Le gouvernement a adopté un projet de loi portant suppression de la Cour spéciale de justice qui sera remplacée par des Chambres spécialisées près les cours d'appel. Cette décision, qui met fin à quatre décennies d'existence de ce tribunal d'exception, a été largement saluée par les acteurs politiques et la société civile marocaine. La Cour spéciale de Justice (CSJ) ne sera bientôt qu'un mauvais souvenir. L'adoption, mardi, par le Conseil de gouvernement d'un projet de loi portant suppression de cette cour et l'attribution de ses prérogatives aux cours d'appel est le premier pas dans un processus qui sera couronné par la disparition définitive de ce tribunal d'exception du paysage judiciaire marocain. Selon le projet adopté par le gouvernement, cette cour sera supprimée et ses compétences seront attribuées à des Chambres spécialisées près des cours d'appel. Ces nouvelles Chambres seront composées de magistrats hautement qualifiés et ayant une grande expérience en matière de délits financiers. S'agissant des dossiers en cours, le projet de loi prévoit que, dès son entrée en vigueur, toutes les affaires qui sont toujours au stade d'instructions seront transférées devant les juges d'instruction près des cours d'appel où seront créées des Chambres spécialisées. Pour ce qui est des affaires dont la CSJ a déjà entamé l'examen et dont le verdict peut intervenir avant l'entrée en vigueur du projet de loi portant la suppression, elles pourraient faire l'objet de recours contrairement à l'actuelle procédure qui ne permettait aucun recours des jugements prononcés par ce tribunal d'exception. Parallèlement à la suppression de la Cour spéciale de justice, et dans le but d'adapter le code pénal à cette nouvelle donne, le Conseil de gouvernement a examiné et adopté un projet de loi portant amendement des dispositions des articles 241 à 256 du code pénal. L'amendement de ces articles va dans le sens du durcissement des peines relatives à certains crimes financiers tels le détournement de deniers publics, l'abus de confiance, le trafic d'influence et la corruption. Ce projet de loi intègre les peines dans les articles sus-visés, notamment le durcissement de la peine au moyen du relèvement du montant de l'amende et la confiscation en tant que peine supplémentaire, eu égard à la gravité que présente ce genre de crime sur la sécurité de l'économie nationale. Dans une déclaration à la presse, le ministre de la Justice, Mohamed Bouzoubaâ, a indiqué que la suppression de la CSJ intervient en application des orientations de SM le Roi, contenues dans le message royal à l'occasion de l'ouverture de l'année judiciaire. La législation qui régissait cette juridiction, a-t-il souligné, "ne garantissait pas toutes les conditions d'un procès équitable". Le ministre a aussi indiqué que la loi relative à la répression des crimes de corruption, de détournement de deniers publics, d'abus de confiance et de trafic d'influence "doit assurer aux personnes poursuivies dans de telles affaires toutes les garanties stipulées dans le code de procédure pénale". Le titulaire de la Justice a expliqué que le nouveau projet de loi confère toutes les attributions de la Cour spéciale de justice aux Cours d'appel qui vont appliquer les dispositions du code pénal et du code de procédure pénale dans les affaires qui leur seront soumises et qui sont actuellement du ressort de la Cour spéciale de justice. S'agissant des amendements introduits sur les articles du code pénal relatifs au détournement des fonds publics, le ministre a précisé que cette modification apporte un durcissement des peines à l'encontre des auteurs de ces crimes et stipule la confiscation des avoirs provenant du détournement, que ces avoirs soient placés au compte de l'intéressé, de sa femme ou des ayants droit. Réagissant à l'adoption par le gouvernement du projet de loi portant suppression de la Cour spéciale de Justice (CSJ), les organisations de défense des droits de l'Homme et les formations politiques nationales ont salué cette décision estimant qu'il s'agit d'un grand pas franchi en matière de droit qui garantit l'égalité entre les citoyens et qui consacre le principe de l'Etat de droit dont la séparation des pouvoirs.