La classe politique a fermement condamné l'instrumentalisation des questions des droits de l'Homme par l'AMDH pour véhiculer des discours portant atteinte aux valeurs sacrées de la Nation. L'Association marocaine des droits de l'Homme (AMDH) est dans l'œil du cyclone. Depuis la tenue de son neuvième congrès du 20 au 23 mai 2010, l'Association de Khadija Ryadi est au centre de la polémique. La classe politique a fermement réagi contre les positions politiques de cette ONG exprimées lors de son congrès. Mardi 8 juin, la Chambre des conseillers a suspendu sa séance des questions orales pendant dix minutes en protestation contre «des slogans attentatoires aux causes sacrées de la Nation», scandés lors du dernier congrès de l'AMDH. «Ce qui s'est passé lors du 8ème congrès de l'AMDH n'est qu'une instrumentalisation odieuse des nobles valeurs des droits de l'Homme dans une vaine tentative de porter atteinte à la devise du Maroc «Dieu, la Patrie, le Roi» qui fait l'unanimité de la Nation», a souligné Driss Radi, président du groupe du Rassemblement constitutionnel unifié, à l'origine de la demande de la levée de la séance. Ce groupe parlementaire, composé du RNI et de l'UC, a exprimé le rejet par la Chambre des conseillers de l'instrumentalisation des questions des droits de l'Homme pour véhiculer des discours portant atteinte aux valeurs sacrées de la Nation. Le groupe UC-RNI a, par ailleurs, salué le militantisme responsable et sérieux pour la défense des droits de l'Homme, exprimant son rejet de toutes formes de dérapage faisant de l'instrumentalisation des droits de l'Homme un prétexte au service des agendas politiques tant aux niveaux intérieur qu'extérieur. Auparavant, c'était le Premier le ministre Abbas El Fassi qui a ouvert le bal des critiques. Dans son allocution à l'occasion de la séance d'ouverture du onzième congrès de la Jeunesse istiqlalienne, le week-end dernier à Rabat, le secrétaire général du parti de l'Istiqlal a accusé implicitement l'association présidée par Khadija Ryadi de défendre les thèses des séparatistes. Outre la position exprimée par le Premier ministre en personne, les socialistes, les libéraux et les islamistes s'accordent pour dénoncer l'exercice clandestin de la politique par l'AMDH qui se proclame de plus en plus porte-voix du séparatisme du Polisario. «Personne ne peut prétendre défendre les droits des Marocains, à l'heure où il les met sur le pied d'égalité avec les supporters du séparatisme. Je fais allusion ici à la «solution démocratique» prônée par le dernier congrès de l'AMDH. Il s'agit là d'une fausse optique. On ne peut pas défendre les Marocains sans défendre le Maroc, sinon il faudra leur donner une autre appellation», s'insurge Abdelhamid Jmahri, membre du bureau politique de l'Union socialiste des forces populaires (USFP) (voir entretien page 5). Même son de cloche auprès des islamistes. «On a des fondamentaux dans ce pays. Notre devise c'est Dieu, la Patrie, le Roi. Petit à petit, c'est l'Islam, une fois c'est le Sahara, une autre fois c'est la Monarchie. Si on commence à remettre en cause ces fondamentaux, qu'est-ce qui unira alors les Marocains? Qu'est-ce qui fera la nation ? Ceci est un débat de fond qu'il ne faut pas prendre à la légère, sinon c'est toute la stabilité du Royaume qui est en jeu», fait remarquer Lahcen Daoudi, secrétaire général-adjoint du Parti de la justice et du développement (PJD), dans un entretien accordé à ALM (voir page5). Pour sa part, Abdellah Ferdaous, membre du bureau politique de l'Union constitutionnelle (UC), affirme que l'AMDH est devenue un fonds de commerce. «Le fait qu'on donne dans le congrès de l'AMDH la parole à des séparatistes, que l'on n'invite que des représentants de l'ambassade d'Algérie, que l'AMDH reçoive des télégrammes de félicitations de la part de partis étrangers qui menacent l'unité territoriale, est inadmissible. Surtout que l'AMDH adopte désormais les positions des séparatistes. Ceci sans parler de l'encouragement de l'homosexualité, des dérives contre l'Islam, entre autres, le fait d'appeler à l'égalité au niveau de l'héritage entre l'homme et la femme en ignorant le texte coranique», souligne M. Ferdaous dans un entretien (voir page 6). En réaction aux critiques de la classe politique, les responsables de l'AMDH ont choisi de camper sur leur position en réaffirmant leur attachement, avec quelques nuances près, aux positions qu'ils ont exprimées lors de leur congrès. «Les positions de l'AMDH que certains contestent aujourd'hui sont les positions que nous défendons depuis longtemps. Nous appelons à une solution démocratique du conflit au Sahara. Nous nous opposons à la guerre et nous sommes pour l'unité des Etats du Maghreb. En plus, lorsque nous parlons de la nécessité du respect des droits individuels des citoyens, nous nous référons aux engagements internationaux du Maroc, étant donné qu'il a ratifié la Convention sur les droits civiques et politiques. Le Royaume est tenu à garantir la liberté religieuse. D'ailleurs, le Royaume établit périodiquement des rapports dans ce sens. Il ne s'agit là nullement d'une atteinte aux sacralités, car seul le respect des droits de l'Homme est sacré. Les droits de l'Homme sont indivisibles. Nous ne pouvons pas parler du respect de certains droits et nier les autres. Ceci dit, ceux qui s'attaquent à l'AMDH, s'attaquent en réalité aux droits de l'Homme», se défend Abdellilah Benabdessalam, vice-président de l'AMDH. Uune position qui ne fait sans doute pas l'unanimité au Maroc puisque l'ensemble de la classe politique vient de s'insurger contre le discours pro-séparatiste de certains membres de l'AMDH. Les droits de l'Homme sont certes sacrés, estiment la plupart dirigeants politiques nationaux, mais les fondements de la Nation et qui font son unité le sont tout autant. Une précision de taille à l'encontre du tenant du discours radical au sein de l'AMDH.