Quand sa première maîtresse lui a demandé d'inscrire son enfant, fruit de leur relation extra- conjugale, sur le livret d'état civil, il a décidé, avec sa deuxième maîtresse, de le tuer en l'étranglant et le jeter dans un puits. Ils partagent les mêmes sentiments d'amour. Et ils partagent également, ce jour du mois de mars, le même box des accusés. De temps en temps, ils échangent des regards, ainsi que de petits sourires, mais pas la moindre parole. En fait, la dernière fois qu'ils s'étaient vus remonte à trois semaines quand ils ont été conduits, pour la deuxième fois, vers cette salle d'audience de la chambre criminelle près la Cour d'appel de Kénitra. Le président de la Cour leur rappelle les accusations : kidnapping et homicide volontaire avec préméditation et guet-apens. Des accusations punies soit à la peine de mort, soit à la réclusion perpétuelle au cas où des circonstances atténuantes sont accordées aux deux mis en cause. «Nous ne l'avons pas tué, M. le président. Et personne ne peut tuer son propre fils», a affirmé Redouane contrairement à ce qu'il avait raconté aux enquêteurs quand il a été arrêté, avec sa complice, son amante, Nadia. À ce moment, il a avoué son crime qui est le fruit d'un mélange d'amour, de haine, de jalousie et d'égoïsme. Demeurant dans un douar à Souk Larbaâ, ce marchand ambulant a raconté aux enquêteurs avoir entretenu, il y a plus de huit ans, une relation amoureuse avec une jeune fille. Au fil des jours, leur relation extraconjugale s'est renforcée au point qu'elle a donné comme fruit un garçon. Seulement, les comportements de Redouane ont changé par la suite. Il ne s'intéresse plus à son amante, ni à leur enfant. Il disparaissait durant des semaines pour réapparaître sans donner des explications à son amante. Et il a fini par l'abandonner définitivement et entretenir une nouvelle relation amoureuse avec une seconde jeune fille, Nadia. Celle-ci l'aimait follement et ne songeait jamais à le partager avec une autre femme. C'est pourquoi, quand la première amante a contacté Redouane pour lui demander d' inscrire son enfant, ayant six ans, dans le livret d'état civil afin de lui faciliter la poursuite de ses études, il s'est révolté. Elle lui a demandé de ne plus lui répondre. Pire encore, Nadia qui a mis au monde sa première fille a téléphoné à la première amante et l'a menacée de se venger d'elle si elle s'adressait une fois encore à son amant. Seulement, la première maîtresse n'a pas cessé de solliciter Redouane d'inscrire son fils dans le livret tout en le menaçant de recourir à la justice. Et c'était la goutte d'eau qui a fait déborder le vase. «Nous devons nous débarrasser du garçon», lui a-t-elle suggéré lors d'un moment de faiblesse. L'idée lui a plu au point qu'il a décidé de passer rapidement à l'acte. Redouane, qui demeurait à Kénitra, s'est déplacé à son premier douar. Parce que son enfant y demeurait, chez sa grand-mère. Quand l'enfant est sorti pour jouer avec ses camarades, Redouane l'a kidnappé. Il l'a conduit facilement jusqu'à chez lui à Kénitra. Devant les regards de Nadia, il l'a étranglé avec ses deux mains. Que devaient-ils faire pour se débarrasser du cadavre et pour laver leurs mains du crime ? À ce propos, Nadia a mis le cadavre de l'enfant sur son dos. Elle a fait semblant qu'elle portait son beau-fils, malade, pour l'emmener à l'hôpital. Alors qu'ils l'ont conduit jusqu'au douar de Souk Larbaâ. Pas loin de la demeure de la mère de sa première amante, Redouane a jeté le cadavre dans un puits avant qu'il disparaisse avec sa deuxième maîtresse, Nadia. Le cadavre de l'enfant a été découvert deux jours plus tard. L'enquête a tiré l'affaire au clair en mettant Redouane et Nadia en cause.