Malgré son entrée en vigueur, le traité interdisant l'enrôlement des enfants dans les conflits armés, n'est ratifié que par une quinzaine de pays. Ni Bruxelles, ni Washington ne se sont encore engagés. Mardi dernier, des centaines de mains rouges en carton portant la silhouette d'un enfant fusil en bandoulière avaient été plantées dans le parc du Palais des Nations (le siège de l'ONU) à Genève. A l'origine de cette opération, une « coalition » de 500 ONG qui entendent stopper l'enrôlement des enfants dans les horreurs de la guerre. Ce jour-là, Mary Robinson, haut commissaire aux droits de l'homme, avait aussi rappelé qu'«il ne doit plus y avoir d'excuses pour employer des enfants en vue de la guerre ». Fort de 96 pays signataires, le protocole avait été adopté par l'ONU en mai 2001. Il proscrit désormais la participation des enfants âgés de moins de 18 ans – contre 15 ans auparavant - dans les conflits armés, de même que leur enrôlement forcé ou par conscription. Il oblige aussi les Etats à fixer l'âge minimum pour l'engagement volontaire à 16 ans. Une mesure de taille si l'on considère qu'à l'heure actuelle, 300.000 mineurs participent directement aux conflits armés dans quelque 40 pays du monde et qu'au moins 500.000 sont enrôlés dans les forces régulières et irrégulières de 85 Etats... Si ce traité avait fait l'unanimité lors de son élaboration, seuls 14 des 96 Etats signataires l'ont pourtant ratifié à ce jour. Et dans cette dernière liste (Andorre, Bangladesh, Canada, Islande, Kenya, Monaco, Nouvelle-Zélande, Panama, Roumanie, République démocratique du Congo, République tchèque, Vatican et Vietnam), ni les pays de l'Union européenne, ni les Etats-Unis, ni les principaux Etats africains touchés par la guerre – hormis la RDC - ne sont présents… Négligence ou preuve d'un engagement hésitant, ce retard est quoiqu'il en soit déplorable. Il a d'ailleurs conduit, dimanche, la ministre allemande de la justice, Herta Daeubler-Gmelin, à appeler les Quinze à ratifier le plus rapidement possible le traité onusien. Dans l'édition dominicale du journal Bild am Sonntag, elle précise qu'un «positionnement clair des Etats de l'UE serait d'une grande aide justement pour les enfants exploités en Asie et en Afrique par des criminels s'en servant pour leur machine à tuer ». Si tout le monde s'accorde sur le principe, ce nouveau traité cache aussi certaines lacunes, notamment en ce qui concerne les jeunes volontaires ou appelés. Car si leur âge limite n'est fixé qu'à 16 ans – non pas 18 -, c'est parce qu'il est encore en vigueur dans des pays comme la Grande-Bretagne, pour l'appel sous les drapeaux. Autre faiblesse - flagrante en Afrique : le traité ne prévoit aucun mécanisme de contrôle. Pendant deux ans, ce sont les Etats qui soumettront des rapports au Comité des droits de l'enfant. «Sur le principe, il marque un énorme pas en avant pour l'Afrique, car il établit des normes internationales (…) mais c'est vrai aussi que, en réalité, elles seront très difficiles à surveiller », a ainsi souligné Silas Sinyigaya, secrétaire exécutif de la Fédération des ligues et associations des droits de l'Homme au Rwanda.