Les manifestations de revendications ont une certaine noblesse, dans tous les pays du monde, il est important pour cela de leur garder dignité, raison d'être et légitimité… Or je m'interroge… n'est-on pas au Maroc, en train de les «banaliser», voire de les rendre d'une certaine façon impopulaires ? C'est une question qu'il me semble légitime de poser à l'heure actuelle. En organisant des marches à répétition le «mouvement du 20 février», pour essayer de leur garder un attrait médiatique, ne prend-il pas le risque – ou le pari- de les «radicaliser» ? Les revendications deviennent pour certaines répétitives, pour d'autres discordantes, on trouve d'ailleurs de tout maintenant dans leurs slogans et le mouvement semble prendre une tournure «anarchique». Ainsi la marche des «20 févriéristes» le week-end dernier à Marrakech, a été vécue comme choquante par nombre de Marocain(e)s , où les mots d'ordre contre le terrorisme se mêlaient à leurs habituels slogans du style «dégage». Peu respectueux des victimes et de leurs familles et créant l'amalgame… Comparée à l'opération «Jus d'orange à Jemaa El Fna» organisée la veille, spontanée, fédératrice et populaire, la manifestation du mouvement de protestation paraissait «revencharde» et aigrie. Que dire de ce dimanche 15 mai où, 8 ans après les attentats de Casablanca, une immense foule de citoyens avaient choisi d'entourer Madame Khammel, maman de feu le jeune Tayeb, tué le 16 mai 2003 - ainsi que son papa -pour se souvenir et crier, à nouveau, leur refus de la barbarie et du terrorisme ! Que dire donc quand, alors que cette foule de Marocain(e)s se recueillaient, les différentes «composantes» du Mouvement du 20 Février avaient choisi de pique-niquer à côté du siège de la DST ??? On le voit, on le constate, on le mesure, ce mouvement qui n'est toujours qu'un mouvement de protestation ne parvient pas à entraîner l'adhésion de la population ni de la jeunesse, leurs marches voient le nombre de participants stagner, voire décroître…pire il n'arrive à embrayer sur aucune dynamique participative et constructive, l'exemple le plus frappant en est la passivité totale des «20 févriéristes» face à l'ouverture des listes électorales qui permettent aux jeunes qui atteignent leurs 18 ans ou qui ne le sont pas encore, de s'inscrire ! Là, l'incompréhension est totale… comment un mouvement qui se revendique de la jeunesse, qui conteste le gouvernement, le Parlement, qui milite pour la démocratie et veut insuffler le changement peut-il passer à côté de cet enjeu majeur qu'est la participation des jeunes au vote ??!! Des associations de jeunes, dans les quartiers, œuvrent inlassablement pour inciter la jeunesse à «être actrice de sa vie», pour insuffler l'esprit civique, pour sensibiliser les générations actuelles à la participation à la Vie de la Cité…en passant à côté de ce juste «défi» le mouvement du 20 Février, prend un sacré «coup de vieux», il se ringardise et montre que son combat est «autre»… Occuper la rue n'est pas le plus difficile dans une démarche militante, le véritable challenge est bel et bien «que faire» après avoir marché… Visiblement, ce mouvement n'a pas compris ni su «arrêter» une marche, au risque de tourner en rond.