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Le grand voyage de Moulay Hassan (4)
Publié dans Aujourd'hui le Maroc le 23 - 01 - 2004

“Le Voyage du Sultan Moulay Hassan au Tafilalt“ retrace une passionnante expédition qui a duré six mois. Son auteur, Amina Aouchar, nous fait vivre, comme dans un roman, les étapes d'un périlleux itinéraire, tracé par un grand Sultan. Son éditrice Ileana Marchesani a autorisé ALM à en publier des extraits.
Cette oasis froide, sans palmiers dattiers, est un havre de verdure dans cette contrée aride. La caravane, sur les hauteurs, longe le cours d'eau dont les berges étroites sont découpées en de minuscules jardins et en vergers plantés de noyers, de figuiers et de vignes grimpantes. L'Ansegmir, affluent de la Moulouya, tel un ver luisant, court rapide et clair sur un lit de galets noirs. De petits ksour élégants, éclairés d'une lumière rose par les rayons du matin s'égrènent le long du cours d'eau. Au loin vers le sud se dresse le Jbel 'Ayachi ; le soleil levant fait briller la neige sur son sommet.
Il n'est pas encore midi que le camp est déjà dressé sur une esplanade. Les Aït Izdeg craignent le châtiment que le Sultan leur réserve et savent qu'il vaudrait mieux pour toute la tribu que Moulay Hassan soit mieux disposé à son égard lorsqu'il foulera son territoire. Leurs représentants entreprennent alors de le supplier. Comme il est de tradition, ils sacrifient des taureaux devant les batteries des canons dressées à l'entrée du camp royal et devant les principaux corps d'armée16.
Le Sultan, après avoir pris quelque repos dans ses quartiers privés, apparaît dans le siwân, tapissé de velours vert et écarlate, où ont lieu les audiences royales, précédé de l'acclamation rituelle des ‘abîd, Allah ibârak fî 'amr Sîdî ! Il fait appeler auprès de lui le Premier ministre, al-sadr al-'adham, à la fois ministre de l'Intérieur, chargé de faire respecter l'ordre public et de veiller aux relations des provinces avec le pouvoir central, et conseiller d'Etat, responsable de la rédaction des dahirs, des textes de loi.
Al-Haj al-Mâ'tî al-Jâm'î, membre de cette grande famille du guich, armée, de Fès qui vient, l'an dernier, de succéder à son frère aux mêmes fonctions, salue en se courbant à trois reprises avant d'atteindre son maître ; il se penche pour le baisemain dû à l'Emir des croyants, mais le Souverain le relève avant qu'il n'ait posé ses lèvres. Il lui fait part de ses ordres à voix basse et lui demande d'informer les Aït Izdeg qu'il prend acte de leur supplique, qu'il examinera leur cas une fois qu'il aura réglé les problèmes des Aït 'Ayache.
Des représentants de la tribu se pressent d'ailleurs à l'entrée du camp royal, vers l'accès aux tentes des ministres, gardées par les soldats. Des enfants se mêlent à eux, espérant entrevoir ces personnages importants et peut-être même, avec un peu de chance, apercevoir le Shrîf, Moulay Hassan. Le lendemain, après la prière d'al-'âsr, le Premier ministre, sur ordre du Sultan, reçoit les notables et les shurfâ de la tribu et leur fait part des remontrances de leur Souverain : comment ont-ils pu ces Aït 'Ayache, si valeureux, trahir leurs frères Aït Youssi avec lesquels, durant des siècles, ils furent chargés de surveiller les routes ? Comment ont-
ils pu, voici près de trois ans, participer au sac de la garnison de Tit'n'Ourmas, tenue par les Aït Youssi qui veillent, au loin vers Ksabi, sur la route du Tafilalt ? Comment ont-ils pu s'allier à ces fauteurs de troubles que sont les Aït Yafelman? Comment ont-ils pu harceler l'armée qui poursuivait les Aït Sokhmane, coupables d'avoir provoqué en 1888, au cours d'une échauffourée, la mort de Moulay Srûr, oncle du Sultan ? Savaient-ils qu'ils protégeaient ainsi la fuite des criminels ? Et même s'ils pensaient seulement décourager une opération de police dont ils se croyaient la cible, cet argument ne les disculpait pas aux yeux du makhzen.
