Avec la nomination de M. Laenser, un responsable partisan à la tête du département, s'agit-il d'une gageure contre les éventuelles dérives ou dépassements ? Dans le cadre de la mise en œuvre de la régionalisation avancée, le Parti de la justice et du développement (PJD) aspire à ce que les walis et gouverneurs, les représentants de l'administration centrale au niveau local, relèveraient du chef de gouvernement, alors que d'autres acteurs et observateurs sont contre cette idée et veulent que ces représentants de l'administration demeurent sous tutelle directe et exclusive du ministre de l'intérieur. Avec la nomination de M. Laenser, SG du Mouvement populaire (MP), à la tête du département de l'Intérieur, le débat sera-t-il tranché en faveur de la thèse des islamistes? Selon le politologue Mohamed Darif, «les walis et les gouverneurs doivent continuer de relever du ministre de l'intérieur dans le cadre des distinctions fonctionnelles. Si c'est pour un souci de neutralité qu'on veut changer leur statut, il faudra rappeler que le chef de gouvernement est lui aussi secrétaire général du PJD», explique M. Darif. Et d'ajouter : «Le chef de gouvernement est investi d'une mission de coordination entre les différents départements. Si on met les walis et gouverneurs sous la tutelle du chef de l'Exécutif, on devra également penser à mettre les ambassadeurs et consuls sous sa tutelle». Charki Draïss, une gageure contre les dérives ? La nomination de Charki Draïss, ex-directeur général de la sûreté nationale (DGSN) au poste de ministre délégué auprès du ministre de l'intérieur suscite un grand point d'interrogations : Avec la nomination de M. Laenser, un responsable partisan à la tête du département, s'agit-il d'une gageure contre les éventuelles dérives ou dépassements ? Selon les observateurs, il s'agit plutôt d'une pratique installée au Maroc au lendemain de l'intronisation de SM le Roi Mohammed VI consistant à créer le poste de secrétaire d'Etat ou de ministre délégué auprès du ministère de l'intérieur chargé principalement du volet sécuritaire. Et ceci est valable pour l'ensemble des gouvernements qui se sont succédé depuis 2000. Du côté de Taib Cherkaoui et bien avant lui Chakib Benmoussa, il y avait Saâd Hassar comme secrétaire d'Etat. Aussi, du temps des ex-ministres de l'intérieur El Mustapha Sahel et Mohamed El Midadoui, Fouad Ali El Himma a occupé le poste de secrétaire d'Etat auprès du même département. Débat autour de la supervision des élections La question de la supervision des différentes opérations électorales suscite elle-aussi le débat. Est-ce le département de Mohand Laenser qui doit continuer à chapeauter et superviser les élections ou bien cela devra relever désormais du chef de gouvernement pour garantir une position de neutralité? «C'est pas faisable. Là encore, si c'est pour garantir la neutralité de l'administration qu'on devra charger le chef de gouvernement de superviser l'opération électorale, il ne faut pas perdre de vue que ce dernier est aussi un acteur partisan. Aussi, si c'est le chef de gouvernement, SG du PJD, qui se charge de cette mission, les autres partis vont l'accuser de manque de neutralité et on va tomber sur le même problème», indique Mohamed Darif, politologue. Et d'ajouter : «On peut, par exemple, penser à charger la justice de cette mission ou de créer une commission nationale indépendante mais surtout pas le chef de gouvernement pour des raisons de distinctions fonctionnelles».