Nicolas Sarkozy affirme que tout pays a le droit d'accéder au nucléaire. En visite en Egypte, son discours sur la question nucléaire a trouvé des échos positifs. C'est devenu, au pire une tradition mercantile, au mieux un trait de caractère politique de la diplomatique française. Chaque fois que Nicolas Sarkozy foule le sol d'un pays arabe, il se croit presque dans l'obligation de lui proposer une coopération dans le domaine du nucléaire civil. Les frémissements d'une telle initiative ont été conçus lors de la visite d'Etat du président français au Maroc. Elle a été traduite dans les faits lors de son déplacement en Algérie et lors de sa réception controversée à Paris du colonel Mouammar Kadhafi. Elle poursuit son chemin sur les bords du Nil avec le président Hosni Moubarak. Les politologues de l'Elysée mettent en avant deux éléments de pédagogie pour éclairer cette démarche. La première est d'ordre purement économique. La vente des centrales nucléaires civiles françaises permet de donner un formidable coup de fouet à l'économie française. Nicolas Sarkozy n'a-t-il pas promis et juré d'aller chercher la croissance là où elle se trouve ? Et puis, s'interroge-t-on : pour quelles raisons la France devrait céder ce marché juteux à une Amérique dominante et à une Russie conquérante ? La seconde est d'ordre politique et stratégique. Autant la France de Nicolas Sarkozy avait dès le début adopté une attitude de faucon à l'égard de la crise du nucléaire iranien, autant elle joue aujourd'hui la carte du nucléaire civil accessible à la demande comme étant la meilleur manière d'éviter le choc des civilisations. Nicolas Sarkozy profite donc de son premier voyage au Proche- Orient pour déployer sa nouvelle approche : «Je trouve tout à fait normal que tout pays puisse accéder à l'énergie nucléaire dans le respect des traités internationaux. L'Egypte a de gros besoins énergétiques et c'est tout naturellement qu'elle envisage de se lancer dans la construction de centrales nucléaires». Il l'argumente avec autant de conviction et d'originalité que la question s'impose d'elle-même : Et si la fameuse «politique arabe» de la France consisterait, en fin de compte, à vendre du nucléaire civil aux pays arabes pour les dissuader d'acquérir le militaire? Le discours de Nicolas Sarkozy sur la question nucléaire a dû trouver des résonances positives en Egypte, pays qui, certes a signé dès 1981 le Traité de non prolifération nucléaire (TNP), mais qui n'a jamais caché son ambition d'acquérir des centrales nucléaires pour satisfaire son besoin constant de consommation d'énergie. Hosni Moubarak, qui aura reçu Nicolas Sarkozy à Charm El Cheikh et au Caire après un séjour privé extrêmement médiatique, a une longue expérience des présidents français, proportionnelle à sa longévité au pourvoir, 26 ans, de plus en plus contestée. Le porte- parole de l'Elysée, David Martinon avait déjà eu l'occasion de souligner que le chef de l'Etat égyptien «est un président dont l'expérience fait de lui un observateur particulièrement éclairé de la région et de ce qui s'y passe». Avec le socialiste François Mitterrand comme avec le gaulliste Jacques Chirac, le président égyptien avait réussi à développer des relations d'une solide intimité. Avec Nicolas Sarkozy, le fossé générationnel empêche, certes, tout rapprochement de tempéraments. Les deux hommes peuvent se consoler d'avoir une proximité de vue sur l'ensemble des crises de la région. De l'indispensable urgence à sortir de l'impasse institutionnelle au Liban, du rôle constructif que doit jouer Bachar Al Assad dans le pays du cèdre, passant par l'inévitable nécessité de créer un Etat palestinien viable, les deux hommes se disent sur la même longueur d'onde. Sans parler du nucléaire iranien envers lequel Paris et Le Caire manifestent une intransigeante opposition. Nicolas Sarkozy effectue sa visite officielle en Egypte, auréolé d'une réputation en rupture totale avec les positions traditionnelles de ses prédécesseurs. Devançant les possibles interpellations égyptiennes, Nicolas Sarkozy a tenu à relativiser la profondeur de ses liaisons avec les Américains et les Israéliens : «J'ai souvent dit que j'étais l'ami des Etats-Unis et d'Israël, mais cela ne veut pas dire que je partage toujours leurs avis», avait-il lancé à une opinion égyptienne sceptique.