De retour des Antilles, Olivier Besancenot estime que le collectif guadeloupéen LKP qui a été le fer de lance de la contestation sociale «est un exemple à suivre et à méditer» et qu'il faut en créer «partout en France». L'analyse est dans tous les esprits et court les pages éditoriales des grands journaux : les tensions sociales que traverse la France à cause de la crise économique et la dépression financière peuvent facilement mettre Nicolas Sarkozy dans un étouffant tête-à-tête avec Olivier Besancenot, le porte parole du nouveau parti anticapitaliste. Même si le deux hommes n'en sont pas encore à étudier les mesures d'une table des négociations sociales, un étrange sondage vient de les mettre en tête des personnalisés à qui les Français accordent le plus de crédit pour faire bouger les choses. Il s'agit d'un sondage BVA-Leo Burnett pour BFM et la Tribune. Curieux voisinage que de voir le symbole de l'extrême gauche radicalisée à outrance, qui fait du trotskisme le plus abrasif son label de qualité, disputer avec autant d'aisance le crédit de l'action et de l'efficacité au président de la République lui-même. Un attelage tout aussi révélateur qui en dit long sur le positionnement des partis politiques traditionnels qui semblent perdre leur attractivité et les centrales syndicales leur capacité d'encadrement. L'homme à qui les Français semblent accorder un énorme crédit ne cache plus son ambition et sa stratégie. De retour des Antilles où le feu social avait paralysé la machine économique pendant de longues semaines, Olivier Besancenot estime que le collectif guadeloupéen LKP qui a été le fer de lance de la contestation sociale «est un exemple à suivre et à méditer» et qu'il faut en créer «partout en France». Les menaces ne sont pas en l'air. La journée de protestation nationale prévue ce jeudi 19 mars peut être un laboratoire grandeur nature à ces nouvelles théories sur la mobilisation permanente. Pour Olivier Besancenot, cette journée «doit être un succès, mais 24 heures de mobilisation, ça ne suffit pas… C'est là que les organisations syndicales et politiques pourraient s'inspirer de la Guadeloupe. Grâce à la grève générale, l'augmentation des salaires est devenue acceptable» Ce discours donne l'impression de désarçonner les syndicats traditionnels. Commentant l'attitude d'Olivier Besancenot, le numéro 1 de la CFDT François Chérèque utilise le langage qui sent bon la jalouse camaraderie : «ça fait un peu rapace, on attend la misère pour agir (...) Nous, on agit au quotidien». Mais un homme politique de la gauche socialiste a senti le danger qu'il y avait à laisser s'installer cette logique manichéenne entre Nicolas Sarkozy et Oliver Besancenot, c'est Laurent Fabius. Il a volontairement choisi le ton de l'alerte dramatisante et de l'avertissement préventif pour dire tout le mal qu'il pense de la gouvernance de Nicolas Sarkozy : «Si la politique du gouvernement ne change pas, je crains qu'au printemps - je dis je crains parce que c'est un risque que personne ne peut souhaiter - devant cette situation désespérante, il y ait des mouvements profonds et effectivement radicaux de révoltes». Le mot «révolte», lâché avec une nonchalance étudiée, est porté par les réactions de plus en plus violentes des salariés licenciés qui n'hésitent plus à prendre leur directeur en otage comme c'était le cas dans une usine de Sony ou les affrontements violents qui revoient le jour dans des quartiers de banlieues comme Les Muraux. Nicolas Sarkozy avait chargé son parti, l'UMP, de répondre à Laurent Fabius. Et c'est Fréderic Lefebvre, un des plus violents porte-flingue du président qui s'en est chargé. Après avoir demandé de rajouter Laurent Fabius à la liste des «rapaces» évoquée par François Chérèque, il s'indigne : «un grand parti politique comme le Parti socialiste qui se retrouve à la remorque de M. Besancenot et qui se comporte comme un groupuscule d'extrême gauche, ce n'est pas ce que je souhaite pour une démocratie apaisée». Pour le moment, rien n'indique que Nicolas Sarkozy ait décidé de changer quoi que ce soit dans sa politique susceptible de lui éviter le tête-à-tête social avec Olivier Besancenot, l'emblème d'une rue en ébullition. Un de ses influents conseillers, Henri Guaino le confirme : «il faut garder son sang-froid, éviter la fuite en avant, les changements de cap incessants qui ne feraient qu'ajouter à la crise (…) Personne ne sait ce que la crise nous contraindra à faire».