Samedi dernier au théâtre de la F.O.L, concert de Tarik Batma. Ce concert a déchaîné les jeunes qui ont su respecter la frontière qui sépare le débordement de la pagaille. Samedi soir, 19 janvier, la rue Moussa Bnou Noussaïr enregistrait des mouvements inaccoutumés. Des jeunes, par bandes de trois, de quatre personnes, s'y déplaçaient. Ils sont venus en masse pour assister au spectacle de Tarik Batma. Le théâtre de la F.O.L (Fédération des œuvres laïques) avait ouvert ses portes à 20h 30. Les jeunes y entraient sans façon, sans ce respect un peu guindé qui fait qu'on entre dans certaines salles comme dans un lieu de culte. Ceux qui fumaient une cigarette n'avaient pas pris le soin de l'écraser avant de franchir le seuil de la salle. Ceux qui avaient une cannette de soda l'arboraient fièrement. Visiblement, les interdits qui sont en vigueur dans d'autres salles sont caducs ici. La salle était convenablement remplie. Elle baignait dans une lumière jaune à laquelle un brouillard de fumée ajoutait des tons cotonneux. Les jeunes piaffaient d'impatience... La musique diffusée par de puissants haut-parleurs n'arrivait pas à les faire patienter. Ils réclamaient, acclamaient, criaient le nom d'une seule personne : Tarik ! Ce dernier ne pouvait laisser ses fans en délire plus longtemps, il a fait son entrée sur scène à 21h 20. Cette entrée a été saluée par des applaudissements, des hourrahs et des sifflements tonitruants. Elle a littéralement décollé la moitié de la salle de ses sièges. Les jeunes sont venus devant la scène, et y sont restés jusqu'à la fin du spectacle. Tarik Batma était accompagné de cinq musiciens : un guitariste, un bassiste, un percussionniste, un batteur et un pianiste. Une mention très particulière à Mourad Kibali, le guitariste. Il est gaucher et joue avec une guitare de droitier. Il la portait tout simplement à l'envers, et les sons qu'il lui faisait dire sont loin d'être gauches. Tarik Batma est issu d'une famille d'artistes. Son père est le leader du groupe Lamchaheb, sa mère l'une des premières voix féminines de ce groupe. Son oncle, le défunt Larbi Batma, a marqué d'une façon indélébile le champ de la chanson de groupe au Maroc. C'est dire que ce jeune a été baigné, depuis son enfance, dans un milieu de musiciens. Cet héritage, Tarik Batma ne le renie pas. Il s'en inspire tout en le renouvelant. Au niveau du texte, il respecte parfaitement l'exigence de son père et de son oncle. Tout est puisé dans la culture marocaine… C'est au niveau de la musique qu'il se distingue des membres de sa famille. Il applique des genres musicaux occidentaux (reggae, funk, rock et salsa) à un canevas marocain. Le résultat plaît aux jeunes. Ils n'ont laissé aucun répit à leur Tarik. Le concert a été ponctué par maints envahissements de la scène. Un premier jeune, audacieux, est monté d'abord. Son exemple a été suivi par d'autres. Ils donnaient une accolade au chanteur et chantaient avec lui. D'autres tiraient une fierté d'être photographiés à côté de leur idole. Les agents de sécurité ne savaient plus où donner de la tête. Les envahisseurs venaient de partout. Mais ils n'ont en rien dérangé le chanteur qui acceptait avec beaucoup d'indulgence les embrassades de ses fans. Tarik Batma a permis aux jeunes l'espace d'une heure et demie de s'éclater. Ces derniers ont montré qu'ils savent faire la fête sans que leurs débordements ne tournent au gâchis.