Le président de l'Association sahraouie des droits de l'Homme, Ramdane Ould Messaoud, met en garde contre l'éventualité de financement des actions d'Al Qaïda par l'argent de la drogue obtenu par le Polisario. ALM : Les Forces armées royales ont fait capoter le 17 janvier 2009 une tentative d'incursion de huit trafiquants de drogue appartenant au Polisario vers le Maroc. Quelle lecture faites-vous de ce développement ? Ramdane Ould Messaoud : Il faut d'abord rappeler que, dans le communiqué émis à ce sujet par le ministère de l'Intérieur, il est clairement souligné que les trafiquants de drogue en question appartiennent à la tribu de Rguibat-Charg. Je dois à mon tour préciser que c'est la même tribu à laquelle est issu le soi-disant «ministre de la défense» du Polisario, Ould Al Bouhali. J'apporte cette précision pour dire que l'activité des barons de la drogue provenant des camps de Tindouf se fait avec la bénédiction, voire avec le soutien logistique, des hauts responsables du Polisario. En tant que président de l'Assadeh (Association sahraouie de défense des droits de l'Homme), je dois rappeler que notre association avait déjà saisi par lettre en juillet 2006 le secrétaire général des Nations Unies sur le danger que font planer ces trafiquants sur la stabilité de la région. Quel danger peuvent alors représenter des trafiquants de drogue pour la stabilité de la région ? Le Centre européen d'intelligence stratégique et de sécurité (ESISC) avait alerté dans son dernier rapport sur la possibilité que ces trafiquants participent au financement des groupes terroristes actifs dans la région sahélo-saharienne. Il y a deux ans, des éléments de groupes terroristes ont été arrêtés à la frontière du Mali et de l'Algérie en possession d'armes appartenant au front Polisario. Il s'agit des mêmes armes livrées par l'Algérie aux mercenaires du Polisario. De ce fait, il ressort que les armes du Polisario arrivent souvent entre les mains des groupes intégristes s'activant entre le sud de l'Algérie et le nord du Mali. Quel intérêt auraient des éléments du Polisario à livrer des armes aux groupes terroristes ? La livraison de ces armes, dont notamment les Kalachnikov qui sont des armes de guerre, à ces groupes terroristes se fait en contrepartie de la protection que ces derniers sont appelés à assurer aux trafiquants de drogue provenant des camps de Tindouf. Plus encore, quand on connaît la tentation intégriste à laquelle sont assujettis les jeunes habitants des camps de Tindouf, on imagine facilement le danger de leur dérapage vers l'action terroriste. Désespérés quant à l'issue du conflit autour du Sahara, ces jeunes deviennent une proie facile à embrigader par les terroristes, notamment l'Organisation Al-Qaïda au Maghreb islamique. Qu'est-ce qui explique la passivité des autorités algériennes devant ce danger ? Nous tenons l'Algérie pour le premier responsable d'une éventuelle dérive des éléments du Polisario vers l'action terroriste. C'est ce pays qui arme le Polisario et, par conséquent, il a l'obligation de vérifier si les armes qu'il livre au Polisario ne tombent entre les mains des groupes terroristes. Que doit alors faire le Maroc pour contrecarrer ce danger ? Le Maroc est directement concerné par cette menace, sachant que le trafic se fait au niveau de ses points frontaliers, notamment « Oued Ennamouss », situé à 50 kilomètres de Foum Zguid, relevant de la province de Tata. Devant cette situation, le Maroc est appelé à renforcer le contrôle de ses frontières avec l'Algérie pour contrer toute tentative d'infiltration d'éléments terroristes. Il est également appelé à lancer une campagne internationale de sensibilisation sur le danger que représente le Polisario pour la stabilité de la région.