Philippe de Villiers disparaît du radar de l'actualité et entre en totale hibernation entre deux scrutins électoraux. Pourtant son nom avait été récemment cité dans le microcosme comme un ministrable potentiel. Une campagne des élections européennes digne de ce nom, ne pouvait dérouler son vacarme sans que Philippe de Villiers, président du Mouvement pour la France, ne fasse entendre sa petite musique. Lui qui est resté dans les mémoires comme un des farouches détracteurs de l'Europe de Bruxelles, gérée par des technocrates irresponsables et déconnectés de la réalité. Signe des temps durs pour Philippe de Villiers, il a été contraint de faire liste commune avec un autre original, Fréderic Nihous, leader du groupusculaire «Chasse, pêche, nature et tradition» (CPNT), sous prétexte de défendre « une Europe des différences, des libertés et de nations ». Tous les deux roulent sous la bannière de «Libertas» un groupe de pression irlandais devenu un parti politique à prétention européenne dirigé par le milliardaire irlandais Declan Ganley. L'objectif déclaré de cette association, souverainiste et eurosceptique, qui voit bourgeonner ses candidats dans les 27 pays de l'Union, est de faire de ces élections européennes un référendum contre le traité de Lisbonne. La liste de Philippe de Villiers est créditée par les sondages de 6%. Une fédération des mecontents de base de l'Europe de Bruxelles. Mais le discours de chef, qui dispose d'un certain charisme et d'une originalité dans la posture, a de fortes chances d'atteindre de larges franges de la société au delà de son périmètre électoral traditionnel. C'est que l'homme, député de la Vendée, de son vrai nom Philippe Le Jolis de Villiers de Saintignon, n'est avare ni de formules qui tuent ni d'audace qui propulse. Philippe de Villiers a longtemps été poussé par la droite classique qu'incarnait Jacques Chirac, a être l'alternative respectable et fréquentable à l'extrême droite raciste et antisémite qu'incarne le Front National de Jean Marie Le Pen. Succès relatif puisqu'il n'a pas réussi à faire disparaître le Front National, mais il est parvenu à se faire un nom. Aujourd'hui chantre d'une islamophobie assumée depuis la publication en 2006 d'un brulot intitulé «Les mosquées de Roissy», Philippe de Villiers disparaît du radar de l'actualité et entre en totale hibernation entre deux scrutins électoraux. Pourtant son nom avait été récemment cité dans le microcosme comme un ministrable potentiel dans le cas où Nicolas Sarkozy voudrait diriger le manche de son ouverture à droite. D'ailleurs, Philippe de Villiers, ménageant sans doute l'avenir, a la dent douce contre le président de la République. Alors que Nicolas Sarkozy est malmené sur tous les fronts, Philippe de Villiers choisit «l'inoffensif», sujet turc pour le titiller : «Nicolas Sarkozy joue de la flûte turque puisque candidat à l'élection présidentielle, il déclare : «mon premier geste sera de stopper la négociation avec la Turquie». Et une fois élu, il l'accélère». Par contre, Philippe de Villiers déverse sa colère contre les têtes de liste UMP que sont Michel Barnier-Rachida Dati: «Ce sont des têtes de liste qui voyagent aux frais de l'Etat et qui disposent de fonds considérables lorsqu'il s'agit d'acheter un électorat». Et de s'interroger avec délectation: «Lorsque Michel Barnier se déplace, est-ce le ministre qui se déplace ou le candidat ? Qui paye ?». Devant les charges répétées contre lui, Michel Barnier, conforté par des sondages prometteurs, a refusé l'idée de débattre avec Philippe de Villiers, et lui a même rendu la monnaie de sa pièce : «J'ai l'impression d'entendre une rediffusion, un peu comme La Grande Vadrouille. Sauf que La Grande Vadrouille, ça fait rire». Dans sa campagne pour ces européennes , Philippe de Villiers table sur les victimes de cette Europe incapable de protéger les marchés et les emplois et lance cet appel : «J'appelle tous ceux qui ne sont pas contents de l'Europe -et ils sont nombreux-, toutes les victimes, à se rebeller et à dire : “on ne veut pas de ce libre-échangisme“». Il prétend par ailleurs disposer de la solution pour corriger cette situation. Il ne s'agit ni plus ni moins que de tenter de «bloquer le système pour le réorienter dans le sens d'une Europe qui ajoutera de manière harmonieuse des protections plutôt que de les mutiler et de les retrancher».