Un livre, «Quand la Chine s'éveillera… le monde tremblera», écrit en 1973, fera parler de son auteur, Alain Peyrefitte, jusqu'à la fin des temps. Pour l'instant le monde continue de s'émerveiller et s'il ne tremble pas encore, il frisonne déjà. Trois évènements d'importance inégale mais porteurs d'un débat de fond ont marqué les estivales de cette année. La polémique autour de la circulaire du Premier ministre sur l'utilisation de l'arabe dans les administrations, les Jeux olympiques de Pékin et la guerre en Géorgie. Le zèle que met Abbas El Fassi à appliquer une disposition constitutionnelle, a hérissé les militants berbéristes de ce qu'un ami appelle «al-amazighya al-jihadya». Que voulaient-ils ? Ni l'amazigh ni l'arabe, mais, par un grand non dit, le maintien du statut quo qui permet l'emploi du français au mépris de la loi fondamentale. Une étincelle qui a allumé les militants de «al-arabya al-jihadya». Nul besoin de récapituler le pugilat qui en a résulté. Un débat d'arrière-garde et un spectacle d'une tristesse... Depuis l'élection de Nicolas Sarkozy à la présidence, la France a entrepris la réforme de son enseignement. Commentant la rentrée scolaire de son pays, Xavier Darcos, ministre français de l'Education a indiqué qu'entre autres réformes figure le renforcement de l'anglais de manière à ce qu'à la fin des cursus, les lauréats soient parfaitement bilingues. Tout bonnement parce que, explique-t-il, la langue de la communication aujourd'hui c'est l'anglais. Ce constat qu'il fait de la situation de la langue maternelle de son pays, qui appartient tout de même au G8, devrait amener nos Marocains à poser un regard d'humilité sur le rôle de l'arabe ou de l'amazigh dans le monde. Ce qui ne revient pas à renvoyer nos langues nationales dos à dos ou à jeter avec l'eau du bain le français. Mais la clairvoyance invite à situer l'urgence là où elle est. Elle n'est ni arabisation ni amazighisation ni encore préférence de l'anglais au français. Seulement histoire de vivre en phase avec son temps et, je le répète pour la énième fois, de poser le sujet de fond : Quelle langue pour notre enseignement et donc pour l'essentiel de notre quotidien ? La question est de nature shakespearienne, un choix qui revient à être ou ne pas être. Un livre, «Quand la Chine s'éveillera… le monde tremblera», écrit en 1973, fera parler de son auteur, Alain Peyrefitte, jusqu'à la fin des temps. Pour l'instant le monde continue de s'émerveiller et s'il ne tremble pas encore, il frisonne déjà. Tout a été dit sur les Jeux olympiques de Pékin et il est un peu tard pour en rajouter. La Russie est tout aussi en médailles, gagnées en Géorgie avec l'âcre goût du militaire. Pékin et Moscou ont en commun d'être les acteurs d'une compétition dans laquelle l'Occident ne sait s'il doit les affronter ou les séduire. Ou les séduire pour mieux les réduire. A priori, il n'y a aucun lien entre les Jeux olympiques et la guerre en Géorgie. En vérité, ils sont les deux faces d'une même monnaie : une compétition sans merci pour la suprématie. La ridicule comptabilité des podiums montés par les athlètes traduit l'âpreté de la lutte : l'arithmétique olympique qui ne retient que l'or fait de la Chine le vainqueur naturel de ces jeux, mais les USA ne veulent tenir compte que de l'ensemble des médailles obtenues pour disputer aux Chinois le titre, tandis que le chef de l'Etat français additionne celles de l'Union européenne pour faire d'elle le champion toutes catégories de ces jeux. A nous, en plus de «l'essentiel c'est de participer», reviendra le lot de consolation : nous nous souviendrons qu'à Pékin, la Chine a signé son éveil et en Géorgie, la Russie son retour. Avec l'espoir d'annoncer le terme proche de l'unilatéralisme, pour le bonheur également des petits peuples qui se sentent et respirent mieux dans un monde multipolaire.