Après quatre ans de clandestinité, l'association des gays marocains « Kifkif » (Egaux), basée à Madrid, veut aujourd'hui sortir du placard, comme le laisse entendre son coordinateur général, Samir Bergachi. «Je suis venu aujourd'hui pour briser le silence et lever toute équivoque sur les objectifs de notre association». Le propos est de Samir Bergachi, coordinateur de l'association des gays marocains «Kifkif» (Nous sommes tous égaux). Venu à Rabat, en provenance de Madrid où son ONG est basée, le responsable de «Kifkif» a accordé une interview fleuve au quotidien arabophone «Assabah» où il a fait part de la volonté de son association de sortir de la clandestinité. L'ONG veut opérer, comme son titre l'indique, le plus normalement dans son pays, au même titre que les autres associations chargées de la défense des droits de l'Homme. A ce titre, M. Berghachi, 22 ans, annonce avoir pris contact lors de son séjour au Maroc avec les dirigeants de différentes ONG nationales, dont l'Association marocaine des droits de l'Homme de Khadija Ryadi et «Bayt Al Hikma» de Khadija Rouissi. «Khadija Ryadi, dès que je l'ai rencontrée et jusqu'à la fin de notre entretien, m'a assuré que l'approche de l'AMDH va dans le même sens de la position internationale vis-à-vis des homosexuels», se félicite le responsable de «Kifkif», qui fait état de «progrès» dans la position de l'ONG «Bayt Al Hikma». «Nous nous sommes mis d'accord sur l'organisation d'une série de rencontres sous le thème «Layali Bayt Al Hikma». Nous avons également convenu de mettre le sujet de l'homosexualité au centre de ces manifestations», a-t-il annoncé. «Kifkif» veut parier sur «les ONG jouissant de crédibilité et de bonne réputation au Maroc» pour faire valoir ses revendications. Elle sait très bien que le chemin est semé d'épines de barrières difficilement franchissables. M. Bergachi veut bien l'admettre. «J'ai expliqué à Khadija Ryadi que nous ne voulons pas entrer en confrontation avec l'Etat (…) même s'il existe parmi nous des gens qui se hâtent de dire que nous existons, que nous voulons sortir de la clandestinité, et qu'advienne que pourra», a-t-il indiqué. Au-delà de la question de l'autorisation, il y a bien un obstacle que l'ONG «Kifkif» aura grand-peine à franchir. «L'AMDH veut lancer une campagne contre la criminalisation de l'homosexualité, c'est une initiative très positive car, l'ennemi réel de l'homosexualité n'est pas la loi mais les mentalités pétrifiées ; notre ennemi n'est pas le régime ni l'Etat, mais bel et bien le malentendu», a-t-il expliqué. Interrogé sur la création de l'ONG «Kifkif», M. Bergachi a indiqué que l'acte de naissance datait de 2004, année à laquelle plusieurs homosexuels avaient été arrêtés dans la ville de Tétouan. «Tout allait bien avant 2004, nous existions et personne ne faisait attention à nous ou parlait de nous. En réalité, nous étions satisfaits de cette situation. L'Etat ne nous prêtait aucune attention et les intégristes nous ignoraient», met en exergue M. Bergachi. Mais 2004 a marqué l'installation d'une rupture avec le pays d'origine, l'ONG « Kifkif » ayant choisi d'émigrer en Espagne où elle opère depuis cette date de manière légale.