La sortie de Jeannette Bougrab sur l'Egypte même si elle incarnait une conviction de bon sens lui avait valu les remontrances de sa hiérarchie et les quolibets de l'opposition. Depuis le début de la crise égyptienne, la grande hantise de Nicolas Sarkozy est qu'un membre de son gouvernement puisse s'embourber dans une gaffe aussi énorme que celle commise par Michèle Alliot-Marie, ministre des Affaires étrangères, qui n'avait rien trouvé de pertinent à dire que de proposer une coopération sécuritaire avec la police tunisienne. Le président de la République, marchant sur des œufs, avait tenté de verrouiller la communication gouvernementale au point d'encadrer les sorties des ministres des Affaires étrangères et de la Défense. Mais malgré ces précautions, Nicolas Sarkozy n'a pu éviter le grand dérapage qui en pleine ébullition égyptienne, rajoute de la confusion à la position diplomatique française. Il fut l'œuvre d'une secrétaire d'Etat à la Jeunesse, Jeannette Bougrab, inconnue sur la scène politique internationale, novice en politique française puisque sa nomination au sein du gouvernement de François Fillon date de novembre dernier. Elle a eu cette phrase couperet qui avait dynamité le fragile échafaudage diplomatique construit par Nicolas Sarkozy : «Il faut qu'il (Hosni Moubarak) parte. Je crois qu'après trente ans de pouvoir, il y a une forme d'usure et que la transition démocratique doit aussi toucher l'Egypte». En lisant cette phrase et toute la cacophonie dans la presse qu'elle a provoquée, le sang de Nicolas Sarkozy n'a fait qu'un tour. Il fait convoquer la maladroite au discours insurrectionnel par le chef de gouvernement François Fillon qui lui administre une magistrale séance de remontage de bretelles. En témoigne le communiqué publié après cet entretien par Jeannette Bougrab dans lequel elle fait son mea culpa : «La position de la France et de son gouvernement a été exprimée par le président de la République et le Premier ministre». Personne en réalité ne s'attendait à ce que l'inévitable bourde diplomatique française sur l'Egypte vienne de Jeannette Bougrab. Cette brune au charme piquant, fille de Harkis, a connu une ascension et un accès à la notoriété nationale fulgurante. Alors qu'elle avait trébuché à se faire élire comme députée du 18 arrondissement de Paris, elle fut choisie par Nicolas Sarkozy pour présider la HALDE (Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité). Son bref passage à la tête de cette institution n'a laissé que le souvenir d'un énorme scandale dégoupillé par «Le canard enchaîné» lorsqu'il révéla que parmi les premières décisions que Jeannette Bougrab avait prises, celle de doubler son salaire. Lors du dernier remaniement, obligé pour cause de fermeture avant campagne électorale de se séparer des icônes de l'ouverture comme Fadela Amara, Rama Yade, Nicolas Sarkozy fait entrer Jeannette Bougrab au gouvernement. Bizarrement et malgré son pedigree, elle n'a jamais mis en avant son appartenance aux minorités pour faire valoir sa promotion. Elle a adopté la même attitude d'une autre secrétaire d'état à la Santé Nora Berra. Jeannette Bougrab, militante de l'UMP pure et dure, est habituée à bénéficier dans sa carrière des nominations par décrets présidentiels. Sa sortie sur l'Egypte même si elle incarnait une conviction de bon sens lui avait valu les remontrances de sa hiérarchie et les quolibets de l'opposition. Marine Le Pen a adopté un ton moqueur à son égard : «On a trouvé quelqu'un pour remplacer Rama Yade», en référence à la spécialiste des coups de sang et des bourdes à répétition, actuellement ambassadrice de France à l'Unesco.