise NHK. Toujours selon cette source, le code secret de cet étui (boîte ou sacoche, le type n'est pas précisé) était connu de ses avocats, a expliqué la même source. Ce document tenait lieu de visa de court séjour dans l'archipel et M. Ghosn devait donc l'avoir à portée de main pour ses déplacements internes, a expliqué la même source. En cas de contrôle, il devait contacter l'avocat détenteur du code pour que celui-ci se déplace -il ne pouvait se contenter de donner le code par téléphone à un policier-, a encore précisé la source, indiquant que de telles dispositions ne concernaient pas uniquement M. Ghosn, mais aussi d'autres personnes libérées sous caution Le ministère de l'intérieur turc a ouvert une enquête pour déterminer les conditions dans lesquelles M. Ghosn a pu transiter par la capitale économique, et s'intéresse en particulier à deux vols considérés comme suspects, d'après l'agence de presse turque DHA. De leur côté, les autorités turques ont interpellé jeudi plusieurs personnes dans le cadre d'une enquête sur le transit par Istanbul de Carlos Ghosn, dont la destination finale était le Liban. Selon l'agence de presse turque DHA, sept personnes ont été interpellées dans la capitale turque. Selon DHA, la police a interpellé et placé en garde à vue quatre pilotes, deux personnels au sol et le cadre d'une compagnie aérienne de cargo privée, soupçonnés d'avoir aidé M. Ghosn à se rendre au Liban. Les enquêteurs ont mis la main sur l'enregistrement des échanges entre le pilote du second appareil et la tour de contrôle. « Destination Beyrouth », déclare le pilote dans cet enregistrement, selon l'agence de presse turque. Par ailleurs, d'après les médias japonais, une perquisition de l'habitation où vivait M. Ghosn à Tokyo en liberté conditionnelle a eu lieu jeudi.