C'était la semaine du cinéma «international» comme on se plaît si bien à l'appeler, et on a bien raison, et, c'est la raison pour laquelle j'ai décidé, moi aussi, d'en rajouter une couche. Je vais parler, encore et encore plus, de notre joyau culturel qui renforce notre fierté nationale et ravive notre orgueil tribal, j'ai nommé le déjà très renommé Festival international du film de Marrakech. J'ai commencé la semaine par l'encenser, ou plutôt, par encenser le cinéma à travers lui, ce cinéma qui relate tous les vices de la société et les aléas de la vie, mais en même temps, combat ses coups bas en nous faisant rêver les yeux ouverts et l'esprit éveillé, et je vais terminer cette semaine en essayant de donner mon avis sur les nombreux travers de cette manifestation à la saveur encore incertaine malgré ses 12 ans d'âge. Je ne voudrais pas être trop simpliste ni trop réducteur, et je ne voudrais pas non plus chialer avec certains pleurnichards qui râlent en cachette, mais qui sont toujours les premiers à faire des courbettes, à se jeter sur les cantines pour richards, à boire comme des buvards pour, ensuite, allez se vautrer dans les plumards la nuit bien tard. Croyez-moi, je ne suis pas aigri, et je crois que vous me connaissez un peu maintenant, j'aime bien rigoler un bon coup avec vous, mais il y a des fois où j'ai vraiment envie de taper un bon coup dans la fourmilière, mais avec nulle idée de tuer les pauvres fourmis, mais plutôt de réveiller leur ferveur et de relancer leur ardeur. Revenons au Festival. Cette année, je suis parti bien avant la clôture, et c'est la première fois que ça m'arrive depuis son lancement. En vérité, ce sont d'abord des obligations personnelles, très agréables d'ailleurs, qui m'ont poussé à quitter Marrakech plutôt que prévu, mais je vous assure que s'il n'y avait pas de si bons films – pas tous d'ailleurs - j'aurais déguerpi le jour même de l'ouverture. Je veux bien qu'on dise du bien de notre pays, qu'on le défende contre ceux qui le jalousent, qu'on soutienne toutes les initiatives qui aspirent à l'élever plus haut et à l'emmener aussi loin qu'il le mérite, mais pas au détriment de notre dignité. Je me souviens de la toute première édition de ce festival qui est et qui restera une merveilleuse idée, quand un journaliste a voulu savoir ce que j'en pensais, je lui avais répondu sans réfléchir et sans fléchir – je me cite de mémoire - «qu'il faudrait dès le départ choisir entre un Festival véritablement International comme l'est, par exemple, le Festival de Cannes où les Français n'ont aucun droit ni privilège de plus que les autres et sont traités comme tout le monde sur la seule base de la qualité de leurs œuvres et le talent de leurs artistes, et entre un Festival hybride qui est, certes, international par ses organisateurs et les têtes d'affiches qu'ils invitent à leurs guise, et en même temps national par les infimes marges qu'ils accordent, presque forcés, aux autochtones qui deviennent aphones trop contents peut-être d'être conviés à une fête qui n'est pas tout-à- fait la leur. Vouloir faire les deux pour contenter tout le monde relève de la schizophrénie». Fin de citation. Je vais vous paraître probablement amer, mais j'ai le sentiment que, 11 ans après, on n'a toujours pas tranché la question. Et ce n'est pas en choisissant 2 films marocains dans la compétition – ce qui est, à mon avis, une bien étrange décision – qu'on va nous faire croire, un, que le cinéma marocain est à son apogée, et deux, que ce Festival «International», malgré les strasses et les paillettes, les stars et leurs bodyguards, leurs toilettes fines et leurs limousines, reste un événement «national» avec comme seule preuve irréfutable mais bien discutable, que les «nationaux», eux aussi, marchent sur le tapis rouge, même si on les pousse parfois à aller plus vite. Au fait, qui a dit qu'on ne doit jamais se presser ? Bonne clôture les festivaliers, et bon week-end tous les autres.