Président de la Knesset depuis 1999, Avraham Burg est une «colombe» du Parti travailliste. Contestant de plus en plus la participation de son parti au gouvernement, il appelle au dialogue avec les Palestiniens. Dans un entretien publié lundi par le quotidien français «Libération», Burg a souligné que «les pressions sont très fortes à la Knesset contre cette visite mais j'ai réussi à convaincre le groupe parlementaire travailliste de soutenir ma démarche». Il a ajouté qu'il travaillait avec Abou Alaa, le président du Parlement palestinien, sur les détails de cette visite, en prenant la précaution de dire qu'il ne franchira jamais «la ligne rouge, ni ne violera un ordre légal». En s'adressant au Conseil législatif palestinien, il reconnaît de facto l'Autorité palestinienne en tant qu'embryon d'un futur Etat. «La droite ne veut pas avoir de partenaire pour discuter, comme ça elle est sûre qu'il n'y aura pas d'accord de paix, donc pas d'Etat, et les colonies resteront donc en place». Avraham Burg concède qu'il existe une contradiction entre sa position et la participation de son parti au gouvernement Sharon, mais il ajoute l'assumer totalement. Et d'ajouter que ce qu'il essaie de dire au Parti travailliste, c'est qu'il ne sont pas là pour «servir de jouet au Likoud, mais pour essayer d'influencer la politique du Likoud et de l'extrême droite dans le sens de la modération». Sa démarche, concède-t-il, peut créer des remous au sein du Parti travailliste. «Pas la visite en soi, mais ses implicationss». Mais, ajoute-t-il, «si on n'est pas prêt, dans une période comme celle que nous vivons, à payer le prix de son engagement, ce n'est pas la peine de faire de la politique». Revenant sur sa déclaration «l'occupation corrompt», faite le 28 janvier, devant la Knesset, il ajoute : «nous avons perdu beaucoup de nos valeurs. (…) je crois qu'il y a des moments où on doit savoir faire des compromis». Et de préciser qu'il n'a jamais cru à la «séparation unilatérale», ajoutant qu'un dialogue politique est nécessaire. «Si nous nous retirons et que nous construisons un mur en laissant en place toutes les colonies, le problème reste entier». «Entre le Jourdain et la mer, ajoute-t-il, il y aura deux Etats, l'un juif, l'autre palestinien, et les problèmes démographiques et humanitaires de chacun de nos deux peuples seront réglés dans le cadre de leur Etat ». Concernant la question de la capitale de chaque Etat, une solution sera trouvée dans le cadre du grand Jérusalem. A la question de savoir où passera la frontière, où siégeront les institutions, il répond que «ce sont des questions techniques». Mais, ajoute-t-il, «une autre chose est sûre, il y aura un démantèlement massif des colonies situées dans les territoires palestiniens et elles seront réinstallées à l'intérieur des frontières d'Israël». Le président de la Knesset ajoute que «tout accord qui ne prendra pas ces éléments en compte ne sera pas une solution viable». Burg souligne, par ailleurs, que «chacun entretient des contacts non officiels avec les Palestiniens: le Premier ministre, le chef de la diplomatie, le ministre de la Défense (…) parce qu'une rupture totale mènerait au suicide». «C'est de l'hypocrisie totale, assure-t-il, car il ne s'agit rien d'autre que de négociations, mais dans les pires conditions possibles». Burg affirme que le gouvernement israélien n'a aucune stratégie. «Tout le monde est d'accord sur le fait qu'il faut trouver une issue. Alors, négocions!», s'exclame-t-il. Il ajoute, d'autre part, que l'intervention d'un médiateur extérieur est «absolument nécessaire». Mais il fait valoir que lorsqu'il y a deux médiations, l'une européenne et l'autre américaine, «à la moindre crise, Sharon va passer son temps à se tourner vers les Etats-Unis et nous vers les Européens».