Devenu indissociable de nos vies, l'Internet est, dit-on, la propriété de tous ? Mais est-ce vraiment le cas ? Internet offre à tous les habitants de la planète l'accès instantané à la connaissance. C'est également grâce à lui que le concept de «village global» est devenu une réalité. Récemment, la France, à travers sa loi Hadopi 1, a reconnu officiellement que l'accès à l'Internet est une composante de la liberté de communication et d'expression telle qu'elle est défendue par la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789. Internet fait donc partie intégrante de nos vies. On a cependant du mal à imaginer qu'Internet ne soit qu'un réseau anarchique d'ordinateurs communiquant entre eux sans aucun contrôle. N'existe-t-il pas un organisme chargé de la coordination internationale d'internet? Le contrôle d'Internet est-il unilatéral ou multilatéral ? Pour répondre à ces deux questions, il faut recourir à l'Histoire. Internet représente l'achèvement du travail de chercheurs dont le but était d'interconnecter des ordinateurs. Il s'agit de l'évolution d'une réalisation militaire américaine qui a été initiée par le Darpa (Defense Advanced Research Projet Agency), le service des recherches avancées du département de la défense américain. On trouve en effet dans les objectifs initiaux la volonté de concevoir un système de communication capable de se maintenir en cas d'attaque nucléaire. Le projet de la Darpa aboutit à la mise en place d'un réseau décentralisé nommé Arpanet dans lequel furent progressivement incluses des universités américaines. Sous la houlette de la Darpa, cet internet naissant va être progressivement géré par la NSF (National Science Foundation). Les liens avec l'administration militaire demeurent très forts. Si la NSF aide au développement du réseau, sa gestion au quotidien relève de l'Internet Assigned Numbers Authority (IANA), un service de la Darpa. Internet interconnecte de plus en plus de réseaux civils. En 1983, les militaires décident de se détacher de l'internet en créant leur propre réseau Milnet. Pour s'occuper du développement de l'Internet civil, c'est la National Telecommunications and Information Administration (NTIA) qui prend la relève. Il s'agit d'une agence gouvernementale dépendant du département du commerce. En 1998, l'Administration Clinton, sous la pression des sociétés commerciales opérant dans l'internet, est contrainte de prendre des mesures afin que l'internet ne soit plus sous la seule houlette du gouvernement. L'Icann (Internet Corporation for Assigned Names and Numbers) est créé. C'est une société privée, de droit californien, qui a repris le rôle du NTIA et qui exerce aujourd'hui ce que l'on appelle la fonction IANA : par l'exercice de cette fonction, l'Icann décide de tout ce qui touche à l'attribution des noms de domaine dans le monde entier. Pour qu'Internet ne soit pas une gigantesque cacophonie, chaque ordinateur s'identifie avec son adresse IP qui doit être unique. C'est l'Icann qui détermine quelles sont les plages d'adresses IP disponibles et qui a le droit de les utiliser. Localement, ce sont les organismes RIR (Registre Internet Régional) qui distribuent les adresses IP que l'Icann leur a attribuées. L'adresse IP pratique pour identifier un ordinateur est très peu commode pour un utilisateur. On utilise alors des noms de domaines plus pratiques à retenir. Il faut alors recourir aux DNS (Domain Name Server) pour traduire un nom de domaine en IP. Il existe ainsi 13 serveurs DNS racine dans le monde. C'est l'Icann, qui contrôle ces 13 serveurs vitaux. En imaginant un scénario de conflit armé, les USA de par son contrôle sur l'Icann sont la seule nation qui pourrait rayer d'internet un pays entier en décidant de couper son extension (exemple : .fr).La commissaire européenne chargée de la société de l'information a appelé à plus de transparence et de gestion multilatérale d'internet. Mais les Américains, surtout depuis le 11 septembre, ne sont pas prêts de lâcher le contrôle de l'Internet.