Vraiment, le match de foot entre le Maroc et l'Algérie a pris une dimension d'affaire d'Etat. Et pourtant ce n'est qu'une histoire de baballe. Comme si le contentieux entre nos deux pays n'était pas assez épais, lourd ou indigeste, il fallait que l'on y ajoute la passion du ballon rond. Ni les Marocains, ni les Algériens n'ont besoin de cela. La coupe, pour utiliser une image sportive, est déjà pleine. Vraiment, le match de foot entre le Maroc et l'Algérie a pris une dimension d'affaire d'Etat. Et pourtant ce n'est qu'une histoire de baballe. Comme si le contentieux entre nos deux pays n'était pas assez épais, lourd ou indigeste, il fallait que l'on y ajoute la passion du ballon rond. Ni les Marocains, ni les Algériens n'ont besoin de cela. La coupe, pour utiliser une image sportive, est déjà pleine. Mais, au passage, quand même, deux ou trois petites remarques. Dans le foot, selon ce que j'ai compris, la passion d'une victoire vaut largement la violence d'une défaite. Le délire est le même, mais il n'a pas le même sens. Un supporter content ou un autre malheureux ont souvent la même réaction, en général. Ils cassent, tous les deux, tout ce qu'ils trouvent sur leur chemin. Par ailleurs, on peut parfaitement imaginer, pour ce qui nous concerne, que ceux qui tressent aujourd'hui des lauriers à Baddou Zaki, l'auraient conduit à l'échafaud en chanson si le résultat n'était pas au rendez-vous. Ce sont d'ailleurs toujours les mêmes. Ils peuplent, depuis des décennies, les instances du football marocain avec la même insolence et la même gourmandise. Ils vont vouloir, dans les prochaines semaines, cannibaliser la victoire de Zaki et de ses joueurs. Il y aura une volonté indécente de vouloir exploiter les mérites de ce jeune groupe qui ne doit rien à personne pour partager les dividendes de ses performances. Mais personne n'est dupe. Maintenant, le bon peuple est content. C'est un fait. Dans la morosité ambiante, la dépression économique et sociale manifeste et la régression généralisée des valeurs patriotiques, une victoire au football est considérée comme un bienfait des dieux. Dans les têtes, c'est aussi bien qu'une découverte de pétrole, l'arrivée de 10 millions de touristes ou une année de croissance économique à deux chiffres. C'est bon à prendre, et il ne faut pas bouder son plaisir surtout si, comme le ressent fortement l'opinion publique, c'est au détriment de l'équipe d'un pays voisin identifié en la circonstance à un ennemi irréductible. Ceci étant, voir un intégriste local toute barbe et kamiss dehors, ayant probablement raté une prière à cause du match ou perdu ses ablutions sous le coup de l'émotion, crier hystériquement devant une caméra de télévision complaisante : «Viiivvvve Leee MMMaaaarrrooocc !!» , on est un peu étonné. On a juste envie de lui dire : « Tu aimes ton pays, d'accord. C'est bien que le foot te réconcilie avec lui. Mais, à l'occasion, demande à tes amis de ne pas le faire exploser. Sinon, il n'y aura plus de match du tout. » On n'aurait jamais cru que Zaki serait la meilleure arme contre les dérives intégristes de nos concitoyens. Ce gars entrera dans l'Histoire pour avoir transformé des intégristes notoires en supporters enflammés d'autre chose que la charia. C'est un vrai miracle. Et si le foot était une invention du diable ?