Envisage-t-on un seul instant une affinité entre le parlementaire hollandais, le populiste Geert Wilders, connu pour ses idées islamophobes et Mohamed Saïd Tantaoui, Cheikh d'al-Azhar. Aucune. Désormais, ils sont tous deux d'accord pour interdire le foulard. Le premier, qui n'a jamais eu peur du ridicule, propose un impôt sur le voile qui taxerait aux Pays-Bas ce «chiffon» pour lutter contre cette «pollution» visuelle générée dans l'espace public, par ces accoutrements fantomatiques. On connaissait la taxe carbone pour lutter contre la pollution. L'extrémisme batave a inventé «la taxe voile». Mohamed Saïd Tantaoui, lui a obligé, lors d'une visite d'inspection qu'il a effectuée dans les lycées, une lycéenne d'enlever son niqab. Tantaoui n'est pas allé par quatre chemins. Il s'est vivement emporté, en demandant instamment à l'élève, dans une classe exclusivement féminine, d'enlever ce «niqab» qui n'est, selon lui, «qu'une simple tradition, qui n'a rien à voir, ni de près ni de loin, avec la religion et l'Islam». Il a par ailleurs annoncé son intention de publier une circulaire prohibant le niqab dans les lycées d'al-Azhar. Le Parlement italien est saisi d'un projet de loi qui veut criminaliser le port du voile et du niqab avec une peine de prison de 2 ans et une amende de 2.000€ euros pour le port, dans l'espace public, de ces tenues de camouflage. On commence à parler de «délit culturel» en pensant aux interdictions du voile, de la polygamie ou même de l'excision, monstrueux délit tout court. La France, elle, a confié à une commission parlementaire la réflexion sur le niqab qui a entendu Elisabeth Badinter dénoncer cette tradition pachtoune qui, première dans l'histoire de l'humanité, instaure «un vêtement pour le visage». Si l'habit ne fait pas le moine, le voile et la barbe font aujourd'hui le musulman. Dans l'algèbre des valeurs, le monde musulman confectionne un théâtre de l'absurde. L'accessoire s'est essentialisé et l'essentiel s'est accessoirisé. Au Maroc, nous n'échappons pas à cette tendance. Les foulards ont fleuri chez nous au même rythme que les paraboles sur les terrasses de nos immeubles. Ils sont d'ailleurs liés. Nos facs, espace de savoir et de culture, regorgent de foulards qui se présentent comme autant de remparts contre l'intelligence et le savoir, seuls moyens de lutte contre la barbarie. Maintenant, on commence à voir des niqabs. L'autre jour, dans un restaurant, une femme mangeait sous son niqab face à son homme triomphant. Nauséeux. Je n'ai pu m'empêcher cette réflexion : de deux choses l'une, ou cette femme est moche et on tente de le dissimuler ou elle est très belle et on redoute qu'elle soit vue ! Dans les deux cas, ce sont les intérêts de son homme qui sont préservés. Elle, en revanche, n'était qu'une ombre digne d'être racontée à la troisième personne.