Moulay Hicham n'a finalement pas pu résoudre l'équation de prince citoyen, acteur de la vie politique, dans un pays monarchique, où ne saurait être occultée l'immunité que confère le titre de prince. «Profondément déçu par le Premier ministre Abderr-ahmane Youssoufi, Moulay Hicham estime que le gouvernement a perdu toute crédibilité, la gauche ayant sombré dans l'affairisme et la trahison au détriment de la militance». C'est ainsi que François Soudan résume, dans le dernier article de Jeune Afrique-l'Intelligent consacré au prince Moulay Hicham, les dispositions du prince à l'égard de la gauche marocaine et par-delà, de l'exécutif. Ce faisant, le journaliste évoque de loin des rapports, soufflant alternativement le chaud et le froid entre le « prince citoyen » et la gauche marocaine au pouvoir à la faveur de l'alternance. Une gravitation, pas nécessairement toujours dans le même sens autour du pivot de l'héritage du mouvement national, au centre de la légitimité que revendiquent l'Union socialiste des forces populaires (USFP) et le Parti de l'Istiqlal, aujourd'hui à la tête des affaires du pays. Dès ses premières sorties sur les colonnes de la presse internationale notamment après le lancement de l'alternance, Moulay Hicham avait contesté ce monopole à l'USFP, et dans la même foulée au parti de l'Istiqlal. Il s'était même inscrit, par la suite, dans le sillage de certains « dissidents » pour dénoncer le détournement des valeurs historiques du mouvement national au profit de ce que l'on a qualifié « d'affairisme politique » autour de fonds de commerce visant le pouvoir et la consécration électorale. Le prince s'en est également pris au bilan du gouvernement, mettant en avant sa qualité de « prince citoyen », mais, s'associant par la même occasion à des éléments déjà eux-mêmes en rupture de ban avec leur socle partisan et de ce fait, privés d'une large part de la légitimité, corollaire de la pesanteur du propos politique. On a plaidé pour une sorte de renaissance de ses cendres de l'aïeul l'UNFP, sur fond d'une conférence nationale qui serait en même temps une cure de ressourcement pour le régime. L'idée et le concept firent leur temps et permirent à une certaine presse, s'érigeant en relais auto-désigné de cette nouvelle philosophie, de placer quelques « unes ». Jusqu'à ce que le résidu de lectorat s'en lasse. Ainsi sombra la sympathie que Youssoufi et certains leaders de la gauche avaient témoignée au prince, du temps où l'alternance n'était encore qu'un rêve. Ainsi peut constater François Soudan qu'en septembre 2001, ne fréquentaient plus le prince «que quelques obligés, des journalistes amis, une poignée de radicaux en rupture de ban avec l'USFP de Youssoufi, une demi-douzaine d'islamistes et de fondateurs d'ONG ». Avec les islamistes c'est une tout autre affaire. On a sous-entendu que le prince Moulay Hicham s'est inscrit en rupture avec les mouvements islamistes allant même jusqu'à mettre en garde contre une certaine coalition des islamistes avec l'armée contre le pouvoir, juste avant l'avènement de SM le Roi Mohammed VI. Puis, s'est mise en avant une concordance des vues, notamment à travers le fameux « pacte de la monarchie » qu'il détailla lors du colloque de l'IFRI (Paris) le 21 mai 2001, et la question de la Bei'a au sujet desquels les propos du prince, qui avait signé l'acte d'allégeance en costume civil, rejoignaient ceux des islamistes, Cheikh Abdeslam Yassine en tête. Quoiqu'il en soit, avec les uns comme avec les autres, Moulay Hicham n'a finalement pas pu résoudre l'équation de prince citoyen, acteur de la vie politique, dans un pays monarchique, où ne saurait être occultée l'immunité que confère le titre de prince.