Plusieurs signataires affirment sans ambages que si le mouvement se transforme en parti, ils se retireraient. Alors on est face à quoi ? Le Premier ministre Abbas El Fassi aurait déclaré que le Roi ne laisserait pas faire un parti qui se réclamerait exclusivement de lui. C'est très imprudent parce que la loi fondamentale ne prévoit pas d'interdire à un citoyen de jouir de ses droits civiques au nom d'un parcours aux côtés du Souverain. Fouad Ali El Himma est attaqué de toutes parts au nom de sa proximité avec le Roi. Quelles que soient ses dénégations et les assurances de ses amis du sérail, tout ce qu'il fait est mis au compte du Palais. Cette confusion est difficile à combattre, même si elle est quelque part injuste. Et il faut dire qu'El Himma ne fait pas d'efforts pour signifier son autonomie. Ainsi le fait de mettre sur sa première liste deux ministres estampillés «Palais» et repeints RNI, quelques mois après la constitution chahutée du gouvernement, n'est pas un bon signal pour qui veut s'éloigner de l'étiquette Makhzen. Maintenant sommes-nous face à une constitution de parti ou un machin hybride sans conséquence ? Plusieurs signataires affirment sans ambages que si le mouvement se transforme en parti, ils se retireraient. Alors on est face à quoi ? «Une initiative pour mobiliser les démocrates autour de valeurs et d'actions de développement précises par le biais de l'INDH», pas de quoi casser 3 pattes à un canard. Seulement, l'autre version, celle du chargé de relation presse, c'est que le choix définitif du cadre légal n'est pas fait et «qu'il ne faut pas insulter l'avenir». Il faut croire que la confusion ne concerne pas seulement la perception du mouvement à l'extérieur mais aussi chez ceux qui l'ont intégré. Honnêtement, s'il s'agit d'une énième association politique en vue d'animer la vie politique, je ne vois pas où est le problème. Même si, encore une fois, que l'un des signataires annonce «nous jugerons les partis, leur éthique» me paraît surréaliste parce que cela voudrait dire que l'on est en face d'une agence de rating politique, une idiotie dont le Maroc aurait l'exclusivité. Maintenant, le plus probable c'est que cela se termine par la création d'un parti. A ce moment là, la seule bonne question est de savoir à quel besoin il répond. Depuis 10 ans, le slogan «Démocratie et modernité» est galvaudé, on ne sait plus ce qu'il y a derrière ce vocable. Il faudra donc regarder l'offre politique et à quel segment du marché elle s'adresse. 63% de Marocains n'ont pas voté, Naïm Kamal y voit la Justification de toutes les audaces. Disons que cela veut dire qu'il y a des parts de marché à prendre. Pour la gauche c'est tout benef. Le Parti de Fouad Ali El Himma va accélérer le repositionnement à la fois sociétal et politique, quasi-mécaniquement. Le couloir indolore, incolore, celui du soutien au projet démocratique et moderniste du Roi sera occupé par plus apte. La gauche devra, par conséquent, développer son projet. Les plus gênés aux entournures sont le RNI et l'Istiqlal, le premier parce que c'est son fonds de commerce qui s'envole, le second parce que son secrétaire général est déjà otage de « Si Fouad ». La comparaison avec le FDIC est surannée, pour toutes les raisons développées par les observateurs, parce que la situation n'est pas la même, mais surtout parce que la monarchie n'a aucun intérêt à s'impliquer directement dans la mélasse via un parti, sa légitimité n'étant pas en cause. Le Parti transversal d'El Himma sera peut-être celui des Makhzéniens pas celui du Makhzen. Quant à attendre du Roi qu'il arrête le tracteur, seul El Fassi pouvait le faire et il l'a fait.