Les autorités espagnoles ont identifié 46 combattants terroristes étrangers présumés, mais n'ont pas pu les appréhender. Selon un rapport de la Commission européenne, couvrant la période entre la mi-juillet et la mi-septembre, la police espagnole opérant dans le détroit de Gibraltar a détecté 46 personnes soupçonnées d'être des djihadistes affiliés à Daech. Faisant partie des efforts de contrôle des frontières dans le cadre de l'opération Minerva, les alertes lancées n'ont abouti à aucune arrestation, vu que les pays qui ayant envoyé des informations à leur sujet n'avaient pas émis de mandats d'arrêt à leur encontre. Dans le cadre de ladite opération, des officiers de la police nationale et de la garde civile ont été déployés dans les ports d'Algésiras, de Tarifa et de Ceuta. Des représentants des forces de l'ordre de 16 autres pays de l'UE ainsi que des observateurs issus des Etats-Unis étaient y ont également participé. Le rapport de la Commission européenne démontre que, pendant près de deux mois après le lancement de l'opération Minerva et durant laquelle 1,7 million de personnes sont revenues en Europe dans 372 000 véhicules, les autorités ont découvert 220 migrants sans papiers, 21 véhicules volés et confisqué 1 629 kg de drogue. 480 arrestations ont été effectuées. Le rapport souligne que l'opération a également ouvert la voie à de nouvelles enquêtes sur les activités terroristes, après que les policiers eurent détecté 46 individus soupçonnés d'être des djihadistes, connus des services de la police comme des combattants terroristes étrangers. Bien qu'aucune arrestation n'ait été effectuée, des mesures de surveillance ont été mis en œuvre. «Souvent, les bases de données nous alertent sur le fait qu'un autre pays demande des informations sur l'arrivée d'un suspect, voire nous demande de le traquer discrètement. Parfois, on nous demande simplement toutes les informations possibles sur la personne visée », explique un haut responsable de la lutte contre le terrorisme. Cette source a déclaré que les 46 alertes avaient été émises en raison d'informations introduites dans des bases de données partagées par les pays voisins, et non par l'Espagne. Selon le responsable de la lutte antiterroriste, l'opération Minerva a déclenché 53 alertes en 2018. «Ces opérations visent notamment à détecter les mouvements de terroristes revenant de zones de combat après la défaite de l'Etat islamique», a-t-il déclaré. Neptune 2, une autre opération de surveillance européenne, a identifié 12 autres suspects, dont neuf se dirigeaient vers l'Espagne. Cette opération, coordonnée par Interpol et soutenue par l'Espagne, la France, l'Italie, le Maroc, l'Algérie et la Tunisie, s'est concentrée «sur les menaces posées par des combattants terroristes étrangers présumés utilisant potentiellement les routes maritimes entre l'Afrique du Nord et l'Europe du Sud pendant la haute saison touristique, selon Frontex, l'agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes. Au cours de l'opération Neptune 2, des agents ont inspecté les passagers des navires, ferries et navires de croisière quittant ou arrivant dans sept ports de la Méditerranée occidentale, notamment Alicante et Motril (Grenade) en Espagne.«Les responsables ont effectué plus de 1,2 million de recherches dans les bases de données d'Interpol concernant des documents de voyage volés ou perdus, des données nominatives et des véhicules volés. Celles-ci ont abouti à 31 pistes d'investigation actives, dont plus de 12 liées au mouvement de suspects de terrorisme», a déclaré Frontex dans un communiqué de presse. Selon des sources policières espagnoles, neuf de ces 12 personnes se dirigeaient vers des ports espagnols. Le retour des combattants terroristes étrangers est devenu une préoccupation majeure des pays européens. Selon Europol, au moins 5.000 citoyens européens se sont rendus en Syrie et en Irak depuis 2014 et, si beaucoup sont morts au combat ou lors d'attaques perpétrés, les survivants qui reviennent ont tendance à avoir des idées encore plus radicales que lorsqu'ils ont quitté l'Europe. «D'un côté, ils ont maintenant une expérience de la manipulation d'armes et d'explosifs; de l'autre, ils sont considérés comme des héros, ce qui les transforme en de puissants outils de radicalisation», déclarent des experts antiterroristes espagnols. En février, le ministère de l'Intérieur espagnol a élaboré une stratégie nationale contre le terrorisme qui restera en vigueur jusqu'en 2023. Ce document envisage la possibilité future d'incarcérer des djihadistes de retour afin de minimiser la menace qu'ils représentent. Mais les sources de la lutte contre le terrorisme admettent que cela ne serait pas facile, car ces personnes ne peuvent être accusées que d'appartenance à une organisation terroriste et la collecte de preuves de crimes commis à l'étranger reste une mission difficile. Le document du ministère de l'Intérieur estimait que 237 personnes de nationalité espagnole ou résidents espagnols s'étaient rendues dans des zones de conflit djihadistes, notamment en Syrie et en Irak, mais également au Mali et aux Philippines. Parmi ceux-ci, 21 étaient rentrés en Espagne et 12 avaient été détenus et emprisonnés. Trois femmes espagnoles et un ressortissant marocain avec trois enfants espagnols sont actuellement détenus dans un camp contrôlé par les Kurdes en Syrie. Audiencia Nacional, la Haute cour de justice espagnole, a récemment émis des mandats d'arrêt à leur encontre pour activités terroristes.