La définition que donne, Si Benkirane, de la liberté de croyance est terrible. Avec la méthode qui consiste à avoir la réponse dans la question elle-même, il s'interroge : Que signifie liberté de croyance? dit-il «Qu'on permette à certains laïcs de rompre publiquement le jeûne pendant le Ramadan ? Que la liberté sexuelle et l'homosexualité soient banalisées et publiques ?» Et puis pour enfoncer le clou, il nie être contre la liberté de croyance sauf qu'il ajoute : «mais le Maroc est un pays musulman qui a ses lois. En France, ils interdisent le voile au nom de la loi» En dehors du caractère politicien, il y a dans ces propos toute la méthode dont use généralement l'extrême-droite. L'excès et la contrevérité. L'excès lorsqu'il s'agit d'enfermer les partisans de la liberté de croyance dans un enclos de perversité : le sexe et l'homosexualité. Ce qui renvoie à la vision biblique de Sodome et Gomorrhe. Ainsi, les laïcs préparent une société où nos enfants et surtout nos filles seront livrés, pieds et mains liés, à la sodomie et la monstruosité d'une société qui jouit sans entraves. Vision apocalyptique. Lorsqu'il parle de ceux qui veulent rompre publiquement le jeûne durant le Ramadan, il surfe sur un fait d'actualité récente pour réduire toute la demande de modernité à sa dimension de transgression totale. Dans les deux cas, le choix des exemples participe d'une volonté d'effrayer le chaland. On flatte ici les émotions libidineuses et les instincts obscurs du croyant au lieu d'interroger l'esprit du citoyen. La contrevérité, c'est quand Benkirane dit qu'il n'est pas contre la liberté des croyances…mais, et tout est dans le mais, «on est au Maroc» et donc c'est «un pays musulman qui à ses lois» comme si celles-ci étaient éternelles et immuables au moment où la Constitution se discute. Au moment même où certains réclament de border les prérogatives du Souverain himself. C'est le Maroc à l'envers. La vérité, c'est que non seulement le PJD est contre la liberté de croyance mais il en a peur. La contrevérité devient contrepèterie quand il annonce :«En France, ils interdisent le voile au nom de la loi». Là on est dans la démagogie obséquieuse. Benkirane sait que, mis à part les assauts de l'extrême-droite, il y a des millions de musulmans, dont une partie de ses partisans, qui pratiquent leurs cultes tranquillement en France, en Belgique ou en Hollande. Que ce n'est pas le voile mais les signes extérieurs et ostentatoires qui ne sont pas admis dans les lieux publics et particulièrement à l'école et que cette disposition était précédée par vingt ans de débat, depuis 1989. La soutane ne fait, peut-être, pas le curé pas plus que ne fait la djellaba l'imam. Mais la sortie tonitruante du patron du PJD consacre en revanche la vraie ADN idéologique de son parti. Un parti d'exclusion.