Le lendemain, au camp de l'armée, toute la journée, les cavaliers des tribus organisent des courses de chevaux qui s'achèvent par des tirs à blanc, le cavalier debout sur les étriers, le fusil tenu haut au-dessus de la tête. Les soldats tirent des salves en l'air. Au camp des tribus, tambourins et youyous accompagnent danseurs et danseuses parés de leurs plus beaux atours. Toute la journée, une odeur de friture de pâtisserie, de grillades de viande s'exhale sur le camp. Il y a déjà dix jours que la mhalla s'est arrêtée au bord du Ziz et les signes d'un départ prochain ne se font guère sentir. Le marché est de moins en moins bien approvisionné et l'orge, notamment, manque pour nourrir les bêtes auxquelles ne peuvent suffire les touffes d'alfa brûlées par le soleil et les fanes du maïs fraîchement récolté.
Les officiers occupent leurs troupes à faire des manœuvres. La Cour se livre à son péché mignon, colporter nouvelles et rumeurs : le prince aîné Moulay Mhammed, qui s'avance à la rencontre de la mhalla par la route du Daddès, aurait envoyé des fonds au Sultan, ce qui signifie que le voyage risque de durer encore longtemps. Les ambassadeurs d'Espagne et de Grande-Bretagne auraient fait savoir qu'ils souhaiteraient être reçus par Sa Majesté dès son arrivée à Marrakech. Un détachement chargé de percevoir l'impôt s'est rendu chez les Aït Hdidou, réunis en ce moment pour leur grand moussem, et n'est pas encore revenu.
Plus d'un aurait souhaité faire partie de ce détachement pour se trouver en ce moment là-haut à Imichil. Les gens du pays rapportent que, dans cette tribu dispersée à travers les vallées et montagnes du Jbel Deren, les mariages sont organisés collectivement, une fois l'an, fin septembre, après les moissons et avant les grands froids de l'hiver. Toutes les fractions de la tribu se rendent au bord des lacs Isli, “le marié”, et Tislit, “la mariée”, et dressent leurs tentes noires sur les flancs de la montagne. Les jeunes filles à la coiffe pointue maintenue par des foulards multicolores, les joues rougies au ‘akar, pommade à base de pétales de rose, les sourcils passés au harkûs, noir de fumée, les yeux soulignés de khôl, les gencives et les lèvres colorées de suwâk, écorce de noyer, la handîra rayée sur les épaules, croisent les jeunes gens aux maigres barbichettes, aux turbans conquérants. Ils se jaugent, s'observent, s'apprécient, se choisissent et vont déclarer devant les notables de leurs clans et en présence du fqîh, vouloir devenir mari et femme. On convient de la dot, une paire de babouches, les plus belles viennent de Fès, un morceau de tissu, un mouton, un pain de sucre... à chaque fiancée selon son rang au sein du clan. Le soir, un grand ahidûs, danse collective rythmée par les tambourins, réunit hommes et femmes, épaule contre épaule, chantant ou improvisant des vers, provoquant des joutes poétiques au cours desquelles les voix féminines, aiguës, s'insinuent dans le chant rauque des jeunes gens.
La mhalla ne lève enfin le camp qu'aux premiers jours de l'automne.
« Puis, Nous repartîmes, escorté par un détachement formé par les hommes les plus valeureux de la tribu des Aït Izdeg, montés sur des chevaux innombrables. Nous arrivâmes sur le territoire des Aït Merhad […] »
Au lieu de descendre le cours de l'oued en direction de Ksar Souk, la mhalla bifurque vers l'ouest et remonte vers l'amont, suscitant l'inquiétude des voyageurs. Les mieux avertis savent que Sa Majesté a fait reconnaître l'itinéraire : « Du Guers à Tamgourt : six heures, de Tamgourt à Samgat au ksar de Timlwân : six heures […] ». Mais après trente-cinq jours passés dans le Guers, nombreux sont ceux qui auraient préféré voir la colonne poursuivre en direction du sud pour permettre au Sultan d'effectuer le pèlerinage au Tafilalt et rebrousser chemin. Septembre est déjà presque achevé et dans ces montagnes, l'hiver arrive très vite.
• Par Amina Aouchar
Historienne


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