ALM : 28 personnes se sont inscrites, en un mois, dans les registres de don d'organes après décès. La décision d'El Mostafa Ramid pour donner ses organes après sa mort a-t-elle eu un impact positif sur l'opinion publique ? Benyounès Ramdani : Il faut dire que ce chiffre frôle à ce jour les 58 personnes. Jeudi dernier, 30 personnes ont signé la demande de don, en marge d'une rencontre de sensibilisation au don d'organes et à la transplantation rénale tenue à l'occasion de la Journée mondiale du rein. Nous avons demandé au président du tribunal de ramener des formulaires de demandes écrites. En effet, un grand nombre parmi les participants les a remplis. Ces demandes honorent-elles l'engagement des signataires ? Les personnes peuvent retirer, à n'importe quel moment, leur demande. Il est utile de souligner qu'un don d'organes ne peut être effectué sans l'accord du donneur de son vivant et surtout qu'après l'avoir noté sur le registre détenu par les hôpitaux agréés par la loi. Dans le cas des greffes rénales, il est possible de prélever un rein sur une personne décédée après accord de sa famille dans un délai de 48 heures. Va-t-on vers une généralisation de don d'organe au Maroc ? Je pense que oui. Rien que ce week-end, 700 personnes, à Oujda, ont pris part à la clôture des journées de sensibilisation au don d'organes. Les gens commencent à s'intéresser à ce sujet. D'ailleurs, l'adhésion d'El Mostafa Ramid, ministre de la justice et des libertés, au registre des donneurs, a donné un coup de fouet à cette cause. En onze ans, seulement 800 personnes inscrites au registre. Vous ne trouvez pas que c'est insuffisant ? Je ne pense pas qu'on ait atteint ce chiffre-là. Il faudrait relativiser tout cela. Si nous avons procédé par la sensibilisation, c'est ce qu'il y'a un réel besoin. Ce qui nous a encouragés dans cette démarche, c'est la réussite des greffes à partir des morts encéphaliques réalisées en 2010. Depuis le début de l'année 2012, nous sommes à 12 greffés. Si on continue sur cette cadence nous atteindrons une proportion de 70 greffes par ans. Nous avons orienté notre campagne de sensibilisation sur trois étapes : Tout d'abord les praticiens, les médias ensuite les acteurs législatifs et religieux. Demander aux Marocains de donner leurs organes sans même que les acteurs concernés ne soient informés n'est pas judicieux. D'ailleurs, le nombre dérisoire des donneurs résulte du manque de communication autour de ce sujet. Quelles sont les mesures en vigueur pour limiter certaines dérives ? La loi est très claire là-dessus. Il y a une possibilité d'emprisonnement qui peut aller de deux à cinq ans et une amende de 50.000 à 500.000 dirhams pour tout trafic d'organes et prélèvement sans consentement du donneur ou sa famille. Il n'y a pas de quoi s'inquiéter, la loi marocaine est très stricte. Quelles sont les entraves qui freinent le don d'organe au Maroc ? Le premier obstacle est d'ordre social. 40 % des malades disposent de la couverture médicale. Il faut généraliser ce dispositif car une greffe, quelle que soit sa nature, est très coûteuse. Sans négliger toute la science autour du greffé en l'occurrence, les analyses biologiques qui préviennent de toutes complications.