Tout comme Miloudi Zakaria, émir d'«Assirat Al Moustakime», les trois prédicateurs, Mohamed Fizazi, Omar Haddouchi et Abdelkrim Chadili ont nié être des théoriciens de la Salafiya Jihadia. Abdelkrim Chadili, alias «Abou Oubaïda», l'un des théoriciens de la Salafiya Jihadia, a eu un malaise après son interrogatoire, mercredi vers 23h, par la Chambre criminelle près la Cour d'appel de Casablanca. Il a été transporté aussitôt à l'Hôpital Mohammed V qu'il n'a quitté que vers 1h du matin du jeudi à destination de la prison d'Aïn Borja à Casablanca. Agé de 42 ans, ce docteur en philosophie a nié devant la Cour, être un «takfiriste» excommuniant la société marocaine et faisant appel à la violence pour «redresser les torts». Autorisé officiellement, affirme-t-il à la cour, il donnait des cours dans une mosquée. Il a ajouté avoir prodigué des conseils en matière de religion lors des baptêmes, des mariages et des circoncisions, mais évoquer le Jihad. Abdelkrim Chadili, qui a réalisé sa thèse de doctorat sur Cheikh Ibn Taymia, a précisé à la Cour avoir lutté contre tous ceux qui excommunient la société marocaine, ajoutant qu'il ignore l'existence du courant de la Salafiya Jihadia. A propos d'une interview publiée dans l'hebdomadaire en langue arabe, «Al Ayyam», il a nié avoir jamais accordé d'entretien, affirmant que le journaliste s'est contenté d'extraire des paragraphes de ses manuscrits pour monter l'interview. « J'ai envoyé à ce propos une mise au point à Al Watan Al Arabi », précise-t-il. Pourquoi ne pas l'avoir envoyée à Al Ayyam ? Pas de réponse. Cependant, il n'a pas nié avoir des relations avec les Cheikhs Mohamed Fizazi et Omar Haddouchi ou avoir pas donné des cours à des jeunes à Lahraouiyine et au douar Thomas, à Casablanca. Chadili a nié également avoir apprécié les attentats du 11 septembre et d'avoir considéré Ben Laden comme le rénovateur du siècle. Par ailleurs, il a expliqué à la Cour que Miloudi Zakaria est effectivement un «takfiriste» qui guide le courant d'«Assirate Al Moutakim». Considéré comme l'un des maîtres de la Salafiya Jihadia, Omar Haddouchi, 42 ans, père de famille, a rejeté en bloc les accusations suivantes : association de malfaiteurs, complicité dans l'atteinte à la sûreté intérieure de l'Etat en portant la dévastation, le massacre et le pillage dans plusieurs localités, complicité à l'homicide volontaire avec préméditation et guet-apens, complicité aux voies de fait entraînant des blessures, complicité à l'enlèvement et la séquestration. En réponse aux faits qui lui sont reprochés, notamment d'avoir qualifié la société marocaine d'impie, il a déclaré : «Je considère le Maroc comme un pays musulman et je suis un Marocain, musulman, malékite, marié à une Marocaine, qui mange des plats marocains…». Il a ajouté qu'il est prêcheur depuis une vingtaine d'années, qu'il a donné plus de soixante-dix cours sans appeler ni au Jihad, ni à la violence. « Il est illicite de combattre un Etat musulman… », a-t-il affirmé. En réponse à la question de savoir s'il appartenait à la Salafiya Jihadia, Omar Haddouchi a crié sur un ton sévère : «Ils sont issus de la débauche et je suis contre l'existence des groupes islamiques et des partis». Haddouchi a reconnu avoir donné des cours à Lahraouyine, aux Carrières Thomas et au douar Sekouila. «Mais, je n'ai jamais parlé du Jihad… Par contre, j'ai donné aux jeunes des cours pour les mettre en garde contre les «takfiristes»…», a-t-il précisé. Cependant, ses aveux concernant sa relation avec Mohamed Damir et Abderrahman Majdoubi condam-nés dans le dossier de Youssef Fikri, respectivement à la peine de mort et à la peine perpétuelle et avec Rabiî Aï Ouzzou qui a trouvé la mort au quartier Douma lors d'une descente policière et avec Youssef Oussaleh, trésorier du Parti de la Justice et du Développement (PJD) section de Sidi Taybi, près de Kenitra et l'interdiction de son domicile à tous ceux qui se sont rasés la barbe en laissant des zones d'ombres sur ses déclarations et ses relations avec la Salafiya Jihadia. Il a condamné, par ailleurs, les attentats du vendredi 16 mai à Casablanca. C'est vers 23h, mercredi, que la Cour a levé l'audience pour la reprendre jeudi matin avec l'interrogatoire de Mohamed Fizazi, alias «Abou Mariem». Comme à l'accoutumée, ce dernier a rejeté l'existence du courant de la Salafiya Jihadiya. Lors de cette audience, il a fait part de son indignation pour les opérations terroristes du 16 mai. «Sans le moindre doute, je condamne clairement les attentats du 16 mai et je les considère comme des crimes contre mon pays dont je refuse qu'il soit touché de près ou de loin… », s'est-il écrié. Né en 1949, à Mernissa, dans la région de Taza, Mohamed Fizazi a fait ses débuts à l'école coranique, avant d'intégrer l'école publique. Après le baccalauréat, il s'est inscrit à l'école des instituteurs. A 21 ans, il a été recruté comme instituteur pour enseigner la langue française à Tanger. En parallèle, il poursuivait des études de Chariâ et il a obtenu une licence en sciences du Hadith. Ce diplôme lui a permis d'entamer, en 1976, son parcours de prédicateur à la mosquée des Almohades à Tanger. Mohamed Fizazi a commencé depuis sa carrière de prédicateurs. Au début des années 80, il était l'un des prédicateurs de la ville du Détroit qui a appelé les adeptes du Takfir à raser les impies, à attaquer les têtes de «la fitna», à savoir les trafiquants de drogue et de boissons alcoolisées. Dix ans plus tard, la chaîne qatariote «Al Jazeera», l'a rendu plus célèbre, en le faisant passer à l'émission de Fayçal Al Kassim, Al Ittijah Al Mouâkis. Avec sa longue barbe, il s'est tenu, ce jeudi matin, devant le box des accusés pour tenter de se disculper de toutes les accusations qui lui sont reprochées. «La Salafiya Jihadia est une fable comme les autres… », a-t-il crié devant la Cour. Concernant ses croyances, il a expliqué : «Je ne suis pas un Salafiste, je suis un musulman et je suis contre toute coalition basée sur la religion…Car la religion pour Dieu est l'Islam… ». Quand il a été interrogé sur son interview publiée dans les colonnes d'Ascharq Al Awsat, il a précisé qu'il regrettait de constater que son pays juge une personne sur la base d'un article. «Je n'ai ni condamné, ni loué dans cette interview les attentats du 16 mai… », a-t-il affirmé. Il a ajouté avoir seulement donné des explications concernant ces opérations sanguinaires. A propos de ses cours, il a expliqué qu'il avait donné des conférences et des cours dans une trentaine de pays dans le monde et non pas seulement à Casablanca. Concernant les réunions privées, il a précisé que : « je n'assiste jamais à des réunions sous la table… ». Par ailleurs, il a reconnu avoir assisté au mariage de Mohamed Damir, condamné à la peine de mort, tout en précisant qu'il n'a jamais donné des cours sur le Jihad ou avoir accordé une allégeance à personne. Après 13h, la Cour a poursuivi l'interrogatoire de Mohamed Fizazi. Elle devait interroger, par ailleurs, lors de l'audience de l'après-midi, Brahim Firdaous, le bras droit de Zakaria Miloudi, émir d'Assirate Al Moustakim et ses deux complices qui l'ont caché chez eux à Berrechid